Page d'histoire : Fondation du Havre 1517

Vue du Havre de Grâce, gravure de Hieronymus Cock, vers 1563, dans Le Havre d’AutrefoisReproductions d’Anciens Tableaux, Dessins, Gravures et Antiquités se rattachant à l’histoire de cette ville, Le Havre, Imprimerie du Commerce, 1883, Le Havre, archives municipales.

Le 7 février 1517, François Ier donne ordre à l’amiral de France Bonnivet d’aménager un port fortifié au lieu de Grâce, en Normandie. Les travaux s’engagent aussitôt pour percer le cordon littoral de galets qui sépare les criques de la mer et bâtir une grosse tour commandant l’entrée du port. Le 8 octobre, alors que le chantier avance promptement, le roi, après avoir confirmé son intention de construire aussi une ville, entreprend de la peupler en accordant pour dix ans exemption de taille et de gabelle à tous ses habitants. Ces deux décisions sont les actes fondateurs du Havre. Au temps des Grandes découvertes, le roi de France ouvre une porte sur l’Océan et montre aux Espagnols et aux Portugais qu’il n’entend pas leur laisser le monopole du Nouveau Monde. Au temps des « bonnes villes » du royaume, François Ier répond aux attentes des marchands de Rouen, qui réclament un nouvel avant-port, et crée une ville nouvelle. Il lui donne la salamandre royale pour armoiries et le nom de ville Françoise. Le jeu de mots est transparent : Le Havre est la ville créée par François Ier dans un geste souverain, mais elle est aussi une place forte édifiée pour marquer la frontière nationale et empêcher le retour des Anglais. En août 1520, le roi visite pour la première fois Le Havre. S’il trouve le chantier du port bien avancé, il est déçu par celui de la ville. Aussi renouvelle-t-il les privilèges urbains, cette fois sans limite de durée. En 1525, la ville naissante est confrontée à une double épreuve. Elle est d’abord submergée par la « male-marée » qui tue une centaine d’ouvriers et rappelle le caractère inhospitalier des lieux. La défaite et la capture du roi de France à Pavie la privent ensuite de son principal soutien et des moyens qui auraient hâté son développement. Il faudra attendre quinze ans pour que le roi donne un coup d’accélérateur. En 1541, il détache Le Havre de toute emprise seigneuriale et la rattache au domaine royal. Puis il confie à l’architecte italien Bellarmato l’édification de deux quartiers et l’achèvement de l’enceinte bastionnée. Au milieu du XVIe siècle, la ville compte 6 000 âmes. En 1562, le parti protestant s’en empare et la livre aux Anglais. Le traumatisme est puissant : la raison d’être du Havre est remise en cause. L’armée du jeune Charles IX parvient difficilement à la reprendre. Après avoir hésité à la démanteler, le gouvernement royal décide de poursuivre l’entreprise mais sur de nouvelles bases. Pour faire pardonner sa trahison et protester de sa fidélité, la ville n’aura de cesse de construire son unité en affirmant avec force son identité catholique. Le renoncement progressif à faire du Havre un grand port militaire laisse libre cours au commerce. La ville connaît une croissance spectaculaire aux XIXe et XXe siècles et se relève des bombardements de septembre 1944. La reconstruction, dirigée par Auguste Perret, est une oeuvre classée au Patrimoine mondial par l’Unesco et le port créé par François Ier est devenu le premier port pour le commerce extérieur de la France.

Jean-Baptiste Gastinne
docteur en histoire de l’université Paris-IV-Sorbonne, vice-président de l’agglomération du Havre, vice-président de la région Normandie

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Source: Commemorations Collection 2017

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