Page d'histoire : Paul Féval Rennes (Ille-et-Vilaine), 29 septembre 1816* – Paris, 8 mars 1887

Jean Piat et Michèle Grellier dans une scène du tournage du feuilleton Lagardère adapté du roman Le Bossu par Jean-Pierre Decourt (reportage du 1er mai 1966).

Paul Féval partage le destin de bien des romanciers populaires : son nom s’efface des mémoires et il reste de lui et de son oeuvre touffue essentiellement une phrase, « si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira à toi ! », la réplique la plus célèbre de son roman le plus lu, Le Bossu, paru en 1857. Né en 1816 à Rennes dans une famille bretonne catholique et royaliste, Féval fait d’abord des études de droit avant de monter à Paris vers la fin des années 1830 Il commence à publier des feuilletons dans la presse légitimiste dès 1841. Son premier grand succès sera Les Mystères de Londres (1843), roman écrit à la suite de l’énorme popularité des Mystères de Paris d’Eugène Sue, qui va le propulser aux sommets de la célébrité littéraire de la monarchie de Juillet, l’âge d’or du feuilleton. Il sera considéré comme l’héritier de la grande tradition du roman d’aventures, en particulier celui d’Alexandre Dumas. Son ambition profonde, qui lui échappera cependant toujours, est d’obtenir la reconnaissance littéraire. Doué d’une facilité d’écriture proprement extraordinaire, Féval produit des romans à un rythme effréné. Le succès du Bossu cimente sa renommée de maître du roman de cape et d’épée, mais ses œuvres ne se limitent pas à ce seul genre. Aux feuilletons viennent s’ajouter des romans intimistes ou d’observation, de mœurs parisiennes, ou encore des romans régionalistes. Dans le cadre de la littérature de masse naissante, il fournit, en plus de romans historiques, des histoires d’aventures exotiques, des romans fantastiques, et s’essaie également à l’espionnage. Mécontent à l’idée de se retrouver étiqueté « écrivain populaire », Féval s’efforce de promouvoir une nouvelle esthétique feuilletonesque et de donner une valeur littéraire authentique à ses textes. Si son rythme d’écriture est ahurissant, son style n’en souffrira guère. Quoique par moments ampoulé ou grandiloquent, il demeure très correct, souvent évocateur, parfois même recherché. Son roman le plus ambitieux, le cycle des Habits noirs, paru entre 1863 et 1875, est une véritable épopée sociale imbue des valeurs spirituelles de son auteur, qui retourne à la pratique catholique en 1876 et consacre ses dernières années, avant sa mort survenue en 1887, à expurger son œuvre pour la moraliser. Ce Breton bretonnant aura laissé à la postérité plus de soixante-dix romans, environ soixante-dix nouvelles et une trentaine de pièces de théâtre, sans parler des articles et des brochures produits après sa conversion. De plus, Féval a joué un rôle important depuis 1848 au sein de la Société des gens de lettres, où il a travaillé inlassablement à la défense et à la reconnaissance du roman et du métier d’écrivain.

Vittorio Frigerio
Dalhousie University (Canada)

* Jusqu'à une époque très récente, comme en témoigne la majorité des dictionnaires, on faisait naître Fréval en 1817. Or il est né indiscutablement en 1816. Souhaitant ne pas omettre cependant son bicentenaire, nous lui avons réservé une place dans ce volume.

Source: Commemorations Collection 2017

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