Article : Les sources locales du Parti communiste français (1921-2020)

Faire l’histoire du Parti communiste français (PCF) et du communisme français au XXe siècle nécessite d’embrasser totalement ce phénomène politique, social et culturel en l’abordant à travers trois échelles : internationale, comme parti politique conçu et considéré durablement comme la composante nationale d’un mouvement révolutionnaire mondial ; nationale, comme organisation occupant depuis un siècle une place originale dans le paysage politique français ; locale, comme parti à forte implantation militante territoriale. Mais, pour des approches thématiques plus spécifiques ou transverses, chacune de ces facettes peut constituer la porte d’entrée pour des investigations dans divers champs disciplinaires : histoire, science politique, sociologie, histoire culturelle, généalogie… 

La dimension internationale. Elle nécessite de sérier deux périodes distinctes. De 1921 à 1943, le Parti communiste constitue la section française de l’Internationale communiste (ou Komintern). Dans ce contexte organique hiérarchisé, la circulation des archives aboutit à la constitution de sources centralisées, conservées aujourd’hui essentiellement dans les Archives d’État russes d’histoire sociale et politique (RGASPI) à Moscou. Pour cette période, elles constituent la principale source concernant le communisme français et de premiers outils de repérage ont été entrepris. Après la Seconde guerre mondiale, la dissolution de l’Internationale communiste (1943) laisse place au mouvement communiste international, ne fonctionnant officiellement plus comme une structure hiérarchisée, mais sur la base de relations multilatérales entre partis communistes nationaux. C’est donc dans les archives des partis-états de l’ex « camp socialiste » et dans celles des autres partis communistes que résident des sources concernant les relations avec le PCF, comme celles du Parti communiste italien conservées par la Fondation Gramsci à Rome. Une cartographie synthétique de ces sources reste à établir.

Au plan national, les archives de la direction du PCF ont été déposées aux Archives départementales de la Seine-Saint-Denis. Les fonds personnels de certains responsables ou intellectuels importants ont pu être confiés à des établissement patrimoniaux, comme le fonds emblématique de Maurice Thorez aux Archives nationales, ou des fonds d’écrivains et d’artistes à l’Institut Mémoires de l'édition contemporaine (Imec), par exemple. D’autres ont été collectés par des organismes scientifiques : le Centre d'histoire de Sciences Po (CHSP), le Centre d’histoire sociale des mondes contemporains (CHS), l'Institut d’histoire du temps présent (IHTP), etc. Par ailleurs, des sources complémentaires résident dans les archives d’institutions (Police, Justice) dont les missions ont parfois concerné spécifiquement l’activité du PCF. On peut les trouver aux Archives nationales (site Pierrefitte-sur-Seine et site d’Aix pour les Archives d’outre-mer), dans les Archives de la préfecture de police de Paris (Le Pré Saint-Gervais), dans les archives de la justice militaire (Le Blanc).  Là aussi, l’outil de repérage panoramique manque toujours.

Au plan local, même si des ressources sont déjà identifiées, dans le réseau public, comme le fonds de la fédération communiste du Val-de-Marne déposé aux Archives du département, ou celui du député Pierre Pranchère aux Archives départementales de la Corrèze, la plus grande part des sources, telles les archives de fédérations départementales et de responsables communistes, voire de sections et de cellules, restent encore à découvrir et être exploitées. 

L’objectif de ce guide des sources locales du Parti communiste français (1921-2020) est de contribuer à combler cette lacune en dressant un état global, département par département, de cette richesse documentaire. La première étape a consisté à solliciter les établissements territoriaux du réseau public des archives. Une seconde associera les autres organisme patrimoniaux, scientifiques, culturels, politiques également détenteurs de sources locales sur le PCF.  

Ce premier résultat acquis, le guide visera ultérieurement à agréger, par étapes, des informations sur les sources accessibles aux plans national, voire international. À défaut de viser un hypothétique recensement exhaustif des sources intéressant le communisme français, il ambitionnera de proposer aux différents publics intéressés un instrument méthodique utile et d’utilisation facile. 

Le guide des sources

Contexte institutionnel

À la suite du classement des archives de la direction nationale du PCF comme archives historiques par le ministère de la Culture, le 28 mai 2003, et de leur dépôt aux Archives départementales de la Seine-Saint-Denis, une démarche coordonnée du PCF et de la Direction des Archives de France visait à faciliter l’extension de cette politique de sauvegarde et de dépôt aux archives historiques des fédérations départementales du PCF.

Une circulaire DPACI/RES/2005 du 1er juillet 2005, signée par Martine de Boisdeffre, directrice des Archives de France, relevait que « L’action engagée vise à assurer la préservation d’un patrimoine historique original relatif aux conditions spécifiques de l’implantation et de l’activité territoriale de l’une des principales organisations politiques françaises. Elle s’insère également dans la perspective d’un recensement hexagonal des ressources documentaires sur le communisme français. » Elle concluait en appelant les services départementaux à « réserver le meilleur accueil aux demandes qui pourraient [leur] être adressées par les secrétaires départementaux du Parti communiste français. » 

Contexte scientifique

Le 4 février 2020 se tenait aux Archives nationales, site de Pierrefitte-sur-Seine, une journée d’étude sur le thème « Le PCF à travers ses archives locales (1944-2000), initiée par les Archives départementales de la Seine-Saint-Denis et de la Vienne en partenariat avec les Archives nationales et un collectif d’historiens . Elle visait à dresser un état des sources et des inventaires disponibles afin de les faire connaître aux chercheurs pour favoriser une approche locale du communisme français au XXe siècle qui reste largement à développer. Le but : documenter des études territoriales et permettre de ré-envisager des questionnements scientifiques déjà balisés à l’échelle nationale et internationale.

Une enquête avait été préalablement menée auprès du réseau public d’archives pour identifier et localiser les fonds et matériaux documentaires déjà déposés ou donnés par des organisations du PCF.

Structure du guide

Ce guide, dont le contenu sera évolutif, constitue le prolongement de la journée d’étude. Il présente dans un premier temps les informations collectées auprès des services d’archives territoriaux (Archives départementales majoritairement, mais également Archives régionales ou communales), offrant ainsi pour la première fois au public un panorama d’ensemble des fonds de structures ou de militants communistes qui sont conservés dans ces établissements.

Contenu

Destiné à être facilement accessible, il se présente sous la forme d’un tableau recensant, département par département, chaque fonds d’archives identifié en indiquant :

  • L’institution dans laquelle il est conservé ;
  • La date de son dépôt ou don ;
  • La typologie : archives d’organisation (fédération départementale, section, cellule), fonds personnel de militant, collection (périodiques, affiches, tracts) ;
  • L’état actuel de classement ;
  • Un descriptif sommaire (cote, intitulé, dates extrêmes) ;
  • Les conditions d’accès ;
  • Le lien direct vers l’inventaires lorsqu’il existe.

Il sera doté dès que possible d’une cartographie interactive.

Périmètre

Le guide ne s’attache à cette étape qu’aux archives volontairement confiées à des services d’archives par des structures locales ou des militants. Il ne traite ni des documents saisis, ni des dossiers liés à des procédures judiciaires ou résultant de la surveillance policière qu’on peut trouver dans les séries d’archives publiques conservées par les services départementaux d’archives. Il est prévu que ce périmètre soit élargi ultérieurement.

Lacunes

Provisoires ou irrémédiables, elles sont tributaires de différents facteurs :

  • La bonne conservation matérielle par les organisations du PCF de leurs archives historiques (la période d’interdiction et de clandestinité des années 1939-1945 ou les années conflictuelles de la Guerre froide, par exemple, y ont été peu propices) ;
  • Le rythme des dépôts effectués dans les services publics d’archives (en 2021, un tiers seulement des fédérations communistes a effectué un dépôt) ;
  • L’état d’avancement du classement des fonds et de la production d’instruments de recherche par les services d’archives.

Hétérogénéité

Loin de l’uniformité attendue, les sources locales du PCF disponibles recouvrent selon les cas des typologies très diverses :

  • Dépôt « institutionnel » de la fédération départementale, d’une section, d’une cellule ;
  • Fonds personnels de responsable ou d’élu ;
  • Collection d’imprimés (périodique, matériel de propagande) ;
  • Archives d’une organisation périphérique du PCF. 
Lieux de conservation d'archives locales du PCF
Voir le guide des sources en ods
Voir le guide des sources en xlsx

Présentation des structures productrices d’archives

Les différents niveaux d’organisation territoriale du PCF, fixés statutairement, sont :

  • Dans l’entre-deux-guerres : suite à la réorganisation opérée lors des années dites de « bolchévisation » (1924-1925), les cellules d’entreprise et les rayons (« circonscriptions » géographiques) regroupés dans 27 régions. Un mouvement de décentralisation, entamé dans les années 1930 et amplifié durant la période du Front populaire, aboutit en 1938 à une redistribution en 70 régions coïncidant désormais à peu près avec le maillage administratif départemental, les sections supplantant finalement les rayons ;

  • Depuis 1945 : les cellules (locales ou d’entreprise), regroupées dans des sections (locales ou d’entreprise) elles-mêmes regroupées dans les fédérations départementales.

À intervalle plus ou moins régulier, mais systématiquement lors de la préparation du congrès national, ces structures territoriales se réunissent dans un mouvement ascendant en assemblées générales et en conférences pour se prononcer sur le document d’orientation soumis aux militants, pour désigner les délégués aux conférences puis au congrès national, pour renouveler leurs instances de direction : comité, bureau, secrétariat, secrétaire. Elles se dotent également de responsables et de collectifs chargés d’animer des fonctions spécifiques : organisation, trésorerie, propagande, formation des militants, diffusion de la presse communiste, intervention sur le lieu de travail, en direction des femmes, des jeunes, etc.

Sources complémentaires

Dans les archives de la direction nationale du PCF

Le mode de fonctionnement interne du PCF a conduit à la production centralisée de dossiers documentant certains aspects de l’activité de ses fédérations départementales. Ils figurent dans le fonds du PCF déposé aux Archives de la Seine-Saint-Denis :

Dans les archives de l’ex-Internationale communiste (ou Komintern)

Section française de l’Internationale communiste :  jusqu’à la dissolution de celle-ci en 1943, le PCF a adressé continûment à sa direction centrale des documents rendant compte de son activité : procès-verbaux de réunion, états des effectifs, presse, publications…, dont des documents concernant ses structures territoriales, en particulier ses « régions ». Ces archives sont toujours conservées en Russie, aujourd’hui aux Archives d’État russes d’histoire socio-politique (RGASPI).
Une copie microfilmée très partielle des documents figure dans les archives du PCF conservées aux Archives de la Seine-Saint-Denis et le portail PANDOR, réalisé par l’Université de Bourgogne, donne un accès direct en ligne à leur version numérisée.

Page réalisée en partenariat avec les Archives départementales de la Seine-Saint-Denis.

Liens