Document d'archives : Souvenirs du pays de Boutières où la vie était réglée par les récoltes, le battage, les foires et les veillées

Contenu :

Tout d'abord, on entend une chanson lue par une femme, écrite par Monsieur L'abbé Claude Marquand, curé de Saint Jean de Nay né à Dunières en Haute-Loire. Les veillées se passaient à peler châtaignes et noix. Chez certains patrons, ils jouaient à la Bourre (jeu de cartes) pendant que les employés s'occupaient des châtaignes. L'informateur parle du "matou" qui sert à faire sécher les châtaignes. Il pense qu'il reste encore quelques personnes qui utilisent cette technique et il donne les détails de son utilisation. Selon lui, les châtaignes fumées sont meilleures. Les châtaignes blanches étaient séchées puis destinées aussi bien aux gens qu'aux bêtes. Chacun enlevait la peau de ses propres châtaignes, avec la "pise", ce qui n'était pas un travail en commun. L'informateur se rappelle combien il était bon danseur. Il a d'ailleurs travaillé dans une usine où il était logé et, étant le seul garçon à loger sur place avec une vingtaine de filles, il les faisait toutes danser. Sa femme ne dansait pas beaucoup, sauf à l'usine quand elle avait avancé dans son travail. Il a un souvenir très précis d'un mas de cocagne un jour de fête où étaient accrochés deux paquets de tabac, un litre de vin et un pain. L'informatrice se souvient qu'il y avait cinq ou six usines de soie à Albon et qu'il y avait donc, là-bas, beaucoup de "jeunesse". Ses cousines dansaient beaucoup, parfois elles gagnaient une ombrelle. Mais elle pense que ce n'est pas très bon pour la santé car celle de ses cousines qui dansait le plus n'a jamais eu d'enfants. D'après l'informatrice, maintenant, seul compte le rendement et l'atmosphère dans les usines n'a plus rien à voir avec celle qui prévalait dans le passé. L'informateur note que la patronne ne l'appréciait pas car il ne voulait pas faire la prière mais, d'un autre côté, elle l'appréciait car il travaillait bien. Il se souvient ensuite des cols qu'il fallait passer pour aller vendanger. Certains formaient des équipes pour aller vendanger dans les Bouches-du-Rhône ou ailleurs. Il y a un peu de vin, du Clinton. Il est seulement pour la consommation personnelle et il n'est pas toujours bon. En 1914, on a planté en face de chez lui. Les châtaignes se vendaient à la foire de Mézilhac, des gens se louaient pour la récolte. Les informateurs se souviennent parfaitement des dates des différentes foires, la foire aux cochons du premier lundi de décembre, celle du 18 décembre étant réservée aux cochons jeunes, comme celle du 8 mars. Ils se souviennent avoir connu les foires du 5 février et du 5 mai à leur création. À Saint-Sauveur-de-Montagut, il y avait des bazars qui venaient de Valence. Pour les bêtes, en général, il valait mieux aller à Saint-Pierreville. À Glueras, il y a la foire aux chèvres adultes le 2 mai et le 14 septembre. À cette dernière les gens venaient de Mézilhac, d'Albon et de Saint-Jeunet pour manger des figues qu'on payait alors 20 sous le quarteron (24 figues) ou la douzaine. Les informateurs ajoutent que c'était un gros effort qu'il fallait fournir pour aller charger de Saint-Sauveur-de-Montagut à Glueras et que les gens gagnaient leur vie péniblement. Les salaires de l'époque étaient de 20 sous par jour. Quand on tuait le cochon il fallait brûler les poils avec de la paille. On faisait les saucisses avec une espèce de seringue et un piston. L'informateur se souvient du tueur de cochons que sa famille employait pour l'occasion. Ils n'étaient pas contents de lui, bien qu'il soit un bon tueur, mais il ne faisait pas le reste du travail et il buvait trop. Ils en ont changé et le nouveau avait une machine. Quand l'informateur a eu 18 ans, il a commencé à tuer le cochon lui-même et l'a ensuite fait pendant 50 ans. Tuer le cochon et faire les saucisses et le lard se dit "faire boucherie". Le soir où on tuait le cochon, on faisait un festin, une veillée et l'informatrice faisait une fricassée. Les hommes jouaient à la bourre. Outre les pommes de terre, le seigle, l'avoine et l'orge, on faisait beaucoup de blé. Le battage, au fléau, se faisait avec les voisins. L'informateur dit qu'il était l'un des plus forts du quartier. Il se souvient avoir battu vingt-sept jours sans s'arrêter. Il raconte les techniques de battage et l'utilité que les quatre compagnons travaillant ensemble "soient liés", c'est-à-dire qu'ils s'entendent bien.
Lors de la rétroconversion de la plateforme Ganoub vers Calames, certains mots descripteurs issus du thésaurus de la phonothèque du Secteur Archives de la recherche de la MMSH n'ont pu être repris à l'identique dans le référentiel IdRef. Pour cette notice, il s'agit de : tuer du cochon, solidarité paysanne, commensalité, divertissement, modernisation de la société, Tauzuc (localité), 8 mars, lundi, 18 décembre, 5 février, 5 mai, 2 mai, 14 septembre ; titres d'œuvres : Quand je vois porter des lunettes, Mon paire fa lo chabri.

Cote :

MMSH-PH-252

Inventaire d'archives :

Fonds Sylvette Béraud-Williams

Conditions d'utilisation :

consultation libre sur internet.
La réutilisation de l'archive peut être autorisée sur demande motivée auprès du secteur Archives de la recherche - Médiathèque SHS de la MMSH par courriel à : contact.bibliotheques.mmsh@services.cnrs.fr

Langues :

Commentaire sur la langue : la chanson lue par une femme au début de l'enquête relève d'un parler, non identifié, qui semble différent du parler occitan d'Ardèche entendu jusque-là. Termes techniques: un quinquet (lampe à huile), un ericier (endroit où on stocke les châtaignes). En occitan : una farassa (torche de paille), espelher, espelhaire, colasson (pour porter le fumier), la besse (idem), matou (conduit où on met les châtaignes pour les faire sécher en les "fumant", la pise (instrument, morceau de bois avec des dents, pour enlever la peau des châtaignes), la cojina (soupe de châtaignes). En français régional : la châtaigne "grelotte" dans sa peau quand on la "fume", sinon, la peau "reste attrapée à la châtaigne".

Description physique :

Information matérielles :
3 bandes magnétiques sur bobine
Importance matérielle :
Durée : 1h 18min

Où consulter le document :

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

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