Inventaire d'archives : Fonds Philippe Pétain (1913-1973)

Contenu :

Ce fonds d'archives rassemble des documents extrêmement variés. Leur volume est relativement limité (1). La qualité de ces papiers tient essentiellement aux très nombreuses correspondances adressées à Philippe Pétain. Il s'agit d'abord des lettres adressées, avant et après leur mariage, entre 1913 et 1949, par le général, puis maréchal Pétain à Eugénie dite Annie Hardon, en premières noces M François de Hérain : cet ensemble a été étudié principalement par Henri Amouroux. Il s'agit ensuite et surtout des très nombreuses correspondances adressées au général, puis maréchal Pétain entre 1916 et 1918. Les lettres ici rassemblées sont écrites par des personnalités civiles et surtout militaires, mais aussi par des personnes « ordinaires », du front ou de l'arrière, sans compter un nombre impressionnant de femmes. Le Service historique de la Défense conserve des sources épistolaires directement complémentaires, un peu plus étalées dans le temps puisque couvrant les années 1914 à 1921 (2).me
Ces papiers, tous librement consultables et reproductibles, devraient permettre aux chercheurs d'approfondir la connaissance de la personnalité du maréchal Pétain, d'étudier celle de son entourage personnel et professionnel, enfin d'approcher les mentalités des Français durant les trois dernières années de la Grande Guerre.
Pour l'entre-deux-guerres, deux documents sont particulièrement intéressants. Les deux carnets ouverts par le maréchal Pétain en juillet 1925, alors qu'il est envoyé au Maroc, dans le Rif, pour opérer une liaison entre Lyautey, résident général, et le gouvernement Paul Painlevé, témoignent des découvertes sur le terrain que fait le maréchal Pétain en Afrique Occidentale française. Le tract intitulé « Une protestation morale » et rédigé à la suite de la nuit de Cristal des 9 et 10 novembre 1938 mériterait une étude critique approfondie : il s'élève contre « les persécutions religieuses ou racistes d'Allemagne [qui] soulèvent dans le monde civilisé une émotion croissante… Allons-nous retourner aux heures les plus sombres de la barbarie ? ». Ce texte surprenant est annoté de la main même de Pétain.
La période de l'Etat français est représentée par un ensemble de documents très composites produits ou reçus par le cabinet civil du maréchal Pétain. Suit un lot de papiers couvrant la période allant de Sigmaringen au début du procès du maréchal Pétain.
Enfin, pour les années 1945 à 1951 qui sont celles de la détention du maréchal Pétain à l'Ile-d'Yeu, quelques documents très épars, lettres, notes et photographies, peuvent sans doute donner des éclairages particuliers.
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1. Soit 2,5 mètres linéaires de documents.
2. Fonds 1K/967 présenté par Violaine Challéat et Emmanuel Pénicaut. Voir ci-dessous la bibliographie sommaire.

Cote :

415AP/3-415AP/17

Publication :

Archives nationales (France)
1981-2024
Pierrefitte-sur-Seine

Informations sur le producteur :

Pétain, Philippe (1856-1951)
Philippe Pétain est né le 24 avril 1856 à Cauchy-la-Tour (Pas-de-Calais). Orphelin de mère à l'âge d'un an, il est élevé par sa grand-mère paternelle, puis, à partir de 1867, est interne au collège religieux Saint-Bertin à Saint-Omer. En 1876, il entre à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr. Sous-lieutenant d'infanterie en 1878, capitaine au 8e bataillon de chasseurs à Amiens en 1890, lieutenant-colonel au 118e régiment d'infanterie de Quimper en 1907, il est promu colonel en 1910. En août 1914, à la veille de la retraite, Philippe Pétain est maintenu en activité comme commandant de la 4e brigade d'infanterie. Distingué à la bataille de Dinan en Belgique, il est nommé général de brigade le 28 août 1914 et participe à la bataille de la Marne (septembre 1914). Il est promu général de division le 14 septembre 1914. Le 21 juin 1915, il commande la 2e armée dans les offensives de Champagne et d'Artois. Le 21 février 1916, il est chargé de la direction du secteur de Verdun, puis, le 25 février, est nommé commandant des armées de Verdun. Après l'échec du chemin des Dames, il remplace Nivelle comme commandant en chef des armées (15 mai 1917), poste qu'il conserve jusqu'à la fin de la guerre, même lorsqu'il est soumis à Foch, commandant interallié. Le 24 août 1917, Philippe Pétain est promu Grand-Croix de la Légion d'honneur. Le 19 novembre 1918, il est fait maréchal de France. En janvier 1920, il est nommé vice-président du conseil supérieur de la guerre, puis, en février 1922, inspecteur général des armées. C'est à ce dernier titre qu'en juillet 1925 il est envoyé au Maroc, dans le Rif, pour opérer une liaison entre Lyautey, résident général, et le gouvernement Paul Painlevé. Atteint par la limite d'âge en 1931, il est remplacé par le général Weygand à la vice-présidence du conseil supérieur de la guerre. Après les événements du 6 février 1934, il est appelé par Gaston Doumergue pour entrer dans un gouvernement d'union nationale en tant que ministre de la Guerre et le restera jusqu'au 15 juillet 1935. Ambassadeur en Espagne en mars 1939, il est rappelé par Paul Reynaud pour être vice-président du Conseil (mai 1940). Devenu président du Conseil à Bordeaux dans la nuit du 16 au 17 juin 1940, il demande l'armistice. Le 1er juillet, il installe le gouvernement à Vichy ; le 10 juillet, les Assemblées lui remettent tous les pouvoirs et, le lendemain, un acte constitutionnel fait de lui le chef de l'État français. Il exerçe également la présidence du Conseil, jusqu'au moment où les Allemands exigent qu'il y nomme Pierre Laval. Il engage avec l'Allemagne une politique de collaboration active (entrevue avec Hitler à Montoire le 24 octobre 1940). En novembre 1942, lors du débarquement allié en Afrique du Nord, il refuse de quitter la France où l'invasion de la zone libre par les Allemands ne lui laisse que l'ombre du pouvoir. Il accepte les lois raciales, la création de la Milice, les exécutions d'otages et les déportations de Juifs. Le 20 août 1944, il est enlevé par les Allemands et emmené à Belfort puis à Sigmaringen, où il refuse de cautionner un simulacre de gouvernement français. Il réussit à gagner la Suisse et se présente en France pour être jugé (25 avril 1945). Maître Isorni est chargé de sa défense. La Haute Cour le condamne à mort (août 1945), mais cette peine est commuée en détention perpétuelle au fort du Portalet (vallée d'Aspe), puis à l'Ile-d'Yeu (Vendée) où il meurt, en le 23 juillet 1951, à l'âge de 95 ans.

Informations sur l'acquisition :

Prêt pour microfilmage (415AP/1-2 (523 Mi/1-3)), 1981. Achats et dons (415AP/3-415AP/17), 1967-2023.
Les modalités d'entrées du fonds 415 AP sont extrêmement diverses : à douze reprises, de 1967 à 2023, des papiers relatifs au maréchal Pétain sont entrés à la section des archives privées des Archives nationales, sous forme d'achats, de dépôt, ou de dons. Le premier achat remonte à juin 1967 ; les suivants s'échelonnent entre août 1984 et avril 2007. En août 1984, Maître Jacques Isorni dépose aux Archives nationales un ensemble de documents comprenant des lettres adressées au général, puis maréchal Pétain par diverses personnalités et datées de 1916 à 1918, ainsi que des lettres familiales et personnelles, notamment la correspondance adressée par Philippe Pétain à Eugénie, dite Annie Hardon, qu'il épousera en 1920. Ce dépôt, transformé en achat en septembre 1984, représente les trois-quarts du fonds 415 AP ici décrit et inventorié (1). En mars 1988, un ensemble de documents provenant de Joseph Simon, l'ancien directeur de la prison de l'Ile-d'Yeu est donné aux Archives nationales : ces papiers ayant fait l'objet d'un microfilmage sont désormais consultables sous forme de microfilm, sous la cote 514 Mi ; il s'agit d'un ensemble composite couvrant la période où le maréchal Pétain était à Sigmaringen, celle de son procès, enfin celle de sa détention (2). En mai 2005, un envoi postal anonyme parvient au directeur des Archives nationales : il contient des documents et photographies disparates datant de 1915 à 1920 (3). En décembre 2011, Mme Jacqueline de Chollet remet en don aux Archives nationales des documents qu'elle détenait de son père : une lettre de Pétain écrite lors de son procès, le 25 mai 1945 (4), avec des notes de Louis de Chollet (1945), un dossier sur la publication de cette lettre en 1971 par le colonel Remy et diverses coupures de presse (5). Enfin, en 2023, une lettre de félicitations adressée par Philippe Pétain à un enfant en 1942 vient compléter le fonds (6).
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1. Cette correspondance comprend deux ensembles. Le premier rassemble les lettres de Philippe Pétain à Eugénie dite Annie Hardon, avant et après leur mariage : cette correspondance est microfilmée sous la cote 523 Mi 1 à 3. Les lettres originales ne sont pas conservées par les Archives nationales. Le second ensemble, qui comprend les lettres de personnalités civiles et surtout militaires, ainsi que quelques correspondances familiales, est coté 415 AP 5 (dossiers 3 à 5) et 415 AP 6 à 15.
2. Cet ensemble composite, dont les originaux sont cotés 415 AP 3 (dossier 2), est consultable sous forme de microfilm coté 514 Mi.
3. 415AP/16.
4. 415AP/3, dossier 2.
5. 415AP/3, dossier 3.
6. 415AP/17.

Description :

Mise en forme :
Les papiers rassemblés aujourd'hui dans le fonds 415 AP sont donc entrés à partir de 1967 aux Archives nationales. Ils ont été communiqués aux chercheurs qui le souhaitaient au fur et à mesure de leur arrivée, sans attendre le traitement qui vient d'être achevé. Ce traitement concerne principalement les correspondances adressées au général, puis maréchal Pétain. Les lettres ont été identifiées pièce à pièce à partir des listes constituées par le secrétariat de Maître Isorni. Un tel travail d'identification est difficile, parfois aléatoire : pour en permettre l'achèvement, les « listes d'Isorni » ont été très utiles et ont servi de référence en cas de doute. C'est la raison pour laquelle elles ont été intégrées dans le fonds d'archives (415AP/5, dossier 3).
Au total le contenu composite du fonds n'a pas permis un classement parfaitement méthodique. La lecture de l'inventaire demande aux chercheurs un certain nombre d'allers et de retours avant d'en saisir la totalité et l'intérêt.

Conditions d'accès :

Communication libre, selon les modalités en vigueur aux Archives nationales.

Conditions d'utilisation :

Reproduction autorisée, selon les modalités en vigueur aux Archives nationales.

Description physique :

Importance matérielle :
3 bobines de microfilm (415AP/1-415AP/2 : 523MI/1-523MI/3) et 14 cartons (415AP/3-415AP/17) ; 1,5 mètre linéaire.

Ressources complémentaires :

La liste qui suit n'est évidemment pas exhaustive, mais elle fournit des indications sur les pistes les plus intéressantes repérées dans les archives françaises.
1) aux Archives nationales - Pierrefitte-sur-Seine
Série 2 AG : papiers versés par la Haute Cour de Justice, issus des deux saisies pratiquées en 1945 au domicile parisien du maréchal Pétain et à l'hôtel du Parc à Vichy.
Série 3 W : Haute Cour de Justice, et précisément 3 W 277 à 309, procès du maréchal Pétain.
334 AP 32 et 33 : sténotypie du procès du maréchal Pétain par le cabinet Bluet.
474 AP 1 et 2, et supplément : fonds Du Moulin de Labarthète.
AB XIX 5336 à 5341 : albums photographiques sur le maréchal Pétain (conservés à la Section des Cartes et Plans).
AB XIX 5353 : témoignage de la marquise de Keroüaertz, née d'Andigné, sur le ménage du maréchal Pétain avec Eugénie Hardon et sur leur mariage religieux en 1941.
Voir aussi des bribes de correspondances relatives au maréchal Pétain dans les séries AP et AB XIX.
2) au Service historique de la Défense - Vincennes
Fonds 1 K 188 : papiers divers du maréchal Pétain, 1919-1941.
Fonds 1 K 967 /1 à 22 : fonds Pétain composé essentiellement de correspondance adressée au colonel, puis général et maréchal Pétain, 1914-1921.
3) au Service des archives du Conseil de l'ordre des avocats de Paris - Paris
Fonds de Maître Isorni, avocat du maréchal Pétain.

Références bibliographiques :

Amouroux (Henri), , Paris, Fayard, 1967.Pétain avant Vichy : la guerre et l'amour
Antonowicz (Gilles), , Paris, France-Empire, 2007.Jacques Isorni, l'avocat de tous les combats
Atkin (Nicholas), , Londres, Addison Wesley, 1998.Pétain
Challéat (Violaine) et Pénicaut (Emmanuel), « , numéro 90, avril-juin 2006, p. 187-196.Pétain en taille-douce, portrait d'un homme par ses correspondants (1914-1921)», Vingtième siècle, Revue d'histoire
Cointet (Jean-Paul), , Paris, Perrin, 2003.Sigmaringen
Ferro (Marc), , Paris, Fayard, 1987.Pétain
Girard (Louis-Dominique), , Paris, publié à titre d'auteur, 1971.Mazinghem ou la vie secrète de Philippe Pétain
Lottman (Herbert), , Paris, Seuil, 1984.Pétain
Suarez (Georges), , Paris, Plon, 1999.Le Maréchal Pétain

Localisation physique :

Pierrefitte-sur-Seine

Organisme responsable de l'accès intellectuel :

Archives nationales de France

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAN_IR_004950

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