Archiviste, archéologue, historien de l'art et spécialiste du droit, Jean-Auguste Brutails est un de ces illustres érudits que seul le XIXe siècle pouvait voir naître. Cet aveyronnais de naissance, né le 20 décembre 1859 à Viviez, entre en 1880 à l'Ecole des Chartes. Il obtient le titre d'archiviste-paléographe en 1884, après avoir réalisé un Essai sur l'élection et l'organisation des corps municipaux dans le Sud-Ouest de la France, aux XIIIe et XIVe siècles. Durant sa formation il rencontre Jules Quicherat ou encore son professeur le comte Robert de Lasteyrie, avec qui il va se lier d'amitié. Brutails va orienter ses recherches et travaux vers sa période de prédilection, le Moyen Age. Devenu directeur des Archives départementales des Pyrénées-Orientales en 1884, Brutails découvre dans ce département un patrimoine archéologique extraordinaire. Lors de ses tournées d'inspection des archives communales, il croque et photographie les monuments. La nouveauté de la démarche de Jean-Auguste Brutails réside dans le fait qu'il est un des premiers érudits français à utiliser la photographie comme appui de son analyse archéologique. Ses qualités indéniables d'archiviste et de paléographe lui permettent de compléter son observation avertie par les sources archivistiques et les inscriptions. Durant son passage en Catalogne, il va notamment rencontrer Josep Puig y Cadafalch, architecte et archéologue catalan, avec qui il va garder de nombreux contacts. Au tournant du XXe siècle, les Catalans s'intéressent en effet de très près à leur patrimoine bâti médiéval. Cette démarche découle notamment d'une dynamique nationaliste très forte. Brutails participe ainsi à l'élaboration de l'archéologie monumentale. Arrivé en 1889 à la direction des Archives départementales de la Gironde, Brutails gardera durant toute sa période «girondine» d'étroites relations avec le monde catalan et plus largement hispanique. Outre son travail remarquable et réformateur à la tête des Archives départementales de Bordeaux, Jean-Auguste Brutails commence rapidement après son arrivée ses recherches sur le patrimoine religieux girondin compilé en 1912 dans sa thèse Les vieilles églises de la Gironde. Plus qu'un simple travail d'inventaire archéologique, Brutails, dans cet ouvrage, met en application sa méthode novatrice d'archéologie monumentale. Cette thèse, pour laquelle il annonce dans la préface avoir passé vingt-trois ans de sa vie, est bien plus qu'un travail d'érudition locale. Brutails avait déjà publié en 1900 L'archéologie du Moyen Âge et ses méthodes puis le Précis d'archéologie du Moyen Age (1908). Ces deux ouvrages resteront pendant près de 80 ans la référence en matière de méthode universitaire sur l'archéologie monumentale. Girondin d'adoption, Brutails a fait énormément pour la connaissance et la préservation du patrimoine local, notamment en participant à la création en 1908 de la Revue historique de Bordeaux. De part sa fonction de correspondant de l'Institut de France à partir de 1902 et de membre de l'Académie des Sciences et Belles-Lettres en 1919, et par ses rapports étroits avec les érudits catalans, les travaux de Brutails sont nationalement et internationalement reconnus par ses pairs. Les 47 carnets de croquis conservés aux Archives départementales de la Gironde retracent les études de Brutails durant quarante années (de 1884 à 1924). Brutails se déplaçait toujours avec un carnet et il précise qu'il n'hésitait pas à croquer depuis le wagon de son train ou par tempête. Le contenu est purement personnel et ne concerne que les études archéologiques (sauf quelques rares exceptions). Les carnets contiennent croquis, analyses sous forme de notes, ou encore des transcriptions d'inscriptions. Brutails reprend régulièrement ses études, parfois plusieurs années après. Il les corrige, il les complète d'une nouvelle information... Les études sont réalisées lors de ses déplacements d'inspection des archives communales dans les Pyrénées-Orientales, en Gironde ; mais aussi lors de voyages en Andorre, en Espagne, en France, en Italie et même dans les Balkans. Il est à remarquer la très grande homogénéité dans la qualité de ces études. L'écrasante majorité des analyses présentes dans ces carnets, dont certaines sont plus que centenaires, sont encore aujourd'hui acceptées. On remarque notamment la masse considérable de travaux correspondant à l'étude du patrimoine girondin. Ce travail lui a d'ailleurs servi à réaliser sa thèse, soutenue en 1912 à l'Université de Lettres de Bordeaux où il enseignait. A partir du contenu de ces carnets, on se rend rapidement compte que Jean-Auguste Brutails a passé bien plus de vingt-trois ans à l'étude des églises médiévales girondines. Travailleur infatigable et passionné, il décède dans la nuit du 1 au 2 janvier 1926, le lendemain de sa mise en retraite.

Information sur la description archivistique des carnets de croquis On trouvera entre " " les transcriptions textuelles des notes de Brutails, entre [ ]des iIndications complémentaires aux notes de Brutails à l'intérieur d'une citation et […] un mot n'ayant pas été transcris (illisible, manquant) Exemple : "rapprocher des arbres des sarcophages du Sud-Ouest. Noter l'[…]". (90 J 23 : 7, paginée 4) Les descriptions en italique sont des citations de Brutails ou des retranscriptions de Brutails.