Article : Jean Moulin (1899-1943)
À l’occasion du 80ème anniversaire de la mort de Jean Moulin, FranceArchives consacre une page spéciale à l’histoire du grand résistant à travers les archives.
"Entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège"
Jean Moulin naît à Béziers le 20 juin 1899, dans une famille originaire des Bouches-du-Rhône. Son père, aux solides convictions républicaines qui influenceront sa formation politique, y est professeur d'histoire-géographie et adjoint au maire, avant d'être élu en 1913 conseiller général de l'Hérault.
Le jeune Jean Moulin est un élève moyen, doué pour le dessin et attiré par une carrière artistique. Pendant ses études de droit à Montpellier, sans conviction et grâce à l'intervention de son père, il entre dans l'administration préfectorale où il se fait très tôt remarquer par Pierre Cot, un radical, sous-secrétaire d'État aux Affaires étrangères puis ministre de l'Air : il en rejoint le cabinet à plusieurs reprises, notamment sous le Front populaire pendant lequel il fait parvenir secrètement des avions aux républicains espagnols. Sous-préfet en Savoie puis dans le Finistère, il est nommé secrétaire général de la préfecture de la Somme en 1934 ; en 1937, il est le plus jeune préfet de France en Aveyron.
Préfet d'Eure-et-Loir au moment de la déclaration de guerre, il reste à son poste malgré l'arrivée des Allemands et refuse de signer en juin 1940 un document accusant des tirailleurs sénégalais d’avoir commis des atrocités contre les civils pendant l'exode. Arrêté, torturé, il tente de se suicider pour ne pas céder et acte ainsi son premier fait de résistance. Révoqué par Vichy, qui lui reproche ses sympathies pour le Front populaire et son peu d’engagement dans la Révolution nationale et la collaboration prônées par le régime, il rejoint la zone libre.
Il y établit un état des lieux de la Résistance et gagne Londres en octobre 1941 où il rencontre le général de Gaulle , chef de la France Libre, qui le charge de la constitution d'une Armée secrète et de la nécessaire unification sous son commandement des différents mouvements de résistance menés par Henri Frenay, Emmanuel d'Astier de la Vigerie, Jean-Pierre Lévy et Pierre Brossolette : le 27 mai 1943, a lieu la première réunion du Conseil national de la Résistance, mais une série d'arrestations, notamment parmi les dirigeants de l'Armée secrète, fragilise la sécurité de Jean Moulin, lui-même arrêté le 21 juin 1943 à Caluires. Torturé par Klaus Barbie, le chef de la Gestapo de Lyon, il meurt de ses blessures le 8 juillet suivant. Encore aujourd'hui, le responsable de sa dénonciation et de l'irruption des Allemands dans la maison du Docteur Dugoujon n'est pas identifié.
Peu connu des Français dans l'après-guerre, hormis à Béziers et malgré les retentissants procès pour trahison intentés au principal suspect René Hardy qui révèlent les dissensions entre les anciens combattants gaullistes et communistes de "l'armée des ombres", il ne devient un héros national et l'incarnation de la Résistance qu'à partir de son entrée au Panthéon en 1964 et le célèbre discours d'André Malraux. Des rues, des lycées et des monuments sont baptisés de son nom, comme dans les Hautes-Alpes ou la Haute-Savoie ; des hommages organisés à Toulouse et dans le Rhône, des expositions dans le Cantal, en Côte-d'Or ou dans l'Hérault et des commémorations pour les anniversaires de sa mort en Haute-Saône et en Haute-Savoie.
Faire des recherches sur Jean Moulin
Les documents relatifs à Jean Moulin n'apparaissant pas systématiquement dans les recherches effectuées à partir de son nom par défaut d'indexation, il convient d'interroger :
- pour sa carrière dans l'administration préfectorale, les fonds des préfectures dans lesquelles il a été affecté, par exemple dans l'Hérault, en Savoie ou dans le Finistère ;
- les Archives diplomatiques, pour ses activités auprès de Pierre Cot, sous-secrétaire d'État aux Affaires étrangères ;
- le fonds du cabinet du ministère de l'Air et les archives privées de Pierre Cot au Service historique de la Défense.
Les recherches sur ses activités dans la Résistance peuvent être menées :
- Au Service historique de la Défense :
- son dossier administratif de résistant (GR 16P 434107) ;
- son dossier individuel d'agent du Bureau central de renseignements et d'action (BCRA) (GR 28P 11/75, dossier 311) ;
- son dossier individuel d'agent des réseaux et des mouvements (GR 28P 4 465/43) ;
- le fonds du ministère des Anciens combattants et victimes de guerre.
- Aux Archives nationales :
- les archives du Comité d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale et fonds d'origine privée (72AJ) ;
- les archives privées de résistants, notamment celles de Daniel Cordier, son secrétaire (674AP) ;
- les archives du général de Gaulle. De la France libre à la Cinquième République. La France libre et la France combattante. Le Gouvernement provisoire de la République française (AG/3(1)/1-AG/3(1)/372,AG/3/(4)/1-AG/3(4)/133) ;
- Dans les services d'archives territoriaux :
- les Archives de l'Hérault conservent les témoignages oraux de Vincent Badie et Gabrielle Mauzé-Dutriévoz, d'anciens résistants ayant rencontré Jean Moulin ;
- les Archives du Rhône et de la métropole de Lyon proposent un dossier pédagogique à destination des scolaires élaboré à partir des documents qu'elles conservent, L’arrestation de Jean Moulin dans la maison du docteur Dugoujon.
Le procès pour crimes de guerre de Klaus Barbie s'est tenu en 1987 devant la cour d'assises du Rhône :
- les archives sont conservées par les Archives du Rhône et de la métropole de Lyon (4544W 1-4544W94;5024W 1-4544W4) qui proposent également un dossier pédagogique, Klaus Barbie et son procès pour crime contre l'humanité.
- les transcriptions sont conservées aux Archives nationales (BB/30/1891 à BB/30/1893).
Un dossier des Archives nationales, mis en ligne à l'ocasion du 80e anniversaire de la mort de Jean Moulin, présente une sélection de documents qui évoquent sa carrière de sous-préfet puis de préfet et son engagement dans la Résistance.
Pour aller plus loin
- Le musée de la Libération de Paris - Musée du général Leclerc - Musée Jean conserve des papiers personnels de Jean Moulin et de sa famille ;
- L'Ordre de la Libération, son dossier de Compagnon et ses vêtements civils ;
- L'Institut national de l'audiovisuel (INA), une interview de Laure Moulin, qui y évoque son frère et le discours d'André Malraux lors de l'entrée au Panthéon des cendres présumées de Jean Moulin ;
- Le Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon (CHRD), un fragment de son parachute ;
- Le musée Fayet de Béziers, une collection de 540 dessins réalisés par Jean Moulin, auxquels est consacrée jusqu'au 31 août 2023 une exposition, "Irrésistibles croquis : œuvres choisies de Jean Moulin".