Document d'archives : Le journaliste Nabil Amr présente Yasser Arafat et lui donne la parole pour qu’il apporte son point de vue sur la crise de 1982,...

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Le journaliste Nabil Amr présente Yasser Arafat et lui donne la parole pour qu’il apporte son point de vue sur la crise de 1982, les liens avec la famille Assad et l’expulsion de l’ OLP de la Syrie

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L'entretien a lieu après l'expulsion des membres de l'OLP de Syrie, et Nabil Amr donne la parole à Yasser Arafat pour éclaircir la situation. Le journaliste débute l'entretien en présentant Yasser Arafat comme un symbole majeur de la résistance palestinienne et du nationalisme arabe. Yasser Arafat réfute modestement cette image de lui-même, se positionnant comme un combattant parmi d'autres. Puis il critique ceux qui le diffament et les accuse d'être manipulés par les renseignements de régimes arabes, tout en soulignant les lourdes responsabilités de son leadership. La discussion se tourne vers les tensions avec la Syrie. Arafat exprime le désir de maintenir de bonnes relations avec ce pays, malgré les divisions passées. Le sentiment de Hafez El-Assad (1930-2000) est qu'il a été trahi alors même qu'il a sacrifié son pays à la cause palestinienne en facilitant les actions de l'OLP. Mais pour Yasser Arafat ce sont des paroles issues de malentendus ou de manipulations politiques. Il rappelle les liens historiques et la coopération durant le siège de Beyrouth au début des années 1980, notamment avec des figures militaires syriennes et affirme que, selon lui, il n'y a pas de différents fondamentaux. Nabil Amr insiste pour obtenir une réponse sur la raison de cette expulsion de Syrie. Yasser Arafat lui répond : "Que Dieu leur pardonne s'ils disent cela…". Pour lui, les slogans du nationalisme ne se limitent pas à des mots sur du papier et personne ne peut ternir la position de la révolution palestinienne et sa coopération dans les combats avec l'armée syrienne. Il rappelle, en particulier, ceux des cercles de 1985 dirigés par le brigadier Mohammed Hallal avec qui il a combattu lors du siège de Beyrouth. Certes, cette expulsion n'est pas la première dans l'histoire palestinienne, mais ce qui est brutal aujourd'hui c'est qu'ils sont forcés de quitter Beyrouth et Damas et qu'ils n'ont plus aucun lieu où aller.
Il indique des chiffres sur les victimes civiles de ces combats, 72 000 morts et blessés, pour lui libanais et palestiniens confondus partagent le même malheur. Il pointe vers certains régimes et agences arabes, en particulier la Syrie, et la Libye, mentionnant Mouammar Kadhafi. Il mentionne ensuite des munitions stockées dans les entrepôts libanais d'Al-Naameh et qu'on l'accuse d'avoir utilisées. Il affirme qu'il n'était pas au courant de l'existence de ces armes ; d'ailleurs, s'il l'en avait été informé, il en aurait bénéficié. Il mentionne spécifiquement les entrepôts d'Ahmad Jibril et Saleh Druee. Yasser Arafat revient sur les relations avec la Libye. Il critique les tentatives de Mouammar Kadhafi de saper la révolution palestinienne et de propager des divisions au sein du Conseil national palestinien. Il insiste sur les efforts libyens pour susciter des scissions mais aussi l'image de l'unité palestinienne sur la scène internationale. Il souligne combien les actions de la Libye ont causé des dommages significatifs au sein du mouvement national palestinien mais aussi ont porté préjudices à la situation déjà précaire du Liban. Selon Yasser Arafat, Mouammar Kadhafi n'a pas soutenu les Palestiniens de manière constructive dans les moments les plus cruciaux. Il a, au contraire, contribué à attiser les luttes internes qui ont affaibli la cause palestinienne.
Nabil Amr interroge ensuite Yasser Arafat sur ses interactions avec le renseignement syrien et particulièrement sur ses rapports avec Rifaat al-Assad. Yasser Arafat rappelle qu'il a été invité à Damas depuis Tripoli pour un entretien qui l'a extrêmement surpris. Il détaille une rencontre de deux heures trente avec Rifaat al-Assad, orchestrée par Hafez al-Assad, qui aurait dû être suivie d'une autre réunion quelques jours plus tard. Cependant, entre-temps, un incident sur la route de Damas à Homs a précipité la décision de l'expulsion de l'OLP. Yasser Arafat admet qu'il n'est pas vraiment certain des raisons et pense qu'il doit encore demander des éclaircissements à Rifaat al-Assad.
Pour le moment, les réactions et les réponses à la crise via les comités saoudiens ou algériens, ne satisfont pas ses attentes. Yasser Arafat reconnaît que les relations avec la Syrie sont dans une impasse mais il veut continuer à conserver des relations avec eux. Cela lui semble important dans ce contexte de tensions internationales impliquant les Américains et les Soviétiques. Il mentionne spécifiquement les rencontres entre Anatoly Dobrynin et des responsables américains, ainsi qu'entre Averell Harriman et des responsables soviétiques, illustrant les enjeux globaux qui pourraient également affecter les Syriens et les Palestiniens. Pour Yasser Arafat, il n'est pas question de retirer les groupes de l'OLP de la vallée de la Bekaa car le risque serait d'élargir le conflit inter-palestinien. Il évoque les stratégies utilisées lors de conflits antérieurs pour protéger la résistance, comme en 1976, et discute des plans pour les forces palestiniennes potentiellement dirigées vers Tripoli. Pour conclure et dans l'objectif de mettre fin à la détérioration des rapports avec la Syrie, il lance un appel pressant à Hafez al-Assad au nom des martyrs et de la cause arabe, en faisant allusion à des événements et des zones géographiques en Syrie, sans spécification particulière.
Nabil Amr aborde un nouveau sujet : il questionne Yasser Arafat sur un éventuel retrait palestinien de Tripoli en lien avec un hypothétique accord syrien sur un retrait israélo-syrien simultané du Liban. Arafat répond que cette question n'est pas de son ressort, car il n'a pas eu de rencontre directe avec Olaf Scholz ou d'autres figures clés mentionnées dans les tentatives de prise de contrôle de l'OLP. Il fait référence aux différentes remarques des personnalités comme Kissinger, Moshe Arens, Yitzhak Shamir, et Menachem Begin concernant le futur de l'OLP et de sa propre position. La conversation évoque également les dissensions internes dans le mouvement palestinien, notamment avec les groupes d'Abu Musa et d'Abu Saleh. Elles ont été exacerbées par les circonstances récentes, comme le siège de Beyrouth et Yasser Arafat mentionne les dommages causés par le conflit. La Syrie, la Libye et d'autres régimes arabes jouent un rôle dans ces divisions et ils ont leurs responsabilités sur les victimes civiles et les déplacements massifs.
Il est enfin question de la dimension politique et culturelle de la résistance palestinienne. Yasser Arafat souligne la diversité des formes de lutte, de la guérilla à la culture en passant par la diplomatie. Il est fermement résolu à continuer la lutte, inspiré par les sacrifices des martyrs et l'objectif d'une reconnaissance pleine et entière de la cause palestinienne. Il conclut en affirmant que la révolution palestinienne ne peut s'arrêter, et pour souligner cette réalité et souligner la persévérance et la foi dans la cause, il cite le Coran (Sourate 9 verset 32) qui enseigne que toutes les tentatives d'extinction de la lumière de Dieu sont vouées à l'échec.
Le cadrage de l'entretien est officiel et semble préparé en amont. Le lieu de l'entretien n'est pas spécifié. On peut supposer qu'il a été enregistré en Tunisie ou à Chypre.

Cote :

MMSH-PH-7838

Inventaire d'archives :

Fonds Eric Rouleau

Langues :

arabe (dialecte palestinien et arabe classique) .

Description physique :

Information matérielles :
1 cassette audio
Importance matérielle :
50min

Où consulter le document :

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

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