Page d'histoire : Charles Koechlin Paris, 27 novembre 1867 – Canadel (Var), 31 décembre 1950

Né dans une famille d’industriels d’origine alsacienne, Koechlin connaît une carrière de compositeur, de pédagogue et de théoricien de la musique d’une grande vitalité dont la portée culturelle ne cesse de se révéler à mesure que l’on redécouvre ses oeuvres musicales et ses écrits. Bien que musicien passionné, Kœchlin se destine à une carrière d’ingénieur voire d’astronome. Élève à l’école Monge puis à Polytechnique à partir de 1887, mais atteint de tuberculose, il interrompt ses études et part à Alger afin de recouvrer la santé. C’est le moment où son destin bascule. Tout en finissant Polytechnique, il entame des études musicales approfondies dans les classes de Massenet et de Fauré au Conservatoire. Il y fait des rencontres déterminantes. C’est ainsi qu’avec Maurice Ravel il fonde la Société musicale indépendante qui devient le bastion de la modernité musicale française entre 1910 et 1914.

Le catalogue du compositeur est constitué de deux cent vingt-six numéros d’opus parmi lesquels on trouve des mélodies, de la musique de piano, des partitions de musique de chambre pour les formations les plus variées, des œuvres symphoniques et chorales.

L’activité créatrice de Kœchlin s’accompagne d’une intense réflexion théorique. Bien qu’il ait été un théoricien et un pédagogue reconnu, on s’étonne toujours qu’il n’ait pas été nommé professeur au Conservatoire national supérieur de Paris. Ses idées politiques et sa musique, dont l’indépendance stylistique est marquante, ont probablement fait qu’il n’a jamais été pris en considération. Quoi qu’il en soit, il est l’auteur d’ouvrages toujours d’actualité. On peut citer le monumental Traité de l’orchestration (1941), d’une érudition peu commune. Cette connaissance des instruments lui permettra de composer des œuvres monodiques d’une exceptionnelle ampleur comme Les Chants de Nectaire op. 198, 199 et 200 (1944), constitués de quatre- vingt-seize pièces pour flûte.

Parallèlement, Kœchlin publie des articles sur des questions d’esthétique, de langage musical et de critique musicale. Sa vaste culture le mène à réfléchir aussi à des questions sociologiques telles que l’éducation musicale, le rôle de la radio, la musique au cinéma et l’engagement politique des artistes. Il puise dans sa connaissance de la Grèce antique pour réfléchir à la démocratie dans le monde moderne. Inspiré par ses contemporains, il discute les idées de Romain Rolland tout comme celles de Tolstoï, Bergson ou Duhamel. Proche du parti communiste, il participe activement en tant qu’artiste à des initiatives culturelles structurantes. En 1937, il est nommé président de la Fédération musicale populaire. Homme d’exception, artiste d’une grande originalité et engagé, on peut le considérer comme un véritable humaniste des temps modernes.

Michel Duchesneau

professeur titulaire faculté de musique

université de Montréal

 

Source: Commemorations Collection 2017

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