Inventaire d'archives : Intérieur ; Police. État sommaire des versements d'archives couvrant la période 1791-1855 (sous-série F/7)

Contenu :

I. LES BUREAUX
Entre juillet 1789 et nivôse an IV, époque à laquelle fut créé un ministère spécial dit de la Police générale, les affaires de police furent, successivement, dans les attributions :
1° des Secrétaires d'État (Maison du Roi, Guerre), qui avaient chacun dans son département un certain nombre de provinces ;
2° du ministère de l'Intérieur, dès sa création en août 1790 ;
3° de la "commission des administrations civiles, police et tribunaux" qui, à partir du 12 germinal an II et jusqu'au 10 vendémiaire an IV, hérita d'une partie des attributions du ministère de l'Intérieur supprimé ;
4° du Comité de Sûreté générale qui participa directement au pouvoir exécutif en prenant parmi ses attributions essentielles la Police générale de la République ;
5° du Comité de Salut public qui eut une section de Police, réunie en messidor an II au Comité de Sûreté générale.
La loi du 12 nivôse an IV (2 janvier 1796) créa un ministère de la Police générale de la République. D'abord confié à des personnages sans importance - neuf ministres en quatre ans - ce ministère devint un des grands rouages de la politique dès que Fouché en fut devenu titulaire à partir du 2 thermidor au VII. A la chute de Fouché, le 28 fructidor an X (15 septembre 1802), le ministère fut supprimé et ses attributions furent réunies à celles du ministère de la Justice. Mais il fut rétabli le 21 messidor an XII (16 juillet 1804) quand Fouché rentra en grâce. Il a duré jusqu'à la fin de l'Empire.
L'organisation donnée par Fouché au Ministère, en l'an XII, est utile à connaître pour l'intelligence de ses archives. Les départements de l'Empire étaient répartis entre trois arrondissements de police, confiés à trois conseillers d'État. Le premier, à la tête duquel était Réal, comprenait le Nord, l'Ouest et l'Est, cinquante départements ; le second, confié à Pelet de la Lozère, comprenait le Midi et une petite partie de l'Est ; le troisième, dont était chargé Dubois, c'étaient Paris et sa banlieue. (De 1804 à 1806 il y eut quatre arrondissements. Plus tard, on en créa de nouveau un quatrième. Cette division géographique rappelle les quatre "régions" du Comité de Sûreté générale (voir AF/II/*/284 et 286, organisation du Comité en brumaire et en germinal an II), et la répartition des départements entre les bureaux du ministère de l'Intérieur à sa création. Ainsi se maintenait la tradition, antérieure à 1789, de la distribution géographique du travail administratif.
Les bureaux du ministère, placés au-dessous du secrétariat général et à côté du bureau des journaux, étaient répartis entre dix divisions, dont l'une, la plus importante, dite de "Sûreté générale et de police secrète", était dirigée par Desmarest, "la troisième puissance du quai Voltaire après Fouché et Réal".
Une ordonnance royale du 16 mai 1814 supprima à nouveau le ministère de la Police générale en réunissant sous le titre de "Direction générale de la Police du Royaume" le ministère et la Préfecture de Police. Beugnot fut le premier titulaire de cette direction.
Rétabli par décret impérial du 20 mars 1815, le ministère de la Police fut, une troisième fois, supprimé par ordonnance royale du 29 décembre 1818. Ses attributions échurent alors au ministère de l'Intérieur.
A partir de 1818, la Police a été tantôt une direction spéciale, tantôt une simple division, tantôt un bureau de l'administration départementale au ministère de l'Intérieur (29 décembre 1818 : 5e division ; 21 février 1820 : division de la Police à la direction générale de l'Administration départementale et de la Police ; 9 janvier 1822 : direction ; 6 et 16 janvier 1828 : division du cabinet du Ministre ; 16 décembre 1829 : division de la direction du Personnel et de la Police ; 21 août 1830 : cabinet ; 17 mars 1831 : division ; 5 mars 1837 : direction ; 5 décembre 1844 : division ; 6 juillet 1848 : division ; 21 Août 1851 : division de la Sûreté générale).
Il en fut ainsi jusqu'au 22 janvier 1852. A cette date on recréa un ministère de la Police générale qui ne dura que jusqu'au mois de juin de l'année suivante. (Le territoire de l'Empire fut, comme au temps de Fouché, divisé en trois "arrondissements"). Le 21 juin 1853 la police politique redevint une direction de l'Intérieur. Mais, en raison de conflits incessants, le décret du 30 novembre 1859 supprima cette direction (la Sûreté générale) et en confia les attributions au Préfet de Police qui devint ainsi un vrai ministre de la Police (21 juin 1853 : direction de la Sûreté générale ; août 1854 : direction générale de la Sûreté publique ; 24 juin 1857 : direction ; 5 juillet 1858 : division ; 30 novembre 1859 : direction générale de la Sûreté publique ; 18 novembre 1871 : direction de la Sùreté générale ; 17 février 1874 : direction de la Sûreté publique).
Ce n'est qu'en 1876 que la Sûreté générale, enlevée au Préfet de Police, est redevenue une direction de l'Intérieur. Ce régime dure encore.
De 1789 à nos jours, ces ministères, commissions et comités ont occupé les locaux suivants : La Maison du Roi fut installée au Louvre et le Secrétariat de la Guerre rue Grange-Batelière ; le premier ministère de l'Intérieur eut ses bureaux rue des Petits-Champs ; la "Commission des administrations civiles, police et tribunaux" fonctionna Place des Piques [Vendôme], dans les locaux de la Chancellerie actuelle ; le Comité de Sûreté générale occupait la maison de Brionne au Petit Carrousel ; le Comité de Salut public était au Pavillon de l'Égalité, Palais des Tuileries.
Le ministère de la Police fut installé dans l'hôtel Juigné au quai Voltaire ; les services qui lui succédèrent, direction, division, etc., passèrent successivement du quai Malaquais (1819-1821) à la rue de Grenelle, n° 122 (1821), au 101 de la même rue (1822), puis au 116 (1823) ; de là, rue Hillerin-Bertin, n° 10, entre la rue de Grenelle et la rue de Varenne (1846) ; rue de Varenne, 78, et rue de Bellechasse, 66 (1852), rue de Jérusalem (1854), rue des Saussaies (1876).
II. LES ARCHIVES
ÉLIMINATIONS ET TRIAGES
On n'a pas conservé tous les papiers de tous les services dont a hérité le ministère de la Police ni tous les dossiers de ce ministère et de ses héritiers. Il serait extraordinaire qu'une administration où beaucoup de dossiers personnels ont un grand intérêt pour les familles, qui a traversé plusieurs changements de régime et a maintes fois déménagé, eût conservé ses papiers intacts.
De la période antérieure à la Convention il est arrivé peu de dossiers dans les archives de la Police générale : quelques liasses de la Maison du Roi, du Secrétariat de la Guerre et du Ministère de l'Intérieur pour les années 1789-1792. Elles forment aujourd'hui la tête d'une série départementale dite de "Statistique personnelle et morale" (F/7/3645-3700) ; c'est la série qu'a consultée plus particulièrement Taine pour ses . La Commission des administrations civiles, police et tribunaux a donné ses papiers au Ministère de la Justice et ce qui s'y était conservé est aujourd'hui dans la série BB des Archives nationales. Origines de la France contemporaine
En revanche, le Comité de Sûreté générale a transmis au ministère de la Police une grande quantité de documents pour la période conventionnelle : dès le 21 nivôse an IV, quelques jours après la création du Ministère, le Directoire prenait un arrêté ordonnant au nouveau Ministre de faire transporter des mansardes de l'hôtel Brionne en son hôtel au quai Voltaire les papiers du ci-devant Comité de Sûreté générale, "en ayant bien soin de les surveiller particulièrement " (AF III, plaquette 1509).
Seuls les registres d'arrestations, de mises en liberté, de mandats d'arrêts, de correspondance furent exceptés de la mesure : dès le 24 frimaire an IV ils avaient été remis au Directoire qui en avait besoin dans ses bureaux. L'archiviste adjoint du Directoire signa le reçu de ces 36 registres à lui versés par Chevrières, archiviste du Comité de sûreté générale (voir répertoire 639, pièce annexe provenant de F/7/4347). Ainsi s'explique leur présence, de nos jours, dans les papiers de la Secrétairerie d'État (AF III).
Ce que renfermaient les archives du Comité de Sûreté générale au moment de leur transfert au Ministère de la Police figure dans le rapport présenté au ministre le 17 nivôse an IV par le sieur Chevrières, archiviste du Comité. Chevrières, auteur de l'ouvrage suivant : . (Paris, 1775), avait été nommé archiviste du Comité de Sûreté générale au moment de la réorganisation des bureaux en germinal an II. Il passa, avec ses archives, au Ministère de la Police. Son rapport dans F/7/4343, dossier 43 nous l'apprend en ces termes : Le nouvel archiviste, contenant une nouvelle méthode de ranger un chartrier dont l'ordre chronologique est la base
Le dépôt des archives du Comité de Sûreté générale est immense ; il renferme plus d'un million de pièces, contenues dans environ cinq ou six mille cartons [dans une autre copie de ce même rapport il est dit : « plus de 800.000 pièces contenues dans environ 3.000 cartons » (Répertoire 639, pièce annexe)]. Cette quantité considérable de pièces est de deux espèces : l'une concerne les affaires particulières et individuelles, et l'autre les objets généraux ou autorités constituées.
1 ère PARTIE : Affaires individuelles.
Cette première partie, composée des deux tiers de la totalité, comprend les pièces ayant rapport aux arrestations, dénonciations et mises en liberté des divers individus qui étaient renfermés dans les maisons d'arrêt de la République. De ces pièces, plus de la moitié est absolument inutile et demanderait à être supprimée ; telles sont les innombrables pétitions qui restaient sans réponse, les motifs d'arrestations, les tableaux formés par les Comités révolutionnaires, les dénonciations vagues et souvent insignifiantes, etc. Mais le choix de ces pièces exige un travail pour en faire le triage, car autant il est nécessaire d'en retrancher les inutiles, autant il serait dangereux de confondre les pièces utiles qui appartiennent aux citoyens mis en liberté ; de ce nombre sont les certificats de résidence et de civisme, attestations de conduite, transports, extraits de baptême, titres de famille, billets, quittances et autres qui sont parvenus au Comité soit comme ayant été saisis chez eux lors de l'apposition des scellés sur leurs papiers, soit comme ayant été produits par les individus pour leur justification. Le résidu de cette première partie, après en avoir élagué ce qui est inutile, deviendra beaucoup moins considérable et l'arrangement plus facile.
2e PARTIE : Objets généraux. Autorités constituées.
L'objet de cette seconde partie comprend les correspondances des diverses autorités constituées, comme départements, districts, municipalités, comités de surveillance, etc., les comptes décadaires, enfin tout ce qui a rapport à l'esprit public et à la police générale de la République. Quoique la plus grande partie de ces comptes décadaires et correspondances soit inutile, ne contenant rien d'intéressant, on croit qu'il serait à propos d'en garder une ou deux années avant de les supprimer, car telle correspondance paraît peu intéressante aujourd'hui qui dans quelque temps le pourrait devenir, soit pour servir de pièce de comparaison ou même pour prouver qu'à telle époque le rapport ne contenait rien. Il est donc à propos de subdiviser cette partie en deux, l'une pour les pièces qui contiennent des objets intéressants, l'autre pour celles qui ne le paraîtront pas. Outre ces deux espèces de pièces, les archives du Comité de sûreté générale renferment encore : 1° beaucoup d'objets intéressants pour l'histoire que l'on a divisé et subdivisé autant qu'il a été possible, mais le peu de temps que l'on avait et l'immensité des pièces qui sont survenues n'ont pas permis que ce travail fût parfait. C'est pour ainsi dire comme une mine de difficile exploitation ; ce n'est qu'après un travail long que l'on peut extraire les matériaux précieux que ce dépôt renferme ; 2° une grande quantité de lettres interceptées adressées à divers particuliers et renvoyées au Comité par diverses autorités constituées ou administrations des postes sans être ouvertes pour la plupart. La justice semble dicter de rendre ces lettres après en avoir fait examen devant les parties ou leurs fonds de pouvoirs...
Avant leur transfert à l'hôtel Juigné, les archives du Comité de Sûreté générale avaient été diminuées par des restitutions de pièces. «Des citoyens mis en liberté, ou autres, viennent réclamer des pièces qui avaient été déposées au Comité de Sûreté générale pour leur justification ou qui avaient été saisies chez eux. Le Comité avait autorisé son archiviste à faire la remise de ces pièces lorsqu'elles étaient à décharge» (Notes de Chevrières, dans F/7/4347, Répertoire 639). En revanche, on avait introduit quelques pièces fausses dans des dossiers ; Chevrières demanda un jour au ministre de la Police de lui accorder une audience à ce sujet : « croyant tenir un bout du fil qui conduit ce mystère d'iniquité », il s'offrait à faire connaître les coupables (F/7/4235/A, dossier 7. Lettre au Ministre de la Police à propos d'une demande particulière, an V).
Dans quelle mesure les archives furent-elles, au ministère, triées et épurées suivant les principes préconisés par leur archiviste ? Il est impossible de le savoir. Le seul renseignement précis que nous possédions est fourni par un rapport, non signé, écrit le 12 août 1808, dont il faut reproduire ici l'essentiel :
Les Archives étaient encombrées de papiers inutiles. Il était nécessaire d'en faire le triage d'après des bases fixes et approuvées. Tout ce qui tient à l'historique de la Révolution, à l'intérêt des familles et des particuliers, tout ce qui caractérise des hommes turbulents et dangereux, devait être conservé. Mais l'heureuse révolution du 18 brumaire an VIII, la publication et l'établissement du Concordat, l'amnistie générale accordée aux émigrés, ont rendu inutile ou insignifiant tout ce qui ne dépendait que d'un gouvernement, de lois et de circonstances qui n'existent plus [en appliquant rigoureusement cette théorie, on détruirait les archives à chaque changement de régime. Il est clair que l'auteur du Mémoire ne se plaçait pas au point de vue historique] ; on a donc dû mettre au rebut les papiers de cette dernière classe. Dans la crainte cependant de commettre quelques méprises, on a conservé même ceux dont l'inutilité pouvait être douteuse.
On a commencé le travail par l'examen des lettres interceptées depuis l'an IV (1795) jusqu'à l'an VIII (1800), contenues dans 196 cartons. Ces lettres renfermaient la correspondance des émigrés et prêtres déportés avec leur famille et leurs amis de l'intérieur. Un grand nombre avaient déjà été déclarées inutiles et on lisait sur les liasses : "insignifiant", "rien à faire", "rebut" ; d'autres, et c'était le plus grand nombre, ne contenaient qu'une correspondance innocente en soi, mais alors défendue par la loi. Quelques-unes avaient donné lieu à un travail dans les bureaux dont le résultat était la justification ou la mise en liberté des individus inculpés. On a supprimé toutes les lettres de cette espèce aussi bien que les lettres d'envoi des commissaires du Directoire exécutif dans les départements, les procès-verbaux de l'ouverture et de l'examen de ces lettres dans les bureaux de poste et les interrogatoires des personnes à qui ces lettres étaient adressées. Mais toutes les lettres qui avaient donné lieu à un travail dans les bureaux des ministères et dont l'examen inculpait gravement les personnes qui les avaient écrites ou à qui elles étaient adressées ont été conservées dans les archives. C'est ainsi que 196 cartons contenant plus de 40.000 lettres se sont réduits à une vingtaine qui n'en contiennent que quelques cents...
(F/7/4343, dossier 43). Il est évident que toutes les lettres ci-dessus ne peuvent, depuis le 18 brumaire, l'amnistie et le Concordat, être imputées à crime à ceux qui les ont écrites. On pouvait donc les supprimer et mettre au rebut. On y a mis de même des lettres de commerce anglaises, allemandes, italiennes et espagnoles qui ne pouvaient servir à rien dans les archives où elles étaient depuis dix à douze ans
D'autre part, de l'aveu même de Fouché, on procédait, chaque année, à des destructions régulières ; on supprimait annuellement environ 200 cartons de "lettres injurieuses, de calomnies, de faux rapports, de mensonges de tout genre..." (L. Madelin, t. I (Paris, 1895), p. 518). Plus tard, on détruisit des séries entières de documents importants pour ne pas laisser tomber entre les mains des Alliés des papiers compromettants : Fouché,
Tous les travaux qui présentaient l'ensemble des intrigues de la chouannerie, des diverses agences de l'Angleterre et des Bourbons (à l'intérieur et à l'étranger), des nombreux complots tramés contre le chef de l'État, etc., tous ces travaux, résultat de quinze ans de soins assidus, ont été anéantis par ordre lorsque l'ennemi menaçait la capitale. L'on a aussi livré aux flammes un immense travail sur l'extérieur, particulièrement sur les associations secrètes de l'Allemagne et du nord de l'Europe d'où sont sortis plusieurs fanatiques qui, à Vienne et à Paris, ont deux fois attenté à la vie de l'Empereur. Ce dernier travail formait la case de la surveillance des étrangers. Enfin, l'on a mutilé, à la même époque et pour les mêmes motifs, une infinité d'affaires particulières, toutes d'un intérêt majeur, qui seraient entièrement perdues pour la Police générale sans les inventaires qui peuvent seuls suppléer aux pièces détruites... (Note de Simon Duplay, fonctionnaire de la Police, citée par L. Grasilier dans sa brochure sur (Paris, 1913). M. Grasilier, qui a longtemps pratiqué les fonds de F/7, m'a donné des indications dont je lui suis reconnaissant). Simon Duplay, 1774-1827
Quand le ministère de la Police eut été supprimé en 1818, les bureaux furent transférés au ministère de l'Intérieur ; mais les archives, logées dans un immeuble de la rue des Saints-Pères, dépendance de l'hôtel Juigné, furent laissées à la garde de trois inspecteurs ; il arriva que ces "gardiens" infidèles vendirent une partie des papiers qu'ils étaient chargés de conserver aux commerçants du quartier.
Il y eut aussi, pendant la Restauration, des restitutions : dès 1814, le duc d'Orléans avait été autorisé à retirer des archives et dépôts publics tous les titres concernant sa famille : on les lui remit en 1824 ; la même année, on restitua au Roi les papiers saisis aux Tuileries.
C'est à partir de cette même année 1824 que le directeur général de la Police, Franchet d'Esperey, plus "libéral" que ses prédécesseurs (le comte de Sabran lui écrit le 10 mars 1824 pour le remercier d'une restitution de papiers : « Je suis fort sensible au soin que vous en prenez et qui assurément vous distingue de vos prédécesseurs » (F/7/4347), rendit à plusieurs familles leurs papiers ; au duc de Bourbon, par exemple, il fit restituer les archives de la maison de Condé, saisies à Chantilly et versées au Comité de Sûreté générale pendant la Révolution. Il semble qu'il en fit détruire beaucoup d'autres, car une note de sa main porte la "consigne" suivante, donnée à l'archiviste Lecomte : « Dès que ce ne sont pas des papiers de famille, il faut les comprendre dans les papiers à brûler » (F/7/4347. "Carton des restitutions". On y voit, par exemple, que les papiers en allemand, saisis chez les frères Frey, furent détruits).
Comment expliquer, enfin, les lacunes énormes que nous constatons pour les périodes de la Monarchie de Juillet, de la Seconde République et du Second Empire ? Pourquoi, après la fin de la Restauration, les archives de la Police, encore si abondantes jusque-là, sont-elles presque inexistantes ? On dit généralement que c'est l'incendie de la Préfecture de Police, allumé par la Commune, qui a consommé la perte des papiers de la Police générale de 1830 à 1870. Cette affirmation est exacte, mais en partie seulement. En effet, pendant le Second Empire, lors des nombreux déménagements du service, des fonctionnaires indifférents aux intérêts de l'histoire avaient plus d'une fois fait mettre au pilon des masses de documents qu'ils jugeaient «encombrants» ; et cette pratique a certainement continué, après 1871, même après 1876, depuis l'installation dans l'immeuble de la rue des Saussaies. (Voir plus loin, III. VERSEMENTS).
CLASSEMENTS ET INVENTAIRES
Les papiers de la police ont été l'objet de classements considérables, d'abord au Comité de Sûreté générale, puis aux Ministères de la Police et de l'Intérieur.
Les séries d'un usage courant furent classées avec soin, sur fiches, pour les besoins du service, par ordre alphabétique : arrestations, émigrés, dossiers politiques.
F/7/2200/299-313 : Série dite Archives F/7/4216-4385/2
F/7/2114-2156 : B. P. (an V-an XIV) F/7/6139-6464. Séries 2-3 (an XIV-1814), F/7/6465-6622.
F/7/2157 : Division Morin (juillet 1814-17 mars 1815), F/7/6623-6624.
F/7/2158-2160 : Division Desmarets (27 mars-juillet 1815), F/7/6625-6629.
F/7/2200/314-320 : Affaires politiques [Duplay] (1814-1830), F/7/6636-6677.
F/7/2161-2200/32 : Affaires politiques [P. P.] (1815-1830), F/7/6678-6997.
F/7/2200/286 : O. G. [Objets généraux] (1814-1830), F/7/9747-9823.
Mais, en dehors de ces séries, il semble qu'un grand désordre ait régné. Beaucoup de liasses qui ont été versées aux Archives portaient, lors de leur arrivée dans cet établissement, les mentions "A détruire" ou "Dans un désordre complet"( voir le répertoire de N. de Wailly et de Gorré (n° 633 des Inventaires des Archives nationales), dont la seconde était parfaitement justifiée.
Lettres de série.
Cependant les dossiers et les répertoires anciens des archives de la police sur fiches ou sur registres portent pour la plupart, surtout pour la période antérieure à 1830, l'indication de lettres de série accompagnées de chiffres en exposant. Ces lettres et ces chiffres ont été inscrits jadis pour la commodité des recherches dans le Service. Il paraît utile d'énumérer ici les catégories de dossiers ainsi réparties maintenant entre ces différentes lettres.
A "Affaires administratives" (1819-1823) : F/7/959-961/1-4, F/7/9340-9441.
A "Affaires administratives" (1824-1830) : F/7/9442-9584, F/7/9585-9610. 2
A Suicides (1831-1838) : F/7/9729-9730. 3
A Mouvement des étrangers (1830-1837) : F/7/11976-11980. 3
B "Affaires diverses" (17 nivôse-28 germinal an IV) : F/7/7090-7129.
B "Affaires diverses" (28 germinal-26 fructidor an IV) : F/7/7130-7185. 2
B "Affaires diverses" (26 fructidor an IV-13 messidor and V) : F/7/7186-7266. 3
B "Affaires diverses" (13 messidor an V-2 nivôse an VI) : F/7/7267-7359. 4
B "Affaires diverses" (2 nivôse-6 thermidor an VI) : F/7/7360-7473. 5
B "Affaires diverses" (17 thermidor an VI-19 frimaire an VII) : F/7/7474-7513. 6
B. P Affaires politiques [Bureau particulier] (an V- an XIV) : F/7/6139-6464, F/7/6607-6612, F/7/6620.
E Affaires d'Espagne (1822-1830) : F/7/11981-12075.
E. R Espagnols réfugiés (1831-1835) : F/7/12076-12111.
F. É Forçats évadés (1815-1844) : F/7/10226-10237.
G 2e arrondissement primitif (an XII-1806) : F/7/8704-8724.
K à K Passeports (an XI-1813) : F/7/10868-11072. 17
M 2e arrondissement primitif [Miot]. Se rapporte à la même série que G : F/7/8704-8724.
O. G Affaires administratives ; objets généraux (1814-1830) : F/7/9747-9823.
P., P , P 2e arrondissement [Pelet de la Lozère] (an XII-1814) : F/7/8397-8703, F/7/8725-8790. 23
P. P Affaires politiques [Police politique] (1814-1830) : F/7/6678-6997.
P à P Résidences (an IV-an XI) : F/7/3314-3327, F/7/10761-10867. 14
R Affaires diverses (an VII-an VIII) : F/7/7514-7674. 1
R, R , R 1er arrondissement [Réal] (an XII-1814) : F/7/8031-8396. 23
S Affaires politiques (1805-1814) : F/7/6613-6619.
S à S Affaires diverses (brumaire an VIII-frimaire an XI) : F/7/7685-8007. 26
III. LES VERSEMENTS AUX ARCHIVES NATIONALES
Ce n'est pas suivant un plan d'ensemble et méthodiquement que les papiers de la police ont été versés aux Archives nationales.
« En 1829, l'exiguité des locaux des archives de la police au ministère de l'Intérieur détermina l'envoi aux Archives du Royaume d'un nombre considérable de dossiers. Ces documents furent déposés provisoirement dans une salle. Un employé du Ministère de l'Intérieur venait faire les recherches et empruntait les dossiers » (, au Secrétariat des Archives, bulletin n° 4323 D). Ce premier versement provisoire porta sur 3.459 cartons ou liasses et 560 registres qui devaient être rendus au ministère dès qu'un local convenable y aurait été réservé aux archives de la police. De provisoire, le dépôt devint définitif, mais pendant longtemps, jusqu'en 1864, le ministère garda les répertoires qui lui servaient à demander les dossiers dont il avait besoin (Rapport de N. de Wailly, février 1850 (AB XIV, n° 1). Bulletin du Ministère de l'Intérieur
Après 1830, les versements de la Police, tantôt direction, tantôt division, continuèrent, mais à la débandade, et toujours afin de «faire de la place quand on n'en avait plus pour emmagasiner les paperasses nouvelles ; il faut les énumérer ici dans leur ordre chronologique en indiquant les séries les plus importantes que comporta chacun d'eux :
- Mars 1831 Bulletins de Police, etc..
- 10 novembre 1831 Premier arrondissement, etc.
- 24-29 août 1840 Comité de Sûreté générale ; arrondissements de Police.
- Octobre 1840 Affaires politiques (an IV-1814) ; émigrés ; affaires administratives de la Restauration.
- 28-30 septembre 1841. Police politique de la Restauration.
- 12 juillet 1842 Radiation des émigrés.
- 23 janvier 1845 Sections de Paris.
- 4 mars 1846 Correspondance administrative de la Restauration.
- 5 juillet 1847 Série dite "Archives".
- 20 juin 1848 Importations d'armes, etc.
- 30 avril 1849. Personnel de la Police.
- Juillet 1860 Jugements militaires.
- 26 avril 1864 Fiches de recherche.
En 1864, les 12.169 premiers articles de F/7, presque tous antérieurs à 1830, étaient aux Archives nationales. Mais le service était encore en possession, en même temps que de ses archives récentes, d'une quantité de papiers anciens, complémentaires de ceux qui avaient été versés, et qui, eux, ne l'avaient pas été pour des motifs dont il est impossible de rendre compte en raison.
Les papiers anciens de la Police, complémentaires de ceux qui constituaient aux Archives nationales la série F/7 en 1864 - et en 1870 la situation n'avait pas changé - se trouvaient alors à la Préfecture de Police, dans l'île de la Cité. C'est là qu'ils ont péri en très grande partie pendant la Commune et que ce qui en reste est conservé maintenant.
Le 4 janvier 1871, pendant le bombardement de Paris, le préfet Cresson fit descendre dans les caves de la préfecture les liasses considérées comme les plus précieuses ; c'est ce qui les a sauvées des incendies de la Commune, où disparut tout le reste. Ont ainsi disparu : 80 registres des ordres du roi, 30 ou 40 registres contenant la correspondance des lieutenants généraux de police ; 300 cartons environ de dossiers relatifs aux prisonniers par lettres de cachet ; 80 cartons de pièces de théâtre soumises à la censure et d'écrits saisis sur la voie publique ; 80 environ d'édits, lettres patentes, ordonnances, arrêts, etc. ; 2 cartons sur l'Affaire du Collier ; et enfin des milliers de registres et de cartons relatifs aux prisons, aux marchés, à la navigation, aux monuments, aux cimetières, aux emprisonnements de la période révolutionnaire, aux comités révolutionnaires, aux journées du 10 Août 1792, de septembre, du 9 thermidor, aux insurrections de l'an III, etc. C'est, en somme, la majeure partie des archives qui a été anéantie ( t. I, p. 420). L'état sommaire des documents ainsi mise l'abri, qui sont encore aujourd'hui (1922) à la Préfecture de Police, a été publié dans les t. 1 (1889-1890), p. 419-422, et, avec plus d'exactitude, par H. Stein, dans le , t. II (1898), p. 56-62. (...)Archives historiques, artistiques et littéraires, Archives historiques, artistiques et littéraires, Bibliographe moderne
Depuis 1870, les versements du Service des papiers de police aux Archives nationales ont été fort espacés, de médiocre importance, et faits, jusqu'au dernier exclusivement, de la même manière hasardeuse que les précédents : en 1876, 1879, 1880, 1883, 1884, 1905 et 1908.
- 1876 : Surveillance légale, importation d'armes, affaires de la reine d'Étrurie et de la duchesse de Berry.
- 1879 : Sociétés, jeux, cercles, loteries.
- 1880 : Affaires du Faux Dauphin, passeports.
- 1883 : Dossiers dits de "Police générale" (1851-1852).
- 1884 : "Affaires diverses" (an III-1836), passeports, jeux, fonds secrets.
- 1905 : Registres des inculpés de l'insurrection de juin 1848 et des condamnés des Commissions mixtes (1851).
- 1908 : Congrégations religieuses (1880-1901).
Ces versements forment aujourd'hui les articles 12170 à 12329/2. Les articles 12330-12356 sont des liasses qui ont été retirées de la série F/20, lors du classement de cette série.
En 1917, le ministère de l'Intérieur envoya d'office aux Archives quelques mètres cubes de documents divers, trouvés dans des réduits dont il voulait disposer. Dans ces résidus se sont trouvés des documents à ajouter à plusieurs séries constituées de la série F (voir notamment supplément à l'état sommaire de la série F/1). Il s'y en est trouvé aussi, dont la place était dans F/7 : dépêches officielles et affaires politiques, 1851-1894, qui forment aujourd'hui les articles 12615-12709. Les articles 12357-12411, ajoutés à F/7 en 1920, proviennent des 2e et 4e bureaux de la Sûreté générale. Mais ils n'ont pas été versés par ce Service. Ils ont été trouvés, en rassemblant, les archives de l'Administration des Cultes, par M. Bourgin, archiviste aux Archives nationales, dans des résidus restés rue de Bellechasse. Communiqués jadis aux Cultes par la Sûreté, ils y avaient été laissés et oubliés.
Quant au dernier versement (F/7/12412-12653), il a été effectué dans les circonstances suivantes. M. Langlois, directeur des Archives, avait, en 1917, essayé d'obtenir qu'il lui fût permis de constater l'état des papiers périmés de la rue des Saussaies. On avait alors répondu : "Nous n'avons plus rien que ce qui a trait aux affaires courantes". Ce qui paraissait très improbable. Trois ans plus tard, la Direction des Archives revint à la charge et, grâce à l'intervention personnelle de M Honnorat, ministre de l'Instruction publique, ce qui avait été demandé inutilement en 1917 fut accordé sans difficulté en 1920. On lit à ce sujet dans le Rapport annuel du Directeur des Archives ( du 28 mai 1920) : Journal Officiel
Le bruit courait que, même des dossiers postérieurs à 1870, il ne restait plus grand chose, parce que les locaux actuels de la Sûreté ne sont pas vastes, et parce que, chaque fois qu'ils s'encombraient, on y faisait des hécatombes de papiers à la fois inutiles et confidentiels, sans l'intervention d'aucun représentant des intérêts de l'histoire, c'est-à-dire d'aucun archiviste... On sait maintenant à quoi s'en tenir... Ce qu'il y avait encore d'intéressant dans les papiers de la Sûreté depuis 1870, 239 articles, où les historiens futurs trouveront des matériaux relativement aux grandes affaires de notre temps, vient d'être transféré aux Archives nationales.
Les articles provenant du versement de 1917 sont numérotés après ceux qui proviennent du versement de 1920 ; cela tient à ce que le débrouillement du versement confus de 1917 n'a été terminé qu'après le versement de 1920. Les articles 12710-12713 ont été versés en 1922, par un bureau du ministère de l'Intérieur.
CLASSEMENTS ET INVENTAIRES FAITS AUX ARCHIVES NATIONALES.
Les principaux fonds constitués aujourd'hui à l'intérieur de la série F , qu'ils aient été classés d'ancienneté au ministère de la Police et maintenus aux Archives nationales dans leur état primitif, ou qu'ils aient été l'objet de remaniements aux Archives, sont les suivants : 7
- Statistique personnelle et morale des départements (de 1789 à 1850) : F/7/3645-3700.
- Comité de Sûreté générale : F/7/4386-4824.
- Émigration (1791-1815) : F/7/3328-3436, F/7/4825-6125.
- Affaires politiques. - B. P. [Bureau particulier] (an V-an XIV) : F/7/6139-6464. Série 2 (an XIV-1814) : F/7/6465-6605. "Classement Duplay" (1814-1830) : F/7/6636-6677. P. P. [Police politique](1815-1830) : F/7/6678-6997.
- "Affaires diverses " [B à B , R et S à S ] (an IV-an XI) : F/7/7090-8007. 66
- Arrondissements de Police [R à R , P à P ] (an XII-1814) : F/7/8008-8969. 33
- "Affaires administratives" (1814-1830) : F/7/8970-9712.
- "Bulletins de Police" (an VIII 1829) : F/7/3701-3800.
- Détenus par mesure de haute police (an III-1817) : F/7/3979-3308.
- Série dite "Archives" (1782-1839) : F/7/4216-4385/2.
- Rapports de gendarmerie (1817-1859) : F/7/3906-4215/22.
Quant aux répertoires nouveaux qui ont été dressés aux Archives, on en trouve la liste dans l'ouvrage intitulé : (Paris, 1914) ; mais nous croyons bien faire en la reproduisant ici, avec les additions et corrections convenables : État des inventaires des Archives nationales au 1er janvier 1914
633. Répertoire numérique, par MM. de Wailly et Gorré. N'est plus utilisable pour les fonds du Comité de Sûreté générale et de l'Émigration.
634. Répertoire numérique, suivi d'une table alphabétique, par M. Rocquain (1858-1861). N'a plus de valeur pour : F/7/3001-4215 Documents généraux, F/7/4576-4824 Comité de Sûreté générale, F/7/4825-6135 Emigration. Ces fonds ont été remaniés par M. Bonnassieux de 1884 à 1895 : les différentes séries du Comité de Sûreté générale et de l'Émigration ont été alors fondues en une seule, et, chose très regrettable, aucune concordance n'a été dressée ; cependant il est relativement facile de retrouver les dossiers dont on connaît la cote ancienne.
635. Répertoire numérique (sur fiches) [F/7/3001-7094]. Commencé sous la direction de M. Bonnassieux. Inachevé et remanié depuis.
636. Répertoire alphabétique de la même série, inachevé (sur fiches).
637. Répertoire des Sections de Paris, par M. Bonnassieux (1891). (L'état sommaire des registres des sections est imprimé dans Ern. Mellie, (Paris, 1898 in 8°). Les sections de Paris
640. Inventaire sommaire du fonds du Comité de Sûreté générale, par M. Rocquain (1858-1861) ; remanié par M. Bonnassieux (1885). Cet inventaire n'est plus intéressant que par les indications qu'il fournit sur le sort des papiers de F/7 qui ont été versés dans d'autres séries, en particulier dans la série T.
642. Répertoire numérique des demandes de radiation de la liste des émigrés (1862). Ne répond plus aux cotes actuelles.
643. Répertoire numérique de la partie départementale du fonds de l'Émigration (F/7/4826-5789), donnant pour chaque carton l'indication du premier et du dernier des dossiers individuels classés alphabétiquement par départements (1889).
644. Répertoire numérique des (F/7/6139-6997), par M. Rocquain (1861). Ce répertoire n'indique qu'un ou deux dossiers par carton. Affaires politiques
645. Répertoire numérique des (F/7/6998-12176), par M. Rocquain (1862). N'indique qu'un seul dossier par carton. Sur cette série, voir Ch. SCHMIDT, (Paris, 1907), et Léon LE GRAND, (Paris, 1914). Les font. actuellement l'objet d'une importante publication, due à M. E. d'Hauterive, trois volumes ont déjà paru, qui portent sur les années 1804 à 1807. Affaires diverses Les sources de l'histoire de France depuis 1789 aux Archives nationales Les sources de l'histoire religieuse de la Révolution aux Archives nationales Bulletins de police La Police secrète du Premier Empire ;
Un tableau de concordance des dossiers des séries des "Affaires politiques" et de la série "Archives" est maintenant à la disposition du public dans la Salle des Inventaires. Ch. Schmidt.

Cote :

F/7/1-F/7/14591

Publication :

Archives Nationales
1962

Informations sur le producteur :

France. Ministère de la Police générale (1852-1853)

Localisation physique :

Pierrefitte-sur-Seine

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAN_IR_041020

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