Page d'histoire : Albert-Marie-Henri Lagrange (en religion Marie-Joseph) Bourg-en-Bresse, 7 mars 1855 - Saint-Maximin, 10 mars 1938

Marie-Joseph Lagrange
École biblique et archéologique française de Jérusalem

Après des études de droit, Albert Lagrange entra en 1878 au séminaire d’Issy puis chez les dominicains à Saint-Maximin ; il prit le nom de frère Marie-Joseph. Ordonné prêtre en 1883, il fut chargé d’enseigner la philosophie et l’Écriture sainte à Toulouse. En 1888, il fut détaché à Vienne (Autriche) pour y étudier les langues orientales puis en février 1890 envoyé à Jérusalem, à la mission de Saint-Étienne, afin de fonder une école d’Écriture sainte.

Le projet était « d’éclairer l’étude de la Bible par une connaissance scientifique du milieu humain où elle a été vécue, parlée, écrite. S’il y a une histoire du salut, il y a aussi une géographie du salut. La Bible a en Palestine un Sitz im Leben qui éclaire singulièrement son message. Dieu a parlé aux hommes d’un certain pays, avec les langues de leur temps, selon la culture de leur temps ».

C’est à Jérusalem que se déroula principalement la carrière scientifique, vouée à l’enseignement et à la recherche, du P. Lagrange. Il créa d’abord l’École pratique d’études bibliques au couvent de Saint-Étienne puis fonda en 1892 la Revue biblique et, en 1900, la collection des Études bibliques.

Cependant les progrès des études du texte saint soulevaient les passions dans certains milieux catholiques. En 1897, la communication qu’il fit à Fribourg à un Congrès international sur les sources du Pentateuque suscita des polémiques. Léon XIII lui accorda toujours sa confiance mais le pontificat de Pie X apporta un changement brutal et le P. Lagrange décida de renoncer à ses travaux sur l’Ancien Testament et de se borner à l’étude des Évangiles. En 1912, le père jésuite Louis Fonck, un de ses principaux détracteurs, établit à Jérusalem une succursale de l’Institut biblique de Rome. Le P. Lagrange regagna alors la France, où il avait été nommé en 1903 membre correspondant de l’Académie des inscriptions et belles-lettres et avait reçu en 1906 le prix Saintour pour ses Études sur les religions sémitiques.

Au lendemain de la Grande Guerre, les liens se resserrèrent entre l’Académie et l’École qui devint à la fois soumise à la juridiction des Frères -prêcheurs et reconnue par le gouvernement français ; celui-ci confia à l’Académie le contrôle de son organisation scientifique. En 1920, elle devint l’École biblique et archéologique française.

Le R.P. Lagrange revint alors à Jérusalem. Les séquelles de la crise moderniste demeuraient virulentes, mais Pie XI considérait avec bienveillance l’œuvre du couvent de Saint-Étienne. En 1983, Jean-Paul II habilitera l’École dominicaine de Jérusalem à décerner le doctorat ès sciences bibliques.

Le R.P. Lagrange, lui, avait quitté Jérusalem en 1935, à l’âge de 80 ans. Il s’éteignit à Saint-Maximin trois ans plus tard. Sa dépouille fut transférée dans la basilique Saint-Étienne de Jérusalem en 1967.

Son grand défi intellectuel fut de confronter Bible et histoire. Comme l’a fort justement dit le R.P. Vesco, directeur de l’École biblique et archéologique française : « Par le travail et la prière, à la lumière de la foi et avec une grande rigueur scientifique, le P. Lagrange a mis son intelligence au service de la parole de Dieu et de la Vérité

Jean Leclant
secrétaire perpétuel de l’Académie des inscriptions et belles-lettres
président du Haut comité des célébrations nationales

Source: Commemorations Collection 2005

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