Dans ce texte terminé en 2016 et confié à la BDIC en 2017, Claire Etcherelli revient sur ses 25 années passées au sein de la revue Les Temps modernes, dont elle a été la secrétaire de février 1973 à la fin 1997— conviée aussi, à partir du printemps 1974, à la demande de Simone de Beauvoir, à participer à son Comité de direction : elle en démissionnera en janvier 1987, peu de temps après la reprise de la direction par Claude Lanzmann (octobre 1986), avant d’assister de nouveau à ses réunions à partir du début 1990 en « témoin muette », sans que son nom réapparaisse parmi ceux des membres du Comité.

Ce témoignage inédit est le récit de la découverte d’une fonction et de son progressif apprentissage, ses « libres souvenirs » offrent un point de vue original, de l’intérieur, sur le fonctionnement et la fabrication des Temps modernes — « une acrobatie permanente », pour citer ses mots de lors d’un entretien préalable au don du tapuscrit. Livrés selon un ordre chronologique, ils rappellent la qualité des articles et dossiers proposés par la revue (dont le tirage au milieu des années 1970 se situe autour de 3500 exemplaires), la vivacité voire la rudesse des débats entre ses collaborateurs — Les temps Modernes étant toujours restés « un lieu de grande liberté » — ainsi que la variété des sujets politiques, sociaux ou intellectuels abordés au fil de ses numéros.

Ils sont aussi l’occasion d’évoquer le rôle ou de dresser les portraits, simples esquisses ou études plus fouillées, de différents protagonistes de cette riche histoire : directeurs successifs de la revue (Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Claude Lanzmann), membres « historiques » (Jacques-Laurent Bost, André Gorz, Jean Pouillon) ou nouvellement cooptés de son Comité, dont le renouvellement et les changements de composition s’accélèrent à partir des années 1980 (Henriette Asséo, Jeannette Colombel, Bernard Cuau, Michel Deguy Elisabeth de Fontenay, François George, Pierre Goldman, Michel Kail, Liliane Kandel, Sami Naïr, Dominique Pignon, Robert Redeker, Pierre Rigoulot, Pierre Victor/Benny Lévy, Emmanuel Wallon, etc.), collaborateurs réguliers (comme Renée Saurel puis Micheline Servin, titulaires successives de la rubrique Théâtre) ou contributeurs plus occasionnels, ou bien encore complices de travail (Yanina Sochaczewska, Janine, la mère de Pierre Goldman, « aimée comme une mère, comme une amie, comme la plus attachante, la plus exaspérante, la plus gaffeuse et irremplaçable partenaire au secrétariat »), etc.