Article : La réutilisation des archives publiques

La réutilisation se définit comme l’utilisation par un tiers de documents ou de données à d’autres fins que celles de la mission de service public pour laquelle ils ont été produits ou reçus.

Elle se distingue donc de la mise en ligne des documents par les services d’archives qui les conservent.

Le cadre juridique de la réutilisation

Les origines du droit de la réutilisation remontent à la directive 2003/98/CE du 17 novembre 2003.

Il a été profondément modifié au tournant des années 2015-2016 par deux textes :

Un  billet sur le carnet de recherche « Droit(s) des archives » avait été publié à l’occasion de l’entrée en vigueur du nouveau cadre juridique.

Le droit de la réutilisation est aujourd’hui codifié au titre II du livre III du code des relations entre le public et l’administration.

La libre réutilisation des informations publiques

La réutilisation des informations publiques est libre, quelle que soit la finalité poursuivie. Cela signifie, en pratique, qu’aucune autorisation du service d’archives n’est nécessaire à l’usager qui souhaiterait réutiliser des informations publiques.

Deux conditions doivent toutefois être réunies pour que les documents soient qualifiés d’« informations publiques » (art. L. 321-2) :

  • ils doivent être librement communicables ;
  • ils ne doivent pas être grevés de droits de propriété intellectuelle détenus par des tiers.

La réutilisation des informations publiques connaît également des limites :

Contrairement à ce que prévoyait le régime juridique antérieur, le service d’archives n’a plus de formalités préalables à la réutilisation à accomplir (vérification d’une autorisation de la CNIL, de l’existence d’une disposition législative ou réglementaire spécifique, anonymisation ou recueil du consentement des personnes).

La responsabilité de la réutilisation pèse, en effet, entièrement sur le réutilisateur. En cas de réutilisation des informations publiques contraire au droit, notamment en matière de protection des données à caractère personnel, le service d’archives ne peut en aucun cas être tenu responsable.

La tarification de la réutilisation

La réutilisation des informations publiques est, par défaut, gratuite.

Toutefois, certains services culturels (bibliothèques, musées et archives) bénéficient d’une exception et conservent la possibilité de mettre en place, s’ils le souhaitent, une redevance lorsque la réutilisation porte sur « des informations issues des opérations de numérisation et, le cas échéant, sur des informations qui y sont associées, lorsque ces dernières sont commercialisées conjointement » (art. L. 324-2).

En conséquence :

  • ne peut faire l’objet d’une tarification la réutilisation d’informations publiques que l’usager a numérisées par ses propres moyens ;
  • plus largement, ne peut faire l’objet d’une tarification la réutilisation de tout document, numérique ou non, qui n’est pas issu d’une opération de numérisation, à l’exception toutefois des métadonnées associées aux images numérisées.

Le calcul du montant de la redevance obéit à des règles définies par le code des relations entre le public et l’administration (art. L. 324-2 et R. 324-4-3).

Le produit annuel des redevances perçues par le service ne peut en effet dépasser le montant cumulé des coûts :

  • de numérisation (moyenne annuelle calculée, au maximum, sur les dix années précédentes) ;
  • de conservation des fichiers-images et de leurs métadonnées (moyenne annuelle calculée sur les trois années précédentes) ;
  • de diffusion sur Internet ou de mise à disposition (moyenne annuelle calculée sur les trois années précédentes) ;
  • le cas échéant, d’acquisition des droits de propriété intellectuelle et d’anonymisation.

Les coûts de collecte et de conservation des originaux ne peuvent en revanche pas être pris en compte.

Les services d’archives sont tenus de publier sur leur site Internet leurs tarifs, ainsi que les bases de calcul retenues pour la fixation de ces tarifs (art. L. 322-6).

Les licences de réutilisation

Les services d’archives ont la possibilité de mettre en place des licences pour détailler les conditions de réutilisation des informations publiques qu’ils conservent.

  1. Dans le cas d’une réutilisation gratuite, l’adoption d’une licence est facultative. Elle doit obligatoirement être choisie dans une liste publiée à l’article D. 323-2-1. Cette liste compte actuellement deux licences : la licence ouverte Etalab 2.0 et la licence OdbL (open database licence). Si le service souhaite adopter une autre licence, celle-ci doit être homologuée par l’État. 
  2. Dans le cas d’une réutilisation payante, la licence est obligatoire. Elle est élaborée par l’administration concernée, aucun modèle n’étant imposé aux services. Elle ne peut comporter de restrictions que pour des motifs d’intérêt général et de façon proportionnée, sans porter atteinte aux règles de la concurrence (art. L. 323-2).

Elle doit, au minimum, obligatoirement comporter les clauses suivantes (art. R. 323-3) :

  • les informations faisant l’objet de la réutilisation ;
  • leur source ;
  • leur date de mise à disposition ;
  • le caractère commercial ou non de leur réutilisation ;
  • les droits et obligations du licencié, dont le montant de la redevance due par lui et les modalités de son paiement.

Lorsque le service n’a adopté aucune licence, la réutilisation des informations publiques est libre et gratuite et s’effectue, par défaut, dans les seules conditions définies par le code des relations entre le public et de l’administration.

La cession de droits d’exclusivité

Les services d’archives ont la possibilité d’accorder des droits d’exclusivité, pour une durée maximale de 15 ans, « pour les besoins de la numérisation de ressources culturelles » (art. L. 325-1 et suivants).

Cela signifie que le service d’archives peut concéder à un tiers une exclusivité pour l’exploitation des fichiers-images que ce tiers aura réalisés à ses frais. 

Liens