ARCHIVES PRIVEES PERSONNELLES ET FAMILIALES

Figure intéressante que celle d'A. Gony (1893-1979), Grenoblois très attaché à sa ville, assez représentatif de ces techniciens isérois issus des premières écoles techniques de la IIIème République (Ecole Vaucanson, à Grenoble ; Ecole nationale professionnelle, à Voiron) dont la promotion sociale fut intimement liée au dynamisme industriel grenoblois.

Né de parents ardéchois et dauphinois de souche paysanne, A. Gony passa son enfance dans le quartier populaire du cours Berriat et fit ses études à l'école Vaucanson. A la sortie de celle-ci, en 1910, il entra comme ajusteur chez Neyret-Beylier puis travailla à Paris, de 1912 à 1920, comme dessinateur et contrôleur de montage chez Thomson-Houston. Mais la grande date de sa vie est 1921, celle de son entrée aux Etablissement Merlin et Gérin auxquels il resta fidèle jusqu'à la retraite, en 1959.

A travers les écrits d'A. Gony on découvre un esprit original, libre, un peu autodidacte, un technicien humaniste soucieux du devenir de l'homme et de la société, résolument optimiste, avec un brin de naïveté sympathique (cf. ses Réflexions sur l'esprit humain, 48 J 13, ses Réflexions philosophiques, 48 J 12). Mais c'est le témoignage sur les choses vues qui donnent le plus d'intérêt à ces écrits : scènes de la vie paysanne, avant 1914, dans l'Isère, à l'Albenc et à Iseron, ainsi qu'en Ardèche, à Joyeuse, scolarité à l'école Vaucanson, travail et loisirs d'un provincial « monté » à Paris etc…Toutefois son sujet de prédilection tourne autour de Merlin et Gérin, ses « chers patrons » pour lesquels il voua une véritable vénération et n'hésita pas à écrire un « plaidoyer en faveur de l'entreprise Merlin-Gerin sur son action sociale » (48 J 7) . Il y a là des pages instructives sur ce qu'il est convenu d'appeler l'esprit « maison » d'une grosse société et les délicats rapports cadres-ouvriers au sein de celle-ci. Si le récit d'A.Gony n'est pas exempt d'erreurs de mémoire (Sécurité sociale, par exemple, citée comme un acquis de 1936) on suivra également avec intérêt son itinéraire politique et syndical : admirateur de Jean Jaurès, adhérent dès 1913, à Paris, à la C.G.T. et au parti socialiste, représentant du syndicat des cadres C.G.T. au comité d'entreprise Merlin-Gérin après 1945, partisan résolu de l' « intégration de l'ouvrier à l'entreprise », dissident de la C.G.T. en 1956, à la suite des évènements de Budapest, et fondateur, à la même date, de la section F.O. chez Merlin-Gérin.