Document d'archives : Pédagogie Freinet et Mouvement de l'école moderne

Cote :

169 J 9-10

Inventaire d'archives :

Fonds Pierrette et René Grosso

Informations sur le producteur :

Éléments historiques
La pédagogie Freinet est née d'une volonté de renouveler la vision traditionnelle de l'école grâce à des techniques actives d'éducation qui place l'enfant au coeur du processus d'apprentissage. Elle est conçue et développée en France au début du XXe siècle par Élise Freinet (1898-1983) et Célestin Freinet (1896-1966), tous deux instituteurs dans les Alpes-Maritimes. Cette pédagogie traverse rapidement les frontières nationales, dans la lignée des nombreux mouvements d'éducation nouvelle qui se développent en Europe au début du siècle. Élise et Célestin Freinet élaborent et expérimentent ensemble des techniques qui favorisent le travail coopératif, l'expression libre et la participation active des élèves dans un but d'émancipation intellectuelle et sociale.
Grand blessé de la Première Guerre mondiale, prisonnier puis résistant lors de la seconde, Célestin Freinet adhère très vite aux idées des mouvements d'enseignement pacifiste du début du XXe siècle. Dès 1926, il fonde la Coopérative de l'enseignement laïc (CEL) qui sert de point de rassemblement aux éducateurs, de réservoir d'outils et de maison d'édition au mouvement. Célestin Freinet, militant syndical et politique, défend une pédagogie différente et populaire pour construire une société plus juste et plus humaine. En 1950, il définit son action comme : « [Une] lutte sur tous les terrains pour que s'améliorent et s'humanisent nos conditions de travail, les conditions de travail et de vie de nos enfants, [une] action hardie pour que les forces de réaction ne sabotent pas davantage, ne pervertissent ou ne détruisent les fleurs que nous tâchons de laisser éclore et s'épanouir, parce qu'elles portent la graine de notre bien le plus précieux : l'enfant ».
La femme de Célestin, Élise Freinet, sculptrice et peintre, participe à cette démarche pédagogique. Elle joue un rôle important dans le développement d'une éducation artistique libérée du carcan institutionnel. Elle amène l'idée d'« art enfantin » et fonde une revue du même nom, qui permet de compter le concept parmi les fondamentaux du mouvement.
En 1935, le couple Freinet ouvre une école privée « prolétarienne » à Vence. Ils la présentent comme un laboratoire où ils mettent en pratique leurs techniques d'éducation nouvelle, soutenues par un matériel spécifique et un travail sur les corps. D'ailleurs Élise Freinet – qui s'intéresse à la santé des enfants – y préconise le régime fruitarien, les baignades, les bains de soleil et le naturisme comme hygiène de vie quotidienne. Ils défendent surtout l'apprentissage par la méthode libre, c'est-à-dire l'expérimentation par les enfants, et ce, aussi bien pour le dessin que le calcul ou la lecture. Après la mise en pratique, ils rendent compte de leurs observations et des résultats de leurs tâtonnements pédagogiques dans des revues d'avant-garde. Les techniques présentées impliquent de nombreux changements au sein de la classe et de son organisation quotidienne : l'abolition de l'estrade, l'auto-correction, l'étude du milieu local, l'utilisation de l'imprimerie, de la radio ou du cinéma, la correspondance avec d'autres classes ou encore la création d'un journal scolaire. Ces principes et techniques sont alors repris et expérimentés par d'autres enseignants.
Car au sein de ce mouvement, les différents éducateurs entretiennent un réseau coopératif fort qui leur permet de partager outils et retours d'expérience, en France comme à l'étranger. Bien que l'école de Vence ait été fermée pendant la Seconde Guerre mondiale et certains adhérents de la CEL déportés, le réseau connaît un essor particulier à Libération. C'est à ce moment-là qu'est créé en 1948 – sur invitation de Célestin Freinet – l'Institut coopératif de l'École moderne (ICEM), centre de recherches et éditeur du mouvement. Ce n'est qu'en 1968, deux ans après la mort de Célestin Freinet, lors du congrès de Pau, que l'École moderne se dote d'une charte qui précise les aspirations pédagogiques, politiques et sociales du mouvement16.
Aujourd'hui, la pédagogie Freinet est toujours active à travers l'ICEM et les nombreux groupes de travail régionaux et nationaux qui la font perdurer, et même au sein de l'Éducation nationale qui, petit à petit, a intégré nombreux de ses principes éducatifs.
Après le rachat par l'État en 1991, l'École Freinet de Vence devient école publique, et en 2001, elle obtient le label « Patrimoine du XXe siècle » qui met en valeur le patrimoine architectural. La médiathèque de Vence possède un fonds Freinet très riche : documents personnels de la famille Freinet, correspondance, nombreuses revues de l'ICEM, travaux d'enfants, etc. Elle a d'ailleurs été renommée Médiathèque municipale Élise et Célestin Freinet en avril 2019.
Xavier et Riondet, « Élise Freinet : de l'expérience naturiste aux pratiques de l'École Freinet », in Recherches & éducations, 2013, pp.133-148.

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