Inventaire d'archives : 6 C - Fonds du tabellion d'Ancien Régime (1660-1798)
Contenu :
Le tabellion savoyard se différencie de l'enregistrement pratiqué en France par le fait qu'il ne se limite pas à une brève analyse des actes notariés, mais qu'il en enregistre le texte intégral avec authentification par la signature du notaire. Il comprend notamment des actes administratifs établis devant notaires mais non conservés dans les minutiers, ainsi que des actes judiciaires (tutelles, curatelles). Il ne s'agit donc pas d'un simple double des minutaires.
Les types d'actes sujets à l'insinuation sont nombreux : testaments non solennels, codicilles, donations à cause de mort, constitutions et restitutions de dots, échanges, divisions, cessions de biens immobiliers, transactions, accords, créances, pensions, ventes de biens féodaux, allodiaux, emphytéoses, donations en paiement, ratifications, crédits, loyers, constitutions de rentes et cens, prix-faits, créances, quittances, procurations et la plupart des écrits privés. Les actes faits par autorité de justice (tutelles, curatelles, émancipations, inventaires), que le Sénat avait exemptés d'insinuation en 1697, y sont à nouveau soumis par l'édit du 7 mai 1701. En 1770, les Royales Constitutions imposent que parmi les actes sous seing privé, seuls soient insinués ceux ne renfermant que des conventions pour lesquelles la forme privée est permise. Ne sont pas soumis à l'insinuation, certaines catégories d'actes qui sont pour la plupart enregistrées par d'autres organismes : il s'agit des actes du gouvernement et de la Chambre des comptes, des investitures, des reconnaissances du domaine royal, de la rénovation des biens féodaux et emphytéotiques de ce même domaine et des vassaux du roi, des actes des conseils des villes et des communautés, des testaments déposés au Sénat et des testaments olographes, des constitutions de mandataires ad litem et de certains actes judiciaires. L'édit de 1701 précise que les contrats enregistrés dans les greffes et les châtellenies sont dispensés de l'insinuation ainsi que les actes d'état de déclaration, de visite ou d'estimation de travail, sauf si les intéressés en font la demande.
Le tabellion est concrètement constitué de registres d'insinuation d'actes et de répertoires. Ces derniers sont soit placés en début du registre d'insinuation, soit à la fin, soit encore sont présents sous la forme de registres indépendants. Selon les bureaux et les millésimes, on observe que certains manquent ou non jamais été rédigés. Ces instruments de recherche ne sont pas un index des noms de personnes contractantes, de lieux ou de matières, mais des mentions sommaires des actes insinués avec renvois aux numéros de folios. Certains répertoires présentent un index des noms de notaires. Ces brèves analyses suivent l'ordre des enregistrements et ne correspondent donc pas à un ordre chronologique des actes.
Les transcriptions des actes et leur enregistrement ne sont pas effectués dans un souci global de présenter chronologiquement tous les actes du département d'insinuation. En effet, les notaires apportent individuellement au bureau d'insinuation un lot entier d'actes (ceux-ci n'étant par ailleurs pas toujours classés par ordre chronologique à l'origine), qui sont enregistrés consécutivement. On peut retrouver ainsi dans les registres un certain ordre chronologique, mais uniquement concernant une suite de transcriptions provenant d'un même notaire sur une plage temporelle restreinte.
Les notaires disposent d'un délai maximal de trois mois, réduit à 50 jours en 1770, pour apporter leurs actes à l'insinuateur. S'il est normal de constater que certains rédigés à la fin d'une année sont enregistrés au début de l'année suivante, on observe également des anomalies. D'une part, des oublis ou des pertes temporaires semblent expliquer que des actes aient été ajoutés en fin de reliure et insinués plusieurs années après la date de l'acte (exemple : un acte daté de 1717 qui aurait été ajouté au registre de 1717 bien qu'il ait été insinué en 1729). D'autre part, certains registres, dont un porte la mention " restats ", ne présentent presque aucune logique interne et sont composés d'actes établis et insinués à des dates très diverses. Certains actes correspondent à des folios lacunaires dans leurs registres de destination logique, mais ce n'est de loin pas la majorité. Cependant dans la très grande majorité des cas, les dates d'insinuation sont, elles, chronologiques au sein des registres. Le chercheur ne parvenant pas à trouver un acte précis doit consulter le registre des restats (6 C 1556).
L'intérêt du tabellion tant pour l'histoire économique, celle des mentalités, la généalogie est évident : étude des familles (contrats de mariages, testaments, partages, tutelles, donations...) ; vie des communes (bilans financiers annuels, biens communaux...) ; industries et entreprises (constitutions de sociétés, projets de moulins, de forges...).
Cote :
6 C 1-2127
Publication :
Archives départementales de la Haute-Savoie
2013, révisé en 2020
Annecy
Informations sur le producteur :
Origine:
Bureaux de l'insinuation
Le terme de tabellion désigne dans les États de Savoie des XVIIe et XVIIIe siècles l'ensemble des actes insinués et conservés dans les bureaux d'insinuation (c'est-à-dire d'enregistrement). Par extension, ce terme sert à nommer l'administration chargée de la transcription et de la conservation des actes retranscrits insinués.
Par l'édit du 28 avril 1610, le duc Charles Emmanuel Ier institue la formalité de l'insinuation pour tous les actes publics, contrats entre vifs et dispositions de dernière volonté.
Supprimés dès le 7 janvier 1626, les bureaux d'insinuation, de même que la perception des droits d'insinuation par l'administration des finances, sont rétablis sous Victor-Amédée Ier par les édits des 28 novembre 1696 et 4 septembre 1697.
L'insinuation vise à assurer la publicité et l'authenticité des actes émanant aussi bien de particuliers que de communautés d'habitants ou de corps divers, et ainsi garantir une certaine transparence par le biais d'un contrôle strict. Les actes publics passés devant notaire n'avaient aucune valeur, notamment judiciaire, s'ils n'étaient insinués.
Les notaires et autres officiers publics doivent remettre au bureau d'insinuation (tappa en italien) dont ils dépendent une copie intégrale de tous les instruments passés sous leur responsabilité. L'insinuateur, propriétaire de son office, est responsable de l'enregistrement des actes passés dans les communes de son ressort et de la conservation des archives du tabellion. Il est régulièrement inspecté par le conservateur du tabellion (un par chef-lieu de province) qui est un magistrat de la Royale chambre des comptes et dont les fonctions et les devoirs sont déterminés par des instructions du 29 août 1697. Le régime de visite de l'insinuation est fondé, stricto sensu, par les instructions de la Royale chambre des comptes du 2 septembre 1769. L'insinuateur pratique des visites régulières des bureaux d'insinuation et des études de notaires dépendant de son " département d'insinuation " et préside également depuis 1822 le collège des notaires de la province.
Concernant l'organisation de ces circonscriptions, c'est le 22 décembre 1696 que la Chambre des comptes enregistre l'édit du 28 novembre précédent et partage le duché en sept départements du tabellion, soit autant que de provinces dans le duché (les découpages suivent globalement les tracés provinciaux) : Savoie propre, Genevois, Faucigny, Chablais, bailliages de Ternier et de Gaillard, Maurienne, Tarentaise. Dans chacun de ces départements se trouvent un certain nombre de bureaux du tabellion : 13 pour la Savoie propre, huit pour le Genevois, sept pour le Faucigny, quatre pour le Chablais, un pour Ternier et Gaillard, quatre pour la Maurienne et trois pour la Tarentaise. Le ressort de chacun des 40 bureaux s'étend sur un nombre variable de communes ou paroisses.
L'institution du tabellion est remplacée, à partir du 1er nivôse an II (21 décembre 1793), par la régie de l'Enregistrement. L'insinuation savoisienne est encore pratiquée plusieurs années dans certains départements d'insinuation après 1793, tandis que l'Enregistrement français entre progressivement en application. À la Restauration sarde, le tabellion stricto sensu est rétabli par l'édit royal du 12 juillet 1814 et il fonctionne jusqu'en 1860 (Arch. dép. Haute-Savoie, 8 FS 1).
Informations sur l'acquisition :
Versements successifs aux Archives départementales de la Haute-Savoie
Historique de conservation :
L'édit du 7 mai 1701 prescrit la construction dans chaque bureau d'insinuation d'un bâtiment pour la conservation des archives du tabellion, qui devaient être placées dans une salle voûtée. Les Royales Constitutions de 1729 portent interdiction de laisser sortir les registres du tabellion. Elles rappellent l'obligation de tenir des répertoires portant de brèves notations des actes insinués et facilitant leur recherche. Chaque bureau doit également disposer d'une salle pour recevoir le public. La série C des Archives départementales de la Haute-Savoie contient des documents sur l'organisation des bureaux d'insinuation. Conservés par les greffes après 1860, les registres et répertoires du tabellion ont été versés aux Archives départementales de Haute-Savoie entre 1906 (pour les archives du tabellion du département d'insinuation d'Annecy) et 1922-1924 (Thonon, Bonneville et Saint-Julien). Concernant le département de Saint-Julien, les documents relatifs aux anciens bailliages de Ternier et de Gaillard sont conservés aux Archives d'État de Genève.
Description :
Mise en forme :
Les registres sont classés par province puis par bureau d'insinuation (par ordre alphabétique), et enfin dans l'ordre chronologique d'insinuation des actes. Toutes les références de dates données dans l'instrument de recherche sont par défaut des dates d'insinuation. Les actes n'ont pas été reliés suivant une procédure harmonisée : selon les bureaux et les années, le découpage des liasses varie. En début de période, la coupure est arbitraire, souvent en cours de mois. Pour faciliter la recherche d'actes dont la date précise est connue et limiter la manipulation des registres souvent volumineux, le quantième a été noté dans l'intitulé. Les répertoires ont été inventoriés par année.
Conditions d'accès :
Archives publiques
Les archives publiques sont, sous réserve des dispositions de l'article L213-2, librement communicables de plein droit (Code du patrimoine, article L213-1).
L'entrée aux archives publiques des documents communicables ne fait pas obstacle au droit à communication desdits documents.
Des dérogations sont susceptibles d'être accordées sous réserve en particulier que le chercheur motive sa demande et signe l'engagement de ne pas nuire au domaine de la vie privée des individus. Les demandes motivées sont à remettre au directeur des Archives départementales de Haute-Savoie qui, après avoir demandé l'avis au producteur des archives, les transmet avec les deux avis au service interministériel des Archives de France. Celui-ci informe directement le chercheur de sa décision.
Conditions d'utilisation :
La reproduction des documents est soumise à l'autorisation des Archives départementales de la Haute-Savoie. En cas de reproduction d'une ou plusieurs pièces, il conviendra de faire apparaître le nom du service dépositaire et la cote du ou des document(s). En cas de réutilisation avec diffusion publique, une licence de réutilisation doit être signée.
Langues :
Langue des unités documentaires: Français. Une minorité d'actes sont rédigés en italien.
Description physique :
Description physique: Registres reliés
Document d'archives
Document d'archives
Nombre d'éléments
Nombre d'éléments: 2134 volumes
Métrage linéaire
Métrage linéaire: 225,10
Ressources complémentaires :
Références bibliographiques :
Ouvrages conservés aux Archives départementales de la Haute-Savoie :
CHETAIL, Joannès. Insinuation et tabellion dans l'ancienne Savoie. In Actes du quatre-vingt-cinquième congrès national des Sociétés savantes. Paris : Congrès national des Sociétés savantes : 1961, p. 491-516 [cote LIVRES 3325]
VERDO, Rémy. " Les attributions des intendants sardes en Savoie au XVIIIe siècle " in Revue historique de droit français et étranger, octobre-décembre 2012, n°4, p. 517-548 [cote Br 6038]
MARIOTTE, Jean-Yves et GABION, Robert. Guide des archives de la Haute-Savoie. Annecy : Archives départementales de la Haute-Savoie, 1976. 492 p. [cote IR 187]
PERRET, André. Guide des archives de la Savoie. Chambéry : Archives départementales de la Savoie, 1979, 663 p. [cote IRE 73]
NICOLAS, Jean. La Savoie au XVIIIe siècle. Noblesse et bourgeoisie. Paris : Maloine, 1978, 2 vol., 1244 p. [cotes Us 248-249]
Organisme responsable de l'accès intellectuel :
Organisme responsable de l’accès intellectuel: Les Archives départementales de la Haute-Savoie sont responsables de l'accès intellectuel aux archives.
Identifiant de l'inventaire d'archives :
FRAD074_000000302