Article : Repas des humbles, repas des riches en haute Provence de la fin du XVIIIe siècle au milieu du XXe siècle

Une publication des Archives départementales des Alpes-de-Haute-Provence, 2016, 24 pages

Que mangeait-on autrefois ? Du côté des élites, la réponse s’avère simple. Les archives conservent des menus bien que les puissants aient envisagé le sujet de la nourriture comme trivial. Une table riche se caractérise par un régime gras abondant en matières premières. Mais du côté du peuple ?

Au XVIIIe siècle, aux temps ordinaires, chacun mangeait à sa faim mais souffrait d’un régime déséquilibré. Les hommes étaient donc petits ! Le pain y tenait une place prépondérante : travailler, « c’était gagner son pain ». Le régime était maigre. En haute Provence, les plats se réduisaient à des « soupes » ou des « bouillies ».

L’histoire de l’alimentation s’inscrit dans la longue durée. Chacun distingue déjà des mets nobles et des mets inférieurs. A la consommation des poissons les plus chers – le brochet ou la truite – s’oppose celle des viandes mineures – le bouc ou la chèvre. À partir du XVIe siècle, l’ail est dévalorisé au profit du persil – « l’épice française » – et le consommateur d’ail stigmatisé.

Le goût des hommes a évolué, celui des produits aussi. L’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècle) est marquée par le déclin des fèves au lard et des pois au profit du haricot d’Amérique, cent ans en avance sur la pomme de terre. En parallèle, la consommation de lard de porc augmente. Cette période est marquée par l’apparition de « générations tripières » dont le succès dure jusqu’au milieu du XIXe siècle : les tripes sont concurrencées par les fritures et la charcuterie. De leur côte, les élites se convertissent progressivement à la viande bovine.

On mange chez soi le repas préparé par les femmes. On mange aussi sur son lieu de travail ou, lors de déplacements, au bord d’un chemin ou à l’auberge. La consommation dépend aussi des temps gras – les temps de fêtes – et les temps maigres, liés aux prescriptions religieuses. Au fil du temps, le nanti bénéficie de deux puis trois repas ; le travailleur, dont la journée s’étire, mange certes jusqu’à cinq fois mais avec frugalité.

La distribution des produits alimentaires connaît une révolution vers 1870, lors du passage du vrac à la marque, avec la distribution dans des petits magasins de produits transformés, issus d’une production industrielle et ouverts à la publicité. Les biscuiteries, les huileries, les sucreries, l’industrie des boissons (en particuliers la brasserie), les conserveries, les confitureries, les fabricants de pâtes alimentaires… constituent désormais un secteur industriel. Après 1914, la consommation se diversifie et désormais s’installe pour des décennies dans un régime qui laisse de plus en plus de place à la viande.

Références complètes de l’ouvrage.

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