Document d'archives : Abou Iyad (1933-1991) fait part de sa surprise devant la participation égyptienne à une alliance israélo-américaine et commente...

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Abou Iyad (1933-1991) fait part de sa surprise devant la participation égyptienne à une alliance israélo-américaine et commente les conséquences de l'accord de Camp David auprès d'un groupe de journalistes

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Pour Abou Iyad la tenue d'une réunion entre Israël et les États-Unis n’est pas une surprise mais il exprime son étonnement quant à la participation de l'Égypte à celle-ci. S’il doit évaluer les implications de son échec ou de son succès, à tout prendre il préfère l'échec. Dans ce cas, le président égyptien Sadate, comme les pays du Golfe, resteront attachés à une solution globale et non pas israélo-égyptienne. Selon lui, il n'y a pas de solution pacifique. Pour l'OLP il est nécessaire que ces négociations échouent car l’initiative est individuelle, la seule visée est israélo-égyptienne. Si le projet est efficace pour l'Égypte il ne l’est pas pour la .
Il rappelle qu'en 1948, les dirigeants arabes n'osaient pas négocier et que même après la défaite de 1967, Nasser n'aurait pas imaginé prendre de telles mesures ; d'ailleurs après la guerre de 1973, et même sans victoire, la dignité arabe avait été restaurée... Il présente Anouar el-Sadate comme un homme qui veut accomplir quelque chose d'important pour son pays, mais pour cela il est prêt à tous les compromis (et ajoute qu'il ne l'insulte pas en disant cela). Il est simplement le jouet des américains. Il ne serait d'ailleurs pas surpris qu’un Camp David II avec d’autres concessions suivent par la suite. Les concessions d'Anouar el-Sadate représentent des pertes incontestables pour les Arabes en général, pour l’OLP, pour les Syriens qui ont combattu en octobre avec les Égyptiens mais aussi pour les Égyptiens eux-mêmes qui n'ont aucun intérêt dans ces concessions. Cela même si Anouar el-Sadate obtient le Sinaï en échange. Certes, le peuple égyptien est pris à la gorge à cause de la dureté de la vie et de la brutale hausse des prix mais il est difficile d’y voir clair. Il ne peut d’ailleurs pas définir le système économique égyptien, sorte de mélange de socialisme et de capitalisme. Il se rappelle à cette occasion la façon dont Nasser à su s’appuyer sur la souffrance du peuple égyptien pour créer un sentiment national.
Comment seront traitées les oppositions suite à cet accord israélo-américain-égyptien ? Il n’a pas la réponse mais, il peut l'imaginer : un chef d'état-major israélien vient d'annoncer que la Palestine n'est pas un État. C’est la première fois qu’il entend cela, comme un défi qui est lancé. Est-ce que cette annonce prend en compte les positions de Hafez al-Assad, du roi Hussein et bien sûr de l’OLP ? Les informations sont contradictoires et chaque partie interprète ces accords à sa manière. Il illustre son point de vue en donnant l’exemple de Jérusalem, considérée unifiée par Menahem Begin (1913-1992) tandis que A al-Sadate demande encore d'étudier la question.
Suit un passage difficilement compréhensible dans l'enregistrement qui évoque les stratégies géographiques des Palestiniens à l'intérieur des territoires du conflit. Abou Iyad insiste sur la nécessité de ne pas exclure le roi Hussein (1935-1999) de Jordanie des négociations et il évoque ensuite des équilibres de pouvoir au sein de l'OLP. Il revient sur les échecs perçus au moins en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Anouar el-Sadate parle au nom de la région arabe et ce n’est pas légitime, il ne peut pas décider du destin du peuple palestinien et arabe. D’ailleurs plusieurs offres ont été faites à des dirigeants arabes, mais tous ont refusé. A son avis, Anouar el-Sadate méprise les Arabes qui ne sont à ses yeux que des bavards, sans capacité d’action.
On entend la voix d’une journaliste qui lui demande si les accords de Camp David étaient réellement une action individuelle ou si elle était soutenue (phrase en suspens)… Abou Iyad répond que le président Sadate connaît et comprend bien la région arabe qu’il envisage en trois parties : l’une a des liens directs avec les Etats-Unis, une autre a des liens indirects, et la dernière est contre les Etats-Unis. Anouar el-Sadate pense que ceux qui soutiennent les Etats-Unis sont nécessairement du côté des accords de Camp David, car ils en sont le garant. Il s’agit d’une pensée réaliste qui doit faire face aux positions arabes. Celles-ci sont contradictoires. Certains pays arabe affirment soutenir le droit des Palestiniens à l'autodétermination et, en même temps, ils poussent le projet égyptien. Il donne l’exemple de l'Arabie-Saoudite. Il mentionne qu'il s’y trouvait deux semaines auparavant pour rendre visite à sa mère et qu’il est rentré en Égypte avant la publication de ces accords, confiant dans le résultat d'une solution unilatérale.
Désormais, il comprend que Anouar el-Sadate ne peut plus se rétracter au risque de sa chute. Il mentionne le nom d'un écrivain israélien (dont le nom n'est pas clairement identifié) qui aurait déclaré en 1956 que si l'Égypte sortait du cercle arabe et qu'une paix était conclue avec ce pays, ce serait un couronnement pour Israël ; 22 ans plus tard, ce plan a réussi. Désormais, les Palestiniens entrent dans un conflit politique avec les Arabes face à une trahison de la cause qu'aucun leader arabe n'a jamais osée auparavant. Il compte sur l'Irak pour rejoindre le front et discute des plans de développement pour 1985, évoquant son plan pour éliminer la présence chiite dans la région. Selon lui, l'Irak a désormais l’obligation de rentrer dans le jeu, de contribuer au financement et à l'OLP en Syrie et d’arrêter leurs interventions futiles. Il appelle à la fin de la guerre médiatique déclarée contre la Syrie à l'échelle mondiale et en même temps, il appelle la Syrie à cesser la guerre médiatique contre l’OLP. Il discute des positions des Soudanais du Sud qui rejettent la position du président Sadate, puis il mentionne la position de l'Algérie. Il est persuadé que la rationalité de Houari Boumédiène (1932-1978) accélèrera la fourniture d'aide en ressources humaines et matérielles Il évoque les positions de Hafez al-Assad, qu'il considère comme honorables et historiques. Il en est certain, ce dernier ne se rétractera pas, tout comme la Libye et l’Algérie, et peut-être l’Irak et l’Arabie Saoudite. Il souligne que les États-Unis et les institutions légitimes ont dépassé leurs limites en imposant une solution unilatérale au nom de tous, et il mentionne l'importance de l'alliance avec les Soviétiques, notamment du côté syrien. Il fait également allusion aux relations stratégiques entre les pays arabes et les Soviétiques, signalant quelques « petites erreurs ». Dans un contexte qui pourrait être nommé comme “une menace implicite”, l’OLP ne peut pas être vaincu. Il donne les chiffres de 50 000 Palestiniens armés au Liban et ailleurs. Il suggère que les erreurs de l’Egypte, des États-Unis ou d'Israël pourraient conduire à certains à des attitudes extrémistes, des actions considérées comme inacceptables par les européens. Il anticipe des événements à venir dans le monde en réaction à tout cela, en particulier parmi ceux qui ont vécu l'humiliation dans les camps et qui n'ont d'autre choix que de prendre les armes. Il fait ensuite allusion à l'appel de Jimmy Carter à la guerre contre les Palestiniens, qui ne pourra que provoquer des réactions chez le peuple palestinien. Certes, il n'y pas de structure militaire réelle, mais ni lui, ni Yasser Arafat ne pourront contenir un peuple face à une guerre déclarée par la plus grande nation du monde (en référence aux Etats-Unis). Il rappelle les paroles d’Anouar al-Sadate qui s’est engagé à combattre ceux qui encouragent les Palestiniens à nuire. Il termine en notant que la guerre a été déclarée à l’OLP par trois parties : les États-Unis, Israël et l’Egypte et conclut en évoquant toutes les révolutions palestiniennes qui ont été contrecarrées depuis 1917. Ce qui s'est passé à Camp David est une trahison insupportable pour les Palestiniens. Il insiste sur ce qui pourrait se produire dans les mois à venir : certes la puissance palestinienne est avant tout morale mais elle est un vent qui ne se fixe jamais, ni au Liban ni à un seul endroit…
L'enregistrement est difficile à catégoriser et on ne sait pas qui enregistre. Il fait penser à une conférence de presse à la sortie d’une réunion. Les journalistes sont nombreux, le son n'est pas de bonne qualité. Eric Rouleau est peut-être présent, mais sa voix n'est pas audible. Le lieu est inconnu mais il est possible que l'enregistrement ait été réalisé à Beyrouth.

Cote :

MMSH-PH-7841

Inventaire d'archives :

Fonds Eric Rouleau

Langues :

arabe (dialecte palestinien).

Description physique :

Information matérielles :
1 cassette audio
Importance matérielle :
49min

Où consulter le document :

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

Maison méditerranéenne des sciences de l'homme (MMSH) - Secteur Archives de la recherche

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