A. NATURE DU FONDS.

Parmi les divers fonds de l'administration des Beaux-Arts qui constituent la sous-série F des Archives nationales, les cartons cotés 476 à 484 renferment un fonds particulier, celui du Dépôt des marbres du gouvernement jusqu'en 1880. Nous verrons plus loin que les archives du Dépôt des marbres ont été réparties entre plusieurs sous-séries, non pas selon leur nature mais selon leur objet. Malheureusement, les cartons dont nous avons eu à nous occuper présentent de ce fait assez peu de cohérence. Cependant, par la variété même de son contenu, ce petit fonds est assez riche et peut fournir de nombreux renseignements, particulièrement les cartons F 479 à 484 qui renferment les dossiers des artistes. 2121

Le Dépôt des marbres a été créé vers 1810 pour servir de magasins destinés aux commandes officielles d'oeuvres d'art, particulièrement de sculptures. Les rares dossiers du Premier Empire qui figurent dans F 476 et 477 se rapportent principalement à deux affaires : les marchés passés entre le gouvernement et un certain Henraux, marchand de marbre ; celui-ci s'empara peu à peu d'un véritable monopole de la fourniture de marbres italiens pour les commandes officielles, devint rapidement propriétaire de plusieurs bateaux et se chargea du transport des marbres qu'il choisissait lui-même dans les carrières italiennes, depuis l'Italie jusqu'au port d'Arles, sur le Rhône . La deuxième affaire concerne la décoration du pont de la Concorde, qui devait recevoir des statues colossales de généraux d'Empire et des trophées. Le dossier contenu dans F 476 (I, 2) suit l'affaire jusque sous le règne de Louis XVIII qui bouleversa le plan de décoration du pont devenu alors Pont Louis XVI. 2121

Cependant, malgré l'étendue de la période donnée par les dates extrêmes de F 476 à 484, 1806-1885, les archives du Dépôt des marbres que nous avons eu à inventorier sont plus abondantes pour la période qui correspond au Second Empire, époque où d'ailleurs, la création d'un Ministère d'Etat auquel furent rattachés les Beaux Arts, avant de passer sous la tutelle du Ministère de la Maison de l'Empereur, favorisa l'éclosion d'oeuvres d'art et donna un grand essor au Dépôt des marbres, responsable de l'exécution des commandes officielles. 21

C'est aussi au début de cette période que les règlements intérieurs du Dépôt des marbres, tirés de l'expérience acquise jusqu'à cette époque, sont élaborés et fixés une fois pour toutes. Or, le Dépôt des marbres, qui avait progressivement pris la succession, à partir de 1804, du dépôt de Chaillot, en se spécialisant très rapidement dans l'achat et le stockage des marbres et des porphyres à mettre à la disposition des artistes qui recevaient des commandes officielles, devint à la Restauration, de simple magasin qu'il était, un véritable centre d'administration de l'art officiel mettant des ateliers de peinture, de sculpture, de copie et de restauration à la disposition des artistes, contenant deux galeries d'exposition de peintures et de sculptures, un magasin de moule et de modèles, enfin un atelier spécialisé dans l'emballage des oeuvres d'art pour leur expédition en province. La coutume s'établit peu à peu d'en faire une sorte de dépotoire de tout ce qui touchait de près ou de loin, aux Beaux-Arts : ouvrages ou matériel des expositions, décors de l'Opéra ou de fêtes publiques, sans compter l'excédent des objets confiés au garde-meubles dont les locaux étaient contigus à ceux du Dépôt des marbres. Le Dépôt occupait un quadrilatère situé entre la rue de l'Université et la Seine, appelé l'Ile des Cygnes. En 1880 le terrain sera acheté par la Ville de Paris et le Dépôt des marbres devra abandonner ses locaux. .

Les archives du Dépôt des marbres sont très dispersées. On en trouve la plus grande partie dans la sous-série F réservée aux Bâtiments civils, mais aussi dans F , car la répartition dans ces sous-séries ne s'est faite qu'au gré des versements des différents ministères : il convient de remarquer que le Dépôt des marbres a appartenu, comme toute l'administration des Beaux-Arts en général, à de nombreux ministères, tout au long du XIXè siècle : Ainsi l'administration des Beaux-Arts a été partagée sous le Premier Empire, entre les Ministères de l'Intérieur et de la Maison de l'Empereur, et de même, sous la Restauration, entre les Ministères de l'Intérieur et de la Maison du Roi. Rattachés à l'Intérieur sous la Monarchie de Juillet après un bref passage au Ministère du Commerce et des Travaux publics, les Beaux-Arts passent en 1853 dans les attributions du Ministère d'Etat et dix ans plus tard sont gérés par le Ministère de la Maison de l'Empereur. Enfin, sous la Troisième République, il y eut une direction des Beaux-Arts dépendant du ministère de l'Instruction publique. 1321

Les neuf cartons F 476 à 484, qui contiennent ce qui restait du Dépôt des marbres, présentent deux séries de documents. La première est constituée de correspondance diverse se rapportant à trois sujets principaux : l'achat de marbres italiens, l'encouragement des marbrières françaises, et l'administration des ateliers de sculpture et de copie de peintures du Dépôt. 21

La seconde, des cartons F 479 à 484, donne par ordre alphabétique des noms des artistes, les dossiers des attributions d'ateliers pour l'exécution des oeuvres officielles qui leur ont été commandées ; mais il est indispensable de compléter ces dossiers avec ceux qui figurent dans F 477, relatifs aux ateliers. 2121

En dehors de ces catégories de documents, on peut trouver une foule d'informations les plus diverses : sur les modes de transport des marbres et les itinéraires empruntés par les convois , sur les expériences que deux savants conduisirent dans les ateliers du Dépôt sur une machine à air comprimé que Napoléon III alla lui-même observer , sur la fondation du musée de Montpellier grâce aux donations d'un certain Fabre, peintre dont les dernières années d'une existence bien aventureuse furent récompensées, en 1828, du titre de baron . Le hasard a placé dans ce fonds une lettre autographe de Gustave Flaubert, réclamant un bloc de marbre pour élever une fontaine à la mémoire du poète Louis Bouilhet . Enfin, c'est le hasard encore qui nous fait connaître l'existence de six pastorales attribuées à Watteau, parce que le conservateur du Dépôt des marbres en eut la garde pendant un certain temps .

Cependant, dans leur ensemble, les informations que l'on peut recueillir sur un artiste de quelque valeur sont très maigres : sous les noms de Carpeaux, Carrier de Belleuse ou Etex, les dossiers sont bien minces. Mais des recherches plus larges sur l'énorme production artistique du XIXè siècle seraient beaucoup plus fructueuses dans ce fonds où les dossiers d'artistes mineurs sont en nombre considérable.

B. CLASSEMENT ET INVENTAIRE.

A l'intérieur des cartons, les documents se présentent dans le plus grand désordre. Mais, comme ils avaient reçu une cote après leur versement et avaient déjà été communiqués au public, il nous était impossible d'y remédier. Ce désordre a d'ailleurs dû être introduit au Dépôt des marbres lui-même. A tout cela est venu s'ajouter le dépeçage des dossiers lors de la communication au public. Mais la plus grande difficulté fut d'établir un classement cohérent à l'intérieur de cette répartition arbitraire en articles cotés, sans pouvoir y opérer ni tri, ni élimination.

Pour chacun des trois premiers cartons, après lecture des pièces, nous avons commencé par un classement, reconstituant les dossiers dont les pièces étaient dispersées, en les insérant les unes dans les autres et en laissant la plus récente à l'extérieur du dossier.

En second lieu, nous avons entrepris le classement des dossiers. Nous avions le choix entre un classement chronologique et un classement méthodique. Le second s'imposait, puisque la moitié des documents que nous avions à classer étaient extraits des dossiers des artistes ; il fallait les regrouper.

Pour matérialiser notre classement, nous avons utilisé des chemises de différentes couleurs sur lesquelles nous avons reproduit les chiffres des divisions de notre plan : pour les grandes divisions, des chemises en carton léger, et au-dessous, des chemises en papier gris. Toute la numérotation que nous avons introduite dans notre inventaire est reproduite sur ces chemises.

Quant aux six cartons contenant les dossiers d'artistes, nous avons corrigé l'ordre alphabétique, puis à l'intérieur de chacun d'eux, chronologiquement, nous avons rangé les sous-dossiers concernant chacun une demande de bloc de marbre pour une oeuvre déterminée, le plus ancien précédant le plus récent.

Après avoir terminé le classement de chaque carton, nous en avons fait l'inventaire, donnant une analyse de chaque dossier et nous contentant de signaler les pièces qui nous ont paru importantes. Mais dans les trois premiers cartons comme dans les dossiers d'artistes, notre objectif principal, dans la mesure où un inventaire d'un fonds de F est utilisé par un historien de l'art, était de dégager les noms des artistes et le sujet de leurs oeuvres, lorsqu'ils constituaient l'objet même du dossier. Nous avions pensé relever dans un répertoire les noms des artistes qui y figuraient par ailleurs, mais le temps nous a manqué pour l'achever. 21

Nous avons tenté de regrouper quelques cotes provenant d'autres fonds et concernant le Dépôt des marbres ou quelques-unes des questions qui figurent dans F 476-484. On les trouve dans F , et F . Nous avons tiré ces indications des fichiers méthodiques de dépouillement des inventaires et des inventaires eux-mêmes. 211321

Dans F , les fonds donnés comme provenant du Dépôt des marbres sont : 21

F 775. Dépôt des marbres. 1850-1879. 21

F 1403-1405. . 1822-1860. 21Id

F 2308. . 1889-1896. 21Id

F 3015. . 1880-1900. 21Id

Dans F  : 13

F 530. Conservation des monuments et des marbres. 1814-1823. 13

F 753-758. Dépôt des marbres. 1811-1843. 13

F 906. Conservation des arts et magasins des marbres. An II-IX. 13

. Dépôt de Chaillot

F 965, N° 305. Magasin des marbres. 13

F 765. Transfert du Dépôt à l'Ile des Cygnes. 13

. Marbres de Carrare

F 758. Marché passé pour leur fourniture avec le chevalier Orsoliny, puis abandonné. 1822-1828. 13

F 760. Transport confié à Henraux. 13

F 756-762. Marbres français et étrangers. Détails sur l'exploitation des marbres des Pyrénées 1818-1835. 13

F 530. Carrières de marbre des Pyrénées. Rapport de M. de Puymaurin. 1825. 13

F 1260. Carrière de Saint-Béat. Rapport d'A. de Gisors. 13

. Pont de la Concorde. Pont Louis XVI

F 203, d. 35. Statues du Pont de la Concorde. Rapport sur les sculpteurs qui peuvent en être chargés. 13

F 206, d. 17. Statues colossales du Pont de la Concorde Noms des artistes. 13

F 511. Ateliers provisoires élevés pour la confection des statues du pont d'Iéna et du Pont de la Concorde. 13

F 764. Statues du Pont Louis XVI. Petits modèles rendus aux artistes pour les faire couler en bronze. 13

F 1055. Ateliers de sculpture pour les statues du Pont Louis XVI. 1815-1831. 13

F 1246. Statues colossales du Pont Louis XVI. 13

F 580. Décoration du Pont de la Concorde. 21

. Divers

F 635 et 637 . Sculpteurs. Demandes de travaux jusqu'en 1830. 13A

F 769. Marbres de différentes régions de France. 1823-1848. 13

F 1024. Exposition des produits de l'industrie. 1829-1839. 13

F 292-303. Affaires diverses concernant les artistes. 1813-1893. 21

F 304-313. Demandes diverses faites par des artistes. 1859-1880. 21

F 318-435. Attributions d'objets d'art. Dossiers classés par département. An IV-1875. 21

F 436-475. Répartition d'objets d'art entre les musées. 21

F 485-487. Travaux d'art. Demandes d'achats, commandes, acquisitions, transports. 21

F 498-499. Emballage d'oeuvres d'art. 1840-1881. 21

F 503-508. Transports d'oeuvres d'art. An V-1885. 21

F 553-555. Moulages. 1842-1883. 21

F 573. Transport en France de marbres et oeuvres d'art provenant d'Italie. An IV-1828. 21

F 728-740. Tombeau de Napoléon Ier. 1841-1856. 21

F 2789-2792. Demandes de travaux par des artistes. Commandes et acquisitions. 1861-1886. 21