Page d'histoire : Alain Mimoun médaille d'or du marathon Melbourne, Jeux Olympiques, 1er décembre 1956

Il y a vingt-huit ans Boughera el-Ouafi s’est imposé à Amsterdam et cinquante-six que Michel Théato l’a emporté à Paris. Est-ce suffisant en ce 1er décembre 1956 pour espérer, à Melbourne, une troisième victoire tricolore dans le marathon olympique ? Un homme, en tout cas, n’en doute pas : Alain Mimoun, qui a déjà gagné trois médailles d’argent aux Jeux de Londres et d’Helsinki sur 5 000 m et 10 000 m.

À 35 ans, on le croit trop vieux pour réaliser son rêve : remporter une médaille d’or. Son corps, ses muscles crient grâce et aspirent au repos. Pourtant Mimoun fonce tête baissée vers son destin sans avoir fait le moindre essai sur 42,195 km. La veille de l’épreuve, un télégramme lui a annoncé la naissance d’une fille nommée Olympe. Un signe pour le caporal-chef Mimoun qui a failli perdre une jambe sur les hauteurs du monte Cassino, en Italie, en 1944.

La température est caniculaire, la course s’annonce terrible. Contrôlant ses adversaires, Mimoun le novice ne laisse partir personne, même pas John Kelley qui mène l’épreuve au vingtième kilomètre en 1h 8’ 3’’. Mais l’Américain, un peu présomptueux, ne peut tenir la cadence et Alain Mimoun se retrouve seul en tête un peu avant la mi-course. La cadence et les sensations sont bonnes et, comme le parcours consiste en un aller-retour, le Français trouve même la force de faire, histoire de les impressionner, un petit signe amical aux adversaires qu’il croise. Tout se passe bien jusqu’au 32e kilomètre où soudain la foulée devient moins aérienne, plus saccadée. C’est comme si Mimoun poussait un mur invisible.

La bouche sèche, la respiration haletante, la tête douloureuse le Français lutte de tout son courage. Il s’insulte même, pense à sa femme et à sa fille, et petit à petit l’aisance revient. Alain repart de plus belle. Sans faiblir, il entre dans le stade olympique, provoquant une véritable explosion des 120 000 spectateurs qui se mettent à hurler. Un dernier tour express, il coupe enfin le fil. Mimoun est champion olympique. Il réalise son rêve.

 

Alain Lunzenfichter
rédacteur en chef adjoint du journal L’Équipe

Source: Commemorations Collection 2006

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