Page d'histoire : Marie-Madeleine Fourcade Marseille, 8 novembre 1909 - Paris, 2 juillet 1989

L’amour de la liberté et de la patrie, le goût de l’aventure et de l’action efficace animent la vie de la seule femme chef d’un grand réseau de Résistance en Europe.

Cette jeune et belle publiciste refuse de se résigner à la défaite de 1940. Dès novembre 1940, elle fonde à Vichy avec le commandant Loustaunau-Lacau un réseau clandestin de renseignements militaires sous couvert du Centre d’entraide de la Légion française des Combattants. Initialement implanté à Marseille, sa ville natale, et à Pau, il s’étend peu à peu à toute la France. Il prend le nom d’Alliance en se rattachant directement à l’Intelligence Service et aide les anciens alliés de la France dans la bataille de l’Atlantique. Ses nombreux postes émetteurs envoient des renseignements sur les départs des sous-marins allemands qui, de Lorient, partent en chasse contre les convois britanniques. Courriers et agents transitent les nuits de lune par avions Lysander.

Après l’arrestation du commandant Loustaunau-Lacau, Marie-Madeleine Méric dirige seule un réseau étendu à toute la France. Riche de 1 500 agents, principalement issus de la fonction publique, de l’armée et des professions indépendantes, composé de 25 % de femmes, Alliance est d’une redoutable efficacité. Les Allemands l’ont baptisé « Arche de Noé » en raison des pseudonymes d’animaux que Marie-Madeleine, « Hérisson », a donnés à ses membres. De lui viennent des renseignements sur les transports allemands de troupes, les défenses de la côte ouest et les premières informations sur les VI et V2. En novembre 1942, Marie-Madeleine assure l’évasion de France du général Henri Giraud qui rejoint par sous-marin l’Algérie où il cofondera avec le général de Gaulle le Comité Français de Libération Nationale.

En dépit des trahisons et d’une répression devenue impitoyable après l’occupation de la zone sud, Marie-Madeleine reconstruit sans cesse le réseau et réussit à le décentraliser en s’associant avec « les Druides », mouvement clandestin au sein des Compagnons de France. La longévité de son commandement – trente et un mois – est exceptionnelle dans la résistance active. Elle la doit à sa mobilité permanente, à son cran, à une culture de la clandestinité née avant la guerre et au refus de toute politisation. Après l’arrestation de son adjoint le colonel Faye, en septembre 1943, les Britanniques pour protéger sa vie la retiennent à Londres où elle était venue en mission. Elle n’obtient l’autorisation de regagner la France qu’en juillet 1944 où elle se livre à des missions de renseignements en avant de l’armée Patton.

La victoire n’interrompt pas ses engagements désormais au service des familles des membres d’un réseau très éprouvé avec 438 morts et disparus. 106 d’entre eux ont été massacrés au Struthof à la veille de sa libération. Elle organise le rapatriement des corps des victimes, les commémorations, les secours matériels et moraux. Elle assume le secrétariat général puis la présidence du Comité d’Action de la Résistance. Devenue gaulliste fervente, elle contribue avec son second mari, Hubert Fourcade, au retour du général de Gaulle au pouvoir en mai 1958. Élue au Parlement européen, elle s’intéressait à la résistance afghane quand la mort la saisit en 1989. Les honneurs militaires lui furent rendus aux Invalides.

Michèle Cointet
professeur émérite à l’université de Tours

Source: Commemorations Collection 2009

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