Inventaire d'archives : Activités des services de renseignements généraux, et particulièrement des brigades spéciales, pendant l'Occupation

Contenu :

Présentation du contenu
Malgré la durée d'existence réduite des brigades spéciales, le fonds est extrêmement riche et il constitue un témoignage indispensable des activités de la police parisienne pendant l'Occupation.
Portée du fonds :
Cet ensemble de documents couvre une période chronologique allant de 1940 à 1944, soit toute la période d'activité des brigades spéciales. Seul un document, daté de 1937, ne concerne pas cette période (article 3). Il s'agit d'un document personnel appartenant à FOURNIER Pierre, vraisemblablement saisi dans le cadre d'une enquête le concernant.
Le versement concerne principalement des affaires survenues dans Paris, mais également dans les villes de l'ancien département de la Seine, supprimé en 1968, qui relevaient du ressort territorial de la Préfecture de police. Quelques dossiers isolés peuvent cependant faire référence à des évènements survenus en province (exemple : article 66).
Contenu du fonds :
Ce versement contient principalement des documents ayant trait à l'administration et aux activités des deux brigades spéciales. Il contient également quelques documents n'ayant pas pu être reliés à l'une ou l'autre des deux Brigades et qui ont donc été regroupés sous l'appellation générique de « Direction puis Direction générale des renseignements généraux et des jeux ».
Pour ce qui est de l'administration des Brigades, le versement contient peu de dossiers, se résumant à quelques bilans et à des documents concernant la gestion collective et individuelle du personnel.
Le versement contient en revanche une documentation plus importante en ce qui concerne leurs activités. Comme évoqué dans la partie Biographie ou histoire, leurs activités peuvent se résumer, à la répression anti-communiste pour la Brigade spéciale 1, et à la répression anti-terroriste pour la Brigade spéciale 2. Pour ces activités, Il est ainsi possible de trouver des documents relatifs aux enquêtes et arrestations, se traduisant la plupart du temps par des rapports circonstanciés de mise à disposition de personnes arrêtées, de filature, d'audition de témoins ou d'informations transmises par les commissariats. Les dossiers contiennent parfois des bulletins de recherche dans les différents services de la Préfecture de police pour vérification des antécédents des personnes, des commissions rogatoires provenant de l'autorité judiciaire, des listes de scellés, etc.
Ces enquêtes et arrestations peuvent concerner un individu en particulier ou un groupe.
Lorsqu'il s'agit de la couverture des attentats, il sera également possible de trouver des photographies ou des plans voire, pour certains cas, des expertises du Service des explosifs du Laboratoire municipal.
Point important :
Une des particularités de ce versement réside dans le fait qu'une partie non négligeable des documents le constituant sont des copies de la sous-série GB, mais il contient également des documents qui viennent compléter (lorsqu'il s'agit d'une page d'un rapport qui était manquante dans la sous-série GB par exemple) ou enrichir cette dernière. Trois cas peuvent donc se présenter :
- les documents sont des copies de la sous-série GB ;
- les documents complètent la sous-série GB ;
- les documents sont inédits.
Devant la difficulté pour faire la correspondance entre les documents du présent versement et ceux de la sous-série GB, il a été décidé de les conserver, même s'il s'agit de copie, et d'indiquer de façon la plus précise possible dans le champ Sources internes le dossier (et les vues le cas échéant) correspondant à l'affaire dans la sous-série GB. Enfin, lorsqu'une affaire concerne de nombreuses personnes, seuls des renvois concernant le ou la principale suspecte ont été faits, notamment pour ne pas surcharger le champ Sources internes. Pour les autres personnes concernées par l'affaire, il appartiendra au lecteur d'effectuer lui-même les recherches.
Intérêts du fonds :
En préambule, il est nécessaire de rappeler que cet ensemble de documents ne représente qu'une infime partie des archives des deux brigades spéciales. Il n'est donc pas une représentation exhaustive de leurs activités. Il conviendra pour le lecteur de se diriger vers la sous-série GB afin d'en avoir une vision plus complète.
De plus, il a été constaté au moment du classement qu'il y avait un déséquilibre entre le nombre de documents provenant de la Brigade spéciale 2 et ceux provenant de la 1re. Cette surreprésentation des activités de la Brigade spéciale 2 ne doit donc pas méprendre le lecteur sur l'importance de ses missions par rapport à l'autre Brigade ou l'induire en erreur sur un nombre d'attentats pendant la période de l'Occupation qui serait supposément plus conséquent que le nombre d'arrestation de communistes. Pour ces différentes raisons, ce versement est indissociable de la sous-série GB.
Il est également à noter que le versement ne contient qu'un dossier concernant le contrôle des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO) et qu'il faudra se diriger vers les cotes BA 1786 à 1790 pour mieux apprécier le travail des services de la Préfecture de police concernant cette activité.
Malgré ces particularités, cet ensemble de documents présente de nombreux intérêts.
Intérêt pour la recherche généalogique
Ce versement peut particulièrement intéresser les personnes effectuant des recherches sur des personnes ayant été arrêtées, pendant l'Occupation, pour des faits liés au communisme, pour leur implication dans des actions terroristes ou pour avoir été réfractaire au Service du travail obligatoire.
Il peut également être intéressant pour les recherches généalogiques portant sur d'anciens agents de ces brigades spéciales.
Intérêt pour la recherche historique
Le versement est bien évidemment une ressource remarquable pour toute personne effectuant des recherches sur la période de la Seconde Guerre mondiale et plus particulièrement sur la répression des communistes ou des résistants. Ainsi, cet ensemble de documents est utile à l'étude des conditions et motifs d'arrestation par les services de l'État français pendant l'Occupation, sur les moyens humains et matériels utilisés par la résistance intérieure française pour déstabiliser l'occupant et les collaborateurs, sur la gestion des personnes arrêtées par les autorités, sur la teneur des interrogatoires permettant d'avoir un aperçu percutant du contexte et de l'état d'esprit de la population de l'époque, etc.
Intérêt pour la recherche sur l'histoire de la Préfecture de police
L'intérêt du versement pour l'histoire de la Préfecture de police va sans dire, car ces deux brigades spéciales symbolisent souvent à elles seules l'implication de l'Institution dans les différentes mesures répressives du régime de Vichy et du IIIe Reich.
Les analyses des affaires :
Pour l'analyse des dossiers, la décision qui a été prise est de se rapprocher le plus près possible des choix effectués dans la sous-série GB afin de faciliter les recherches pour le lecteur. Ainsi, une affaire est, dans la majorité des cas, désignée par le nom d'une personne (affaire BERTRAND, affaire POIRIER, etc.). Cette personne étant la plupart du temps la ou le principal suspect de l'affaire ou tout simplement la première personne interpellée. Les autres personnes impliquées sont quant à elles mentionnées dans le champ Présentation du contenu.
Il est également à noter que, sauf cas contraire, seuls les noms qui apparaissent dans les documents sont mentionnés. Ainsi, il est possible que certaines analyses ne fassent pas ressortir l'entièreté des personnes réellement arrêtées dans le cadre d'une affaire donnée.
Ainsi, la forme utilisée pour le nom d'une affaire est :
NOM/ NOM DE JEUNE FILLE Prénom(s) épouse/divorcée/veuve NOM D'ÉPOUSE (Date de naissance à Lieu de naissance ; Profession), motif de l'arrestation/de l'affaire/de l'enquête.
Exemple :
TAVERNIER Adélaïde épouse IVANOV (14/08/1902 à Nouzonville ; libraire), arrestation pour ses relations avec les milieux communistes.
Conséquence de la période chronologique ici concernée, de nombreuses personnes arrêtées sont dotées d'alias, souvent utilisés par les intéressées pour mener leurs actions de Résistance illégales en protégeant leur identité. Lorsque les alias ou noms d'emprunt sont connus, ils sont indiqués entre guillemets sous le forme : NOM Prénoms alias « ... » ou dit « ... » (on place l'alias ou dit à la fin).
Exemple :
GILDAO Robert alias « Le boiteux » (31/12/1900 à Saint-Dizier ; fleuriste), arrestation pour propagande communiste.
Si les noms et prénoms ne sont pas explicites quant au sexe de l'individu (noms étrangers, prénom mixte, dossier ne mentionnant qu'un nom de famille), mais que les indications présentes au dossier permettent de déduire qu'il s'agit d'un homme ou d'une femme, les mentions [H] pour homme ou [F] pour femme, sont placées après le(s) prénom(s) de la personne.
Exemple :
BERNARD [F]

Cote :

283 W 1-264

Publication :

Archives de la Préfecture de police
2019
Paris

Informations sur le producteur :

Origine:
Brigade spéciale 1
Brigade spéciale 2
Direction des renseignements généraux et des jeux
Direction générale des renseignements généraux et des jeux
Biographie ou histoire
I. IDENTIFICATION DU PRODUCTEUR
I.I. Type d'entité :
Collectivité.
I.2. Forme(s) autorisée(s) du nom :
France. Préfecture de police (Paris). Direction des renseignements généraux et des jeux (1913-…). Brigade spéciale 1 (1940-1944).
France. Préfecture de police (Paris). Direction des renseignements généraux et des jeux (1913-…). Brigade spéciale 2 (1942-1944).
I.3. Formes parallèles du nom :
Direction des renseignements généraux
Direction générale des renseignements généraux
Renseignements généraux
Brigades spéciales
I.4. Autres formes du nom :
Acronymes : BS, BS1, BS2, DRG, RG.
II. DESCRIPTION DU PRODUCTEUR
II.I. Dates d'existence :
Renseignements généraux
Date de création : 3 août 1913
Brigade spéciale 1 : 1940-1944
Date de création : mars 1940
Date officielle de disparition : 20 août
Brigade spéciale 2 : 1942-1944
Date de création : 2 janvier 1942
Date officielle de disparition : 20 août 1944
II.2. Histoire :
Il est impossible d'évoquer l'histoire des brigades spéciales sans tout d'abord parler de celle des services de renseignements généraux à la Préfecture de police.
Un bref historique des services de renseignements généraux à la Préfecture de police :
Historique de la Direction générale des recherches (tiré du troisième fascicule du rapport du Conseil municipal de Paris sur la situation matérielle et morale des divers services de la Préfecture de police, 1923, 356W 207 dossier 0.123.01) :
En 1894, la Direction générale des recherches fut créée : cette création a eu pour résultat de centraliser, sous l'impulsion d'un seul fonctionnaire relevant de l'autorité immédiate du Préfet de police, les diverses services d'inspecteurs (brigades de recherches, service des garnis, service de sûreté, identité judiciaire) qui agissaient jadis sans connexité. Elle a eu pour conséquence de remédier, par l'appui réciproque que ces services ont été ainsi amenés à se prêter, à la dispersion de leurs efforts, et de les faire coopérer à la recherche et à l'arrestation des malfaiteurs et des criminels en combinant leur action propre dans un mouvement d'ensemble. En 1902 elle fut profondément modifiée (quant à la Sûreté). En 1913 elle fut supprimée.
C'est donc sur les cendres de la Direction général des recherches qu'est créé le Service des renseignements généraux et des jeux par arrêté le 3 août 1913 par le Préfet de police Célestin HENNION.
Service d'information qui, sur l'ensemble du département de la Seine, recherche les renseignements en matière politique, économique et sociale, le Service des renseignements généraux et des jeux est issu de la fusion des anciennes 1re, 2e et 3e brigades des recherches dites « des jeux », « politique » et « des anarchistes ». Son rôle est essentiellement préventif, puisque les informations qu'il collecte ont pour objet de permettre aux autres services de police d'intervenir en temps et en nombre utiles pour éviter les troubles susceptibles de porter atteinte à la sûreté intérieure de l'État. Au cours de son histoire, les services des renseignements généraux de la Préfecture de police se voient également confier la protection des ministres et autres personnalités résidant dans ce même département, mais également un rôle répressif, avec les brigades spéciales de la 1re section pendant l'Occupation, principal objet de cet instrument de recherche.
Texte extrait d'un rapport relatif au plan de réforme des services de la Direction des renseignements généraux et des jeux, 1948, 356W 207 dossier 0.123.01 :
"Ce n'est qu'au début de ce siècle qu'il est apparu nécessaire, non pas de créer une police politique, puisque cette nécessité, pour des raisons faciles à comprendre, s'est toujours imposée, mais de spécialiser un organisme de police dans la recherche et l'exploitation des renseignements de tous ordres, politiques, sociaux, économiques, susceptibles de permettre aux dirigeants de l'État d'anticiper sur les évènements et de justifier par là le vieil adage : gouverner, c'est prévoir.
En ce qui concerne la Capitale, un semblable organisme existe depuis plus de trente ans à la Préfecture de police et c'est la Direction des renseignements généraux. Depuis lors, une surveillance et un contrôle particulièrement serrés n'ont cessé d'être assurés sur toutes les branches de l'activité politique et sociale de Paris. Les renseignements de toute nature recueillis par ce Service ont permis maintes fois au Gouvernement d'être informé de manœuvres qui mettaient en danger les institutions de notre Pays ou compromettaient l'ordre public. Tant et si bien qu'au cours des années qui ont précédé la dernière guerre, on peut avancer qu'en ce qui concerne l'agglomération parisienne les services des renseignements généraux de la Préfecture de police pouvaient être considérés comme « les yeux et les oreilles du Gouvernement », en raison de la précision et de l'exactitude des renseignements qu'ils fournissaient journellement. […] Par ailleurs, il y a lieu de considérer qu'avant 1939 l'éventail des partis politiques était parfaitement nuancé et que ces teintes offraient un caractère beaucoup plus marqué de stabilité et de continuité."
Ce Service des renseignements généraux et de jeux nouvellement créé est donc, au début de son histoire, destiné à la surveillance des partis politiques, des jeux et des étrangers. Cette surveillance concerne entre autres les anarchistes, les mouvements sociaux (grèves, extrémistes et mouvements d'idées), etc. Son histoire est directement liée aux évolutions politiques et sociétales de la société française. Dès 1925, la surveillance des partis politiques se spécialise en fonction du spectre politique des partis : une section pour la gauche, une section pour la droite. En 1928, face à une situation intérieure préoccupante naît une section dédiée au contre-espionnage. L'année suivante est une étape importante pour le Service des renseignements généraux et des jeux puisque celui-ci est érigé en direction. Le 1er octobre 1937, la surveillance va s'étendre aux étrangers se livrant à une action politique avec la création de la Section spéciale de recherches (SSR), qui sera dissoute en 1941.
Les débuts de la Seconde Guerre mondiale et la création de la première Brigade spéciale :
Dans l'histoire des services de renseignements à la Préfecture de police, cette période de la Seconde Guerre mondiale est associée à la création des deux brigades spéciales de la 1re section, sujet principal de cet ensemble de documents.
La création de la première de ces deux brigades spéciales, chargée de la répression anti-communiste, voit son origine dans les débuts du second conflit mondial. Quelques semaines après la déclaration de guerre de la France à l'Allemagne, le Parti communiste est dissous par décret-loi en septembre 1939, en raison notamment du Pacte germano-soviétique, associant l'Allemagne et l'Union soviétique. Le Parti entrant dans l'illégalité, les actions de ses membres, tels que les manifestations ou la distribution de tracts sont, par voie de conséquence, elles aussi illégales. C'est donc à cette occasion qu'est créée la brigade spéciale anti-communiste, qui sera plus tard désignée sous le nom de Brigade spéciale 1 (ou en version abrégée BS1). Il s'agit ici d'un point de rupture important avec l'histoire des services de renseignements de la Préfecture de police, souvent qualifié de « révolution », car il s'agit du tout premier service répressif d'une direction dont la mission principale depuis plus de vingt ans est l'information des autres services.
Extrait du rapport de la Section d'épuration concernant ROTTÉE Lucien, directeur puis directeur général des renseignements généraux pendant l'Occupation, 1945, GB 17
La Brigade spéciale (BS) a été créée en mars 1940, par monsieur BAILLET [André], alors chef de la 1re section des Renseignements généraux (RG). Ses effectifs, qui à l'origine, ne dépassaient par une quinzaine d'inspecteurs, atteignaient en septembre 1941, une quarantaine.Elle avait pour objet, depuis l'occupation allemande, de dépister et d'arrêter tous ceux qui se livraient à une activité quelconque contre l'occupant et plus particulièrement des militants communistes en infraction avec le décret-loi du 26 septembre 1939.
De la prise de Paris à la rupture du Pacte germano-soviétique
L'entrée dans Paris des troupes allemandes le 14 juin 1940 va freiner l'activité de la Brigade spéciale pendant un temps. En effet, cette période d'occupation implique pour les autorités françaises de respecter le traité de non-agression entre l'Allemagne et l'Union soviétique et donc de stopper la répression anti-communiste.
Il ne s'agit au final que d'une courte pause puisque à la demande de Pierre LAVAL, la recherche des diffuseurs de tracts reprend à la fin du mois d'octobre 1940. Mais cette répression anti-communiste va bien évidemment repartir de plus belle avec la rupture du Pacte germano-soviétique le 22 juin 1941, lorsque Adolf HITLER déclenche l'opération Barbarossa et attaque l'Union soviétique. La Brigade spéciale va alors faire l'objet d'une réorganisation.
Extrait d'un rapport concernant la réorganisation de la BS1, 1942, GB 28 :
Le 22 juin 1941 s'ouvrent les hostilités germano-russes. Dès cette époque, les services de la Préfecture de police constatent une recrudescence brutale de l'activité communiste, tendant à dresser la population parisienne contre les Autorités d'occupation. C'est d'une manière particulièrement violente que se révèle une prise de position nouvelle du Parti communiste, qui, sous prétexte d'une action purement française, donne naissance à un front « communo-gaulliste » dont les manifestations sous couvert du drapeau tricolore, visent à susciter des incidents sur la voie publique, là où la densité du public permet de trouver un climat de manifestation (marchés, lieux de promenades du samedi et du dimanche, etc.). On assiste à une recrudescence marquée de la propagande écrite par tracts, brochures et papillons diffusés sur la voie publique, de l'ordre de douze mille par semaine, avec émission de trente à quarante nouveaux tracts hebdomadaires. […] La répression s'avère difficile. Le Parti communiste dispersé a reconstitué ses cadres de militants dont les noms sont inconnus. Néanmoins, cette organisation clandestine a trouvé des chefs dans la personne de militants notoires comme Hénaff, Grenier, Raynaud, Mauvais et Sémat, évadés le 19 juin 1941 du Centre de séjour surveillé de Châteaubriant. Tout un dangereux mécanisme clandestin nouveau se devine alors, mais on en ignore les animateurs. Les services de la Préfecture de police « font face ». À la Direction des renseignements généraux incombe la tâche de mesurer l'ampleur du mouvement qui se dessine, d'en découvrir les rouages et d'en arrêter les responsables. En septembre 1941, est réorganisée, au sein même des services dits « de renseignements », une Brigade spéciale répressive où sont rassemblés les éléments policiers les meilleurs. Elle va exercer son action première contre la distribution des tracts, seul élément « matériel » de recherche qui lui soit offert. Surveillances, filatures, de jour et de nuit, conduisent à la découverte des systèmes de relais dans le colportage des paquets de tracts, par remorques cyclistes, dépôts de valises en consigne dans les gares, reprises par des tiers, etc., puis à la localisation des dépôts.La rigueur des peines édictées, la vigueur de la répression des Autorités d'occupation rendent rigoureusement muets les individus arrêtés. Seules, les investigations policières, longues, ingrates et souvent décevantes peuvent aiguiller les recherches.
La Brigade spéciale 2 ou la victoire des Renseignements généraux sur la Police judiciaire
L'histoire de la Brigade spéciale 2 est quant à elle directement liée à une autre direction : la Direction de la police judiciaire. En effet, en septembre 1941, devant l'augmentation importante des attentats commis contre l'occupant ou les lieux pouvant être associés à la collaboration, est créé un groupe de répression anti-terroriste au sein de la Brigade spéciale criminelle de la Direction de la police judiciaire. Le groupe est divisé en deux, l'un est chargé des crimes et agressions contre les soldats de l'armée allemande, l'autre se voit attribuer les attentats matériels : sabotages ou incendies visant des bâtiments, des récoltes, des véhicules allemands, des voies ferrées, etc.
Très vite, le groupe anti-terroriste se voit limité dans ses actions : non pas par manque de compétences de ses agents, mais par manque de connaissance des milieux politiques et des syndicats de la région parisienne. En effet, les enquêtes effectuées par le groupe font très vite remonter les investigations vers des usines ou des manufactures, où la présence de milliers d'ouvriers, souvent encartés à gauche ou syndicalisés, sont à contrôler, ce qui s'annonce évidemment comme une tâche irréalisable pour le petit groupe composé seulement de quelques agents.
Les attentats, qui eux ne cessent de se multiplier, sont notamment l'œuvre des Francs-tireurs et partisans (FTP), mouvement de résistance intérieure française créé en octobre 1941 par le Parti communiste. Il apparaît ici évident que la connaissance du milieu communiste par les Renseignements généraux de la Préfecture de police depuis les années 1920, est un avantage indéniable pour mener à bien cette lutte anti-terroriste.
C'est en partie pour ces raisons que ce groupe anti-terroriste est transféré à la 1re section de la Direction des renseignements généraux et des jeux au 1er janvier 1942. Constituée au même titre que la BS1 comme une brigade à part entière, elle prend la dénomination de Brigade spéciale 2.
Preuve s'il en est de l'importance de la Direction des renseignements généraux et des jeux, et de ses deux brigades, pendant cette période, le 1er mai 1942 elle est érigée en Direction générale.
La Libération et l'épuration :
Le 20 août 1944, lendemain du début des évènements de la Libération de Paris, les deux brigades spéciales sont dissoutes à l'occasion de l'arrêté relevant de leurs fonctions les responsables de ces deux services.
À peine les célébrations de la libération de la capitale achevées qu'elles laissent place à l'épuration. À la Libération, les agents de la Direction des renseignements généraux et des jeux, et plus particulièrement des deux brigades spéciales, comptent parmi les agents les plus touchés par l'épuration administrative du personnel, au vu de leur très forte implication dans la lutte contre la Résistance. Certains d'entre eux ne passent d'ailleurs même pas par le processus administratif, subissant ce que l'on qualifiera plus tard « d'épuration sauvage », à savoir un assassinat pur et simple.
Pour plus de détails, voir les fonds dédiés à l'épuration (KB, 108W, 287W, 381W).
II.3. Lieux
Pendant leur existence, les bureaux des brigades spéciales sont situés à la Préfecture de police, 1, rue de Lutèce à Paris. Le personnel occupe les bureaux 26 à 47 au 2e étage de la galerie sud, les bureaux 501 à 503 et 517 à 520 bis au 2e étage de la galerie nord, et enfin les bureaux 340 à 343 et 378 à 380 du 5e étage de la galerie ouest.
Il est assez ironique de noter que la Section d'épuration, qui sera chargée à la Libération de préparer pour la Commission d'épuration les dossiers des agents les plus impliqués dans la collaboration, et donc en grande partie des ex-agents des brigades spéciales, occupera les anciens bureaux des BS de la galerie sud.
Un rapport d'activité de la BS1 pour l'année 1941 donne d'autres indications (cote GB 28). Il indique notamment que la BS1 a occupé différents locaux durant l'année 1941, les changements successifs ayant lieu en fonction des modifications apportées aux effectifs :
• Du 1er janvier au 22 août 1941 : 2e étage galerie nord, bureaux 501-502 ; 2e étage galerie ouest, bureaux 524-525.
• À partir du 22 août 1941 : dotation supplémentaire 2e étage galerie nord, bureaux 503 et 520.
• À partir du 1er octobre 1941 : regroupement et augmentation des locaux contigüe 2e étage galerie nord bureaux 502-503, 517-520.
II.4. Statut juridique
Public (administration).
II.5. Fonctions et activités
Cette partie ne s'attardera que sur les fonctions et activités des deux brigades spéciales.
Rôle et missions de la Brigade spéciale 1 :
La Brigade spéciale 1 est chargée dès sa création en mars 1940 de la répression anti-communiste.
Elle a les attributions suivantes :
• elle est l'organisme répressif en matière d'activités politiques interdites ;
• elle exploite les renseignements et les informations qui lui sont fournis par les sections ;
• elle utilise également tous les renseignements recueillis directement par elle ;
• son action tend à la découverte des individus se livrant à des activités communistes ou gaullistes et à leur arrestation ;
• elle procède, par voie d'enquêtes, surveillances, filatures, perquisitions, etc., afin d'établir la culpabilité des délinquants d'une manière directe et d'amener la découverte du matériel de propagande utilisé.
Elle a constitué, en outre, des archives spéciales à l'aide des fiches des individus arrêtés ou soupçonnés, et elle surveille par secteurs affectés à des groupes d'inspecteurs l'activité locale des personnes susceptibles de participer à une propagande illégale.
Ses missions, qui sont parfois résumées sous la dénomination « Plan propagande » dans les rapports d'activité de la Brigade, concernent notamment l'arrestation de responsables du Parti communiste. Il peut s'agir de responsables nationaux, inter-régionaux, régionaux, aux échelons inférieurs (secteurs, sections, etc.) ou encore de militants illégaux ou appointés.
Elle se voit également confier l'arrestation des communistes étrangers (notamment espagnols et israélites de nationalités divers), désignées sous les initiales MOI (Militants ouvriers internationaux ou Main-d'œuvre immigrée).
Rôle et missions de la Brigade spéciale 2 :
La Brigade spéciale 2, qui reprend les attributions de l'éphémère section anti-terroriste de la Brigade spéciale criminelle de la Direction de la police judiciaire en janvier 1942, est chargée de la répression anti-terroriste. Au milieu de l'année 1943, elle se voit également attribuer la surveillance des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO), notamment à partir de la loi n° 342 du 11 juin 1943 sanctionnant les obligations relatives au Service du travail obligatoire, dont les conditions de sanctions et de recherche des réfractaires seront précisées par des circulaires gouvernementales.
Ses missions qui sont parfois résumées sous la dénomination « Plan communo-terroriste (FTP) » concernent notamment l'arrestation de communo-terroristes, allant du chef de groupe, de l'exécutant ou du simple hébergeur.
Cette répression anti-terroriste s'accompagne de la couverture des attentats ayant lieu dans le ressort de la Préfecture de police. Les rapports d'activité de la Brigade présentent différentes catégories d'attentats :
• cambriolages de mairies ou de centres de distribution de titres de rationnement ;
• meurtres ou tentatives de meurtre de personnes considérées comme traîtres au Parti communiste ou de militaires allemands ;
• attentats à l'explosif ;
• incendies ou tentatives d'incendie ;
• manifestations ;
• cambriolages, vols d'explosifs ou d'essence, attentats sur voie ferrée.
Les deux Brigades travaillent étroitement avec la 1re section des Renseignements généraux dont les missions sont la collecte de renseignements et d'informations concernant les milieux communistes.
La 1re section s'occupe de toute information politique sur les mouvements dits de gauche et d'extrême-gauche : socialisme, communisme, anarchisme et le cadre syndical de ces partis.
Depuis le début de l'Occupation allemande, cette section s'est occupée d'enquêtes de toutes natures et plus particulièrement de celles concernant la libération éventuelle des internés politiques, ainsi que des dénonciations de particuliers ou anonymes concernant l'activité clandestine des militants d'extrême-gauche.
D'autre part, le personnel de cette section est également chargé d'effectuer des enquêtes pour le compte des autorités allemandes, ainsi que pour le chef de la Gestapo en France. Dans le cadre de cette section existe aussi un service indépendant sous les ordres directs du chef de section et qui vise particulièrement à obtenir des renseignements dans les différents groupements politiques de gauche ou dans les divers organismes de Résistance. Ces gradés et inspecteurs recueillent leurs informations par le truchement d'indicateurs appointés qui appartiennent pour la plupart aux divers groupements politiques et de Résistance. Ces renseignements sont immédiatement transmis aux brigades spéciales 1 et 2. On peut dire que cette tranche de la 1re section est à la base de nombreuses arrestations de patriotes, qui ont été opérées par les dites brigades spéciales, avec lesquelles elle est en liaison constante.
II.6. Textes de référence
Décret :
Décret du 25 septembre 1943 portant fixation des effectifs
Arrêtés du Préfet de police :
Arrêté n° 35 du 3 août 1913 portant suppression de la Direction des Recherches, création de la Direction de la Police judiciaire et création du Service des Renseignements généraux et des jeux
Arrêté n° 50 du 17 janvier 1922 portant création d'un poste de chef-adjoint de service
Arrêté n° 190 du 27 janvier 1922 portant création d'une Section étrangers
Arrêté n° 1895 du 18 septembre 1923 arrêté recréant la Direction générale de recherches
Arrêté n° 2306 du 31 décembre 1924 arrêté rapportant l'arrêté n° 1895 du 18 septembre 1923
Arrêté n° 145 du 26 janvier 1928 portant substitution à un commissaire spécial, un commissaire divisionnaire
Arrêté n° 306 du 18 février 1929 portant création de l'inspecteur principal sous-chef technique et administratif
Arrêté n° 849 du 24 avril 1929 portant nomination d'un directeur à la tête des Renseignements généraux
Arrêté n° 378 du 23 février 1931 portant fixation des effectifs
Arrêté n° 1261 du 17 juillet 1939 portant fixation des effectifs
Arrêté n° 998 du 24 octobre 1940 portant rattachement aux Renseignements généraux du bureau des admissions et du bureau de l'éloignement des étrangers
Arrêté n° 1848 du 6 mai 1942 portant nomination de ROTTÉE Lucien comme Directeur général
Arrêté n° 2976 du 24 août 1944 relevant de leurs fonctions certains directeurs et directeurs généraux de la Préfecture de police (notamment ROTTÉE)
Arrêté n° 2979 du 24 août 1944 relevant de leurs fonctions certains fonctionnaires de la Préfecture de police (notamment DAVID et HÉNOQUE)
II.7. Organisation interne
a. Évolution des différentes sections et services :
L'histoire de l'organisation des services des renseignements généraux à la Préfecture de police se caractérise par plusieurs grandes périodes.
1re période (1913-1921)
À sa création en 1913, le Service des renseignements généraux et jeux est organisé autour d'une direction, composée notamment d'un bureau administratif, des archives et des expéditions, et de deux sections : la 1re section est chargée de la surveillance des partis politiques et la 2e de la surveillance des jeux et des étrangers.
L'article 4 de l'arrêté de création précise : « Le Service des renseignements généraux et des jeux est dirigé par un commissaire de police, chef de service, auquel est adjoint un commissaire de police, plus spécialement chargé de la Brigade des Jeux. »
DUMA Numa César Joseph est le premier chef du Service des renseignements généraux et des jeux.
2e période (1922-1924)
L'arrêté du 17 janvier 1922 crée un chef-adjoint du Service des Renseignements généraux et des jeux qui remplace le chef des bureaux.
L'organisation reste sensiblement la même, mais le chef-adjoint du service est un chef de bureau qui commande la 1re section. La 2e section quant à elle se scinde en deux services avec d'une part, le service des jeux (et enquêtes administratives) qui garde le titre de 2e section et est commandée par un commissaire de police ; d'autre part le service des étrangers, qui lui est commandé par un commissaire de police (ancien chef de la 2e section).
En 1923, l'organisation du service ne change pas puisqu'il est toujours composé de deux sections. La 1re section (partis politique) est organisée en brigades (notamment la brigade des anarchistes) et en sous-sections parmi lesquelles : la sous-section des étrangers, les sous-sections du mouvement social (grèves, extrémistes et mouvement des idées), trois sous-sections de presse et une sous-section des notes. La 2e section (jeux) comporte plusieurs brigades parmi lesquelles : brigade des cercles, brigade des jeux, brigade financière, brigade des notes, brigade des aliénés, brigade des étrangers.
Il est à noter que pendant une courte période, la Direction des recherches est recréée et elle rassemble à nouveau Police judiciaire et Renseignements généraux (arrêté 18 septembre 1923).
La Direction comprend alors :
• Le service actif des RG qui prend le nom de Service des Recherches administratives et des jeux ;
• Le service des Recherches judiciaires ;
• Le service des garnis ;
• Les délégations judiciaires ;
• L'identité judiciaire.
Finalement, l'arrêté du 31 décembre 1924 rapporte celui du 18 septembre 1923 et le Service des renseignements généraux et des jeux est rétabli à compter du 1er janvier 1925.
3e période (1925-1927)
La 1re section se divise en deux (1re et 2e section), l'une s'occupant des organisations politiques de gauche, l'autre des associations de droite. La 2e section (jeux) devient la 3e section, le service des étrangers devient la 4e section.
L'organisation est alors la suivante :
• 1re section (organisations politiques de gauche) ;
• 2e section (associations de droite) ;
• 3e section (jeux) ;
• 4e section (service des étrangers).
4e période (1928-1936)
Le 1er janvier 1928 naît une 5e section dédiée au contre-espionnage. À partir du 1er février 1929, le service devient direction et le chef directeur, la nouvelle dénomination est alors Direction des renseignements généraux et des jeux. En 1936, pour les commodités de la classification, le bureau administratif, la caisse, les archives, la rédaction et l'expédition forment une unité : la 6e section. À ces six sections s'ajoute également la « section spéciale du Pari mutuel ».
5e période (1937-1939)
Le 1er octobre 1937 est créé une Section spéciale de recherches (SSR) ayant pour objet d'étudier le comportement des étrangers se livrant à une action politique. Cette section groupe des inspecteurs en provenance des 1re et 4e sections.
Le 22 mars 1939 naît une section 4e B « voie publique étrangers » qui rassemble quelques inspecteurs de la 4e section et des gardiens détachés.
Au 1er janvier 1939, les différentes sections ont les attributions suivantes :
• 1re section (organisations politiques de gauche) : communistes, socialistes, anarchistes, mouvement social, colonies, informations et fichier, service intérieur et réunions ;
• 2e section (associations de droite) : politique générale, notes diverses, presse et enquêtes, imprimeries, brigade spéciale ;
• 3e section (jeux) : jeux et cercles, brigade spéciale, finance, aliénés, notes ;
• 4e section « A » (service des étrangers) : brigade spéciale (notes, surveillance des hôtels, cafés, dancings, spectacles), service administratif des étrangers ;
• 4e section « B » (voie publique des étrangers) ;
• 5e section (contre-espionnage) ;
• Section spéciale de recherches (SSR) ;
• 6e section « A » (archives) ;
• 6e section « B » (rédaction – expédition).
6e période (Occupation, 1940-1944)
En juin 1940 la SSR et le Service de contre-espionnage, confiés à la Direction par arrêté du 23 septembre 1939, sont dissous. Le 12 août, le 2e bureau des étrangers (éloignement) est rattaché à la 4e section « B ». Au mois de juillet est créé la section « X ». De son coté, la SSR, reconstituée a créé, en septembre 1940, une brigade spéciale pour « étrangers extrémistes ». Elle sera à nouveau dissoute le 1er novembre 1941 et la plupart de ses effectifs intègrent alors la 3e section, qui en reprend les missions.
La 5e section dédiée au contre-espionnage est dissoute à l'arrivée des Allemands et annexée à la 4e section.
Mais cette période de l'Occupation est surtout marquée par la création des deux brigades spéciales de la 1re section.
En 1941, la Direction est ainsi organisée (rapport du 1er octobre 1941) :
• Cabinet du Directeur, composé d'un secrétariat permanent, d'un bureau administratif et de la caisse – comptabilité
• 1re section, surveillance et enquêtes relatives aux communistes, anarchistes et syndicats
o Brigade spéciale anti-communiste
• 2e section, surveillance des partis et groupements autorisés de droite, enquêtes officielles et protection des personnalités
• 3e section, jeux, enquêtes et informations
• 4e section
o A : étrangers (enquêtes)
o B : étrangers (voie publique)
• Section spéciale de recherches : surveillance et contrôle au point de vue politique des milieux étrangers
• 6e section :
o A : archives centrales (appellation en novembre 1941)
o B : rédaction – dactylographie (appellation en novembre 1941)
Organisation à partir du 1er novembre 1941 :
• 1re section (organisations politiques de gauche)
o Brigade spéciale anti-communiste
• 2e section (associations de droite)
• 3e section (ex SSR)
• 4e section (ex 4e A - service des étrangers)
• 5e section (ex 4e B - voie publique étrangers)
• 6e section (ex 3e - jeux)
Le 1er mai 1942, la Direction des Renseignement généraux est érigée en Direction générale, à l'occasion du changement de statut de Lucien ROTTÉE. Les postes de directeur général et directeur apparaissent à cette occasion.
b. Personnel de direction ou d'encadrement :
À titre d'information, voici la liste des directeurs généraux et directeurs de la Direction générale des renseignements généraux et des jeux, ainsi que des chefs des brigades spéciales, entre 1913 et 1944.
Directeur puis directeur général de la Direction générale des renseignements généraux et des jeux :
DUMAS Numa (01/09/1913-20/04/1923)
LE BRETON Guy (24/04/1923-01/02/1929)
PERRIER Ernest (01/02/1929-21/07/1936)
SIMON Jacques (21/07/1936-11/07/1941)
ROTTÉE Lucien (16/08/1941-20/08/1944, directeur du 16/08/1941-30/04/1942, directeur général du 01/05/1942-20/08/1944)
Directeur des Renseignements généraux et des jeux (après passage en Direction générale) :
BAILLET André (16/08/1942-15/06/1943)
NOEDTS André (16/06/1943-20/08/1944)
Chef de la Brigade spéciale 1
COUGOULE André Gabriel Germain (03/1940-31/08/1941)
DAVID Fernand (01/09/1941-20/08/1944)
Chef de la Brigade spéciale 2
HÉNOQUE René (02/01/1942-20/08/1944)
c. Effectifs :
La BS1, composée de 15 inspecteurs à l'origine, en compte 40 quand Fernand DAVID prend sa direction en septembre 1941. Elle passe alors à 70 et en comprend 92 à son apogée.
Concernant la BS2, ses effectifs sont, au départ, constitués par une quinzaine de policiers prélevés sur la BS1 et les autres sections des Renseignements généraux, renforcés par des inspecteurs de la Brigade spéciale criminelle de la Direction de la police judiciaire qu'elle remplace. Elle encadre aussi des éléments des brigades spéciales de la police municipale récompensés pour leur zèle dans la lutte menée contre les communistes. Au printemps 1942, l'affectation de la totalité de la promotion issue du concours d'inspecteur spécial achève de donner son cadre définitif à une brigade qui compte – comme la BS1 – jusqu'à une centaine de policiers au maximum.
L'effectif des BS est ainsi passé du 1er janvier 1942 au mois d'août 1944, de quatre-vingt à deux cent vingt inspecteurs, répartis en quantité à peu près égale dans chacune des deux BS.
II.8. Contexte général
Si la création de ces deux brigades spéciales s'inscrit dans le contexte général de la Seconde Guerre mondiale, l'histoire tumultueuse des communistes avec la Préfecture de police remonte à la naissance de la Section française de l'Internationale communiste (SFIC).
Des années 1920 à la dissolution du Parti communiste
Le Parti communiste français, dénommé à son origine sous le nom de Section française de l'Internationale communiste, est créé lors du congrès national de la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) qui a lieu à Tours en décembre 1920.
Les services de renseignements généraux jouent un rôle majeur dans l'information du Préfet de police, puis du ministre de l'Intérieur et donc du Gouvernement, quant au suivi quotidien de la situation politique, économique et sociale du pays. Ce nouveau parti politique devient peu à peu un acteur majeur de la scène politique française, rassemblant les traumatisés de la Première Guerre mondiale et les déçus du modèle français du socialisme et du syndicalisme. Devenu le Parti communiste (SFIC), dont l'acronyme est PC-SFIC pour ne pas être confondu avec le Parti communiste (PC) créé lui en 1919, il multiplie ses actions antimilitaristes auprès des jeunes, notamment à l'occasion de l'occupation de la Ruhr en 1923 et de la guerre du Rif au Maroc en 1925. C'est notamment à la suite de cette dernière qu'une surveillance systématique se met en place autour des différentes manifestations politiques et que le recensement systématique et le signalement des militants membres du Parti ou d'organisations communistes sont entérinés. L'action policière envers les communistes se fait encore plus légitime avec la déclaration en avril 1927 d'Albert SARRAUT alors ministre de l'Intérieur : « Le communisme, voilà l'ennemi ».
Au début des années 1930, alors que « l'affaire Stavisky » éclabousse les milieux politiques et financiers depuis quelques mois, surviennent les émeutes antiparlementaires qui sont plus tard qualifiées de « Crise du 6 février 1934 ». Cette manifestation parisienne organisée principalement par la Droite pour protester contre le limogeage du préfet de police Jean CHIAPPE à la suite de « l'affaire Stavisky », dégénère en émeute et fait plusieurs morts et blessés, autant du coté des forces de l'ordre que des manifestants. Devant cette radicalisation de la droite et la montée évidente du fascisme en France, les principaux partis de gauche se rapprochent dans les années qui suivent, pour aboutir à une véritable coalition – le Front populaire - aux élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936.
Cette coalition est mise à mal par les incidents qui éclatent le 16 mars 1937 à Clichy. Suite à l'organisation d'une réunion par le Parti social français (PSF) à Clichy, le maire de la commune Charles AUFFRAY, membre de la SFIO, accompagné d'autres figures de la gauche, lance un appel à la contre-manifestation. Le message est entendu puisqu'une centaine de manifestants assiègent le lieu de la réunion, obligeant des forces de l'ordre dépassées à répondre par la violence. À l'image de la manifestation du 6 février 1934, il faut dénombrer plusieurs morts et blessés. Des divisions au sein du Front populaire apparaissent suite à ces évènements, mais son éclatement total intervient lors de la grève générale du 30 novembre 1938, fortement réprimée par le nouveau Président du Conseil des ministres Édouard DALADIER, chef du Parti radical et donc membre du Front populaire. Il faut également ajouter aux mesures répressives prises par DALADIER, que ce soit dans la gestion des manifestations ou des étrangers, sa marche arrière sur certaines des mesures sociales de ses prédécesseurs. La somme de ces évènements conduit à la fin prématurée du Front populaire, affaiblissant en même temps le PC-SFIC.
Édouard DALADIER poursuit sa politique contre le PC-SFIC, dont l'aboutissement est la mise hors la loi du Parti. Suite à la signature du Pacte germano-soviétique le 23 août 1939 et à la déclaration de guerre de la France à l'Allemagne le 3 septembre 1939, le Parti communiste français est dissous par le décret-loi du gouvernement d'Édouard DALADIER du 26 septembre 1939 prononçant la dissolution des organisations communistes. Le Parti entrant dans la clandestinité, les militants doivent faire de même. Dès lors le Parti assure essentiellement la distribution de tracts ou la parution épisodique de L'Humanité, mais tâche également de reconstituer clandestinement ses structures.
La répression des communistes prend un nouveau tournant avec le décret du 18 novembre 1939 portant sur les mesures à prendre à l'égard des individus dangereux pour la Défense nationale et la sécurité publique. Dès lors, les arrestations, suivies d'un internement administratif, s'intensifient. En plus des militants, ce sont aussi les députés qui sont visés par ces mesures, et du 20 mars au 3 avril 1940 se tient leur procès.
Une ordonnance prise par le préfet LANGERON stipule que « toute découverte de tracts clandestins sur le territoire d'une commune du département de la Seine entraînera l'internement administratif d'un ou plusieurs militants communistes notoirement connus, résidant sur le territoire de cette commune, sauf poursuites judiciaires dûment engagées ».
La création de la première Brigade spéciale :
C'est donc la somme de tous ses évènements qui déclenche la création de la Brigade spéciale anti-communiste de la 1re section de la Direction des renseignements généraux et des jeux en mars 1940.
Après la « pause » dans les activités de la Brigade spéciale imposée par l'Occupation, la rupture pacte germano-soviétique réactive la Brigade en septembre 1941.
La création de la deuxième Brigade spéciale :
La création de la Brigade spéciale 2, chargée de la répression anti-terroriste est elle consubstantielle de la Seconde Guerre mondiale.
Après la rupture du pacte germano-soviétique en juin 1941, la direction de l'Internationale communiste à Moscou lance un appel aux pays occupés : les partis communistes locaux doivent entrer dans la lutte armée.
L'appel est entendu puisque le 21 août 1941, l'aspirant Alfons MOSER est assassiné par le militant communiste Pierre GEORGES à la station de métro Barbès. Il s'agit du premier attentat contre un militaire allemand depuis le début de l'Occupation. Il est le premier d'une longue liste puisque les attentats contre l'occupant se multiplient à partir du mois de septembre.
En octobre 1941, le PC-SFIC crée les Francs-tireurs et partisans (FTP), mouvement de résistance intérieure spécifiquement dédié à la lutte armée. Aussitôt, les attentats vont encore augmenter dans la capitale, résultats d'un mouvement qui s'organise et se coordonne. La multiplicité des attentats et les similitudes des cibles (militaires ou ressortissants allemands, lieux pouvant être associés à l'occupant, etc.) font abandonner aux autorités l'hypothèse d'actes individuels.
En janvier 1942, la création de la Brigade spéciale 2 à la Direction des renseignements généraux et des jeux est entérinée, après un passage éphémère par la Direction de la police judiciaire. La création de la BS2 est donc également indissociable de la naissance des groupes armés à Paris à l'été 1941.

Informations sur l'acquisition :

Informations sur les modalités d'entrée
Versement à une date inconnue.
Historique de conservation :
Historique de la conservation
Au moment du classement, il a été constaté que certains dossiers n'avaient pas été produits par les Renseignements généraux. Plusieurs producteurs différents ont ainsi pu être identifiés. Il s'agit :
- de la Brigade spéciale criminelle de la Direction de la police judiciaire ;
- du Laboratoire municipal ;
- de la Commission d'épuration et de la Section d'épuration.
Afin que cet ensemble de documents ne soit dédié qu'aux brigades spéciales, et plus globalement aux Renseignements généraux, il a été décidé d'extraire les archives des autres producteurs afin de les intégrer dans des sous-séries adaptées. La répartition faite est la suivante :
- archives de la Brigade spéciale criminelle de la Direction de la police judiciaire : 253W ;
- archives du Laboratoire municipal : 227W ;
- archives de la Commission d'épuration et la de Section d'épuration : KB et 287W.

Description :

Critères de sélection :
Informations sur l'évaluation
Les éliminations pratiquées ont uniquement porté sur les documents en multiples exemplaires : il a été conservé deux exemplaires lorsque les documents étaient en bon état. Dans le cas des documents en mauvais état ou pour certains types de papiers (papier pelure notamment) l'ensemble des exemplaires ont été conservés.
Mise en forme :
Mode de classement
Le plan de classement élaboré pour ce fonds a été construit pour mettre en avant le processus de travail des brigades spéciales.
Le plan de classement est le suivant :
I. Direction puis Direction générale des renseignements généraux et des jeux
II. Brigade spéciale 1
1. Administration
2. Activités
• A. Gestion globale
• B. Arrestation et enquête
III. Brigade spéciale 2
1. Administration
2. Activités
• A. Gestion globale et informations communiquées par d'autres services
• B. Arrestation, enquête et commission rogatoire
• C. Attentat
• D. Matériel saisi et expertise du Laboratoire municipal
• E. Contrôle des réfractaires au Service du travail obligatoire (STO)

Conditions d'accès :

Statut juridique Archives publiques
Communicabilité
L'ensemble des documents du fonds sont communicables selon les articles L. 213-1 à 213-2 du Code du patrimoine et selon l'arrêté du 24 décembre 2015 portant ouverture d'archives relatives à la Seconde Guerre mondiale (référence NOR : PRMX1526389A), sous réserve des restrictions imposées par l'état matériel des documents.

Conditions d'utilisation :

Conditions d'utilisation
Condition de reproduction
La reproduction de documents conservés par le Service de la mémoire et des affaires culturelles de la Préfecture de police donne lieu à la perception d'un droit de reproduction, conformément aux articles 15 et 16 de l'arrêté n° 2015-01027 relatif à la réglementation applicable en salle de consultation des archives de la Préfecture de police.
Néanmoins, la prise de vue avec un appareil photographique numérique ou analogique, sans utilisation du flash, est autorisée en salle de lecture en prenant des précautions pour certains documents.
La réutilisation des informations publiques
La réutilisation publique, commerciale ou non, des informations contenues dans les documents produits ou reçus par la Préfecture de police, dès lors qu'ils sont librement communicables, par exemple dans le cadre d'une mise en ligne d'un article ou d'une publication papier, donne lieu à l'établissement d'une licence de réutilisation à titre gratuit.
Cas particuliers de la réutilisation des données à caractère personnel
Le respect des conditions de réutilisation des données à caractère personnel contenues dans les documents de cet ensemble incombe au réutilisateur, qui doit notamment respecter l'article 100-1 du décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 (article L. 322-2 du Code des relations entre le public et l'administration), révisée par une directive de 2013, elle-même transposée en France depuis 2015 par la loi n° 2015-1779 du 28 décembre 2015 "relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public", puis par la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 "pour une République numérique".

Langues :

Langue des unités documentaires: La plupart des documents sont écrits en français, mais certains documents sont en allemand.

Description physique :

Description physique: Document d'archives

Nombre d'éléments
Nombre d'éléments: 264 dossiers
Métrage linéaire
Métrage linéaire: 0,51

Ressources complémentaires :

Autre instrument de recherche
Fonds de la Direction générale des Renseignements généraux et des jeux
Répertoire numérique de la sous-série GA. Dossiers individuels de renseignements des Renseignements généraux. 1930-1995.
Répertoire numérique de la sous-série GB. Fonds des brigades spéciales. 1939-1945.
Répertoire numérique de la sous-série GE. Renseignements généraux : surveillance politique et répression des étrangers. 1940-1943.
Répertoire numérique de la sous-série 77W. Dossiers individuels de renseignements des Renseignements généraux.
Répertoire numérique de la sous-série 221W. Surveillance du Parti communiste français.
Fonds du Cabinet du Préfet de Police
Répertoire numérique de la sous-série BA. Rapports de recherches et de renseignements adressés au Préfet de police. 1869-1970. Cotes BA 1747-1792, 2099-2114, 2304-2311, 2434.
Répertoire numérique de la sous-série 1W. Dossiers individuels de renseignements du Cabinet du Préfet.
Fonds de l'Inspection générale des services
Répertoire numérique de la sous-série 287W. Fonds de la Section d'épuration. 1931-1946.
Fonds du Dépôt de la Préfecture de police
Répertoire numérique de la sous-série CC2. Registres d'écrou des consignés provisoires (CP) au Palais de justice, communément dénommée « Dépôt judiciaire de Paris ». 1941-1970.
Fonds de la Direction de la Police judiciaire
Répertoire numérique de la sous-série JA.
Répertoire numérique de la sous-série JB.
Répertoire numérique de la sous-série 253W. Brigade spéciale criminelle.
Sources complémentaires
Sources internes
Pour des informations supplémentaires sur la carrière des agents, voir le fonds des ressources humaines.
Pour des informations supplémentaires sur l'histoire des services de renseignements de la Préfecture de police, voir particulièrement les cotes DB 44 et 356W 206 à 210.

Références bibliographiques :

Bibliographie
BERLIÈRE Jean-Marc. « L'épuration de la police parisienne en 1944-1945 », in : Vingtième Siècle, revue d'histoire, n° 49, janvier-mars 1996. pp. 63-81.
BERLIÈRE Jean-Marc et CHABRUN Laurent, Les policiers français sous l'occupation, Paris, Perrin, 2001.
BERLIÈRE Jean-Marc et LIAIGRE Franck, Le sang des communistes - Les bataillons de la jeunesse dans la lutte armée, Paris, Fayard, 2004.
BERLIÈRE Jean-Marc et PESCHANSKI Denis (dir.), La police française (1930-1950) – Entre bouleversements et permanences, Paris, La documentation Française, 2000.
BERLIÈRE Jean-Marc et PESCHANSKI Denis (dir.), Pouvoirs et polices au XXe siècle, Bruxelles, Complexe, 1997.
COUDERC Frédéric, Les RG sous l'Occupation - Quand la police française traquait les résistants, Olivier Orban, 1992.

Localisation physique :

Localisation physique: Le Pré-Saint-Gervais, Seine-Saint-Denis, France

Organisme responsable de l'accès intellectuel :

Archives de la Préfecture de police

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAPP075_283W-RG

Où consulter le document :

Préfecture de Police - Service des archives

Liens