Inventaire d'archives : Cultes (1732-1934) Série V (1243 articles)

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Description détaillée
La série V des archives départementales contient essentiellement les papiers de l'administration publique touchant le régime des cultes pendant la période concordataire.
Le concordat du 15 juillet 1801, publié en avril 1802, rendait à l'Église de France, après les bouleversements révolutionnaires, un statut légal acceptable par l'autorité suprême de l'Église et par la grande majorité des fidèles. Mais beaucoup de changements s'étaient produits depuis le début de la Révolution, sur lesquels les négociations entre Rome et les Consuls ne revinrent pas : nationalisation des biens de l'Église d'ancien régime, suppression des ordres religieux, simplification de la carte ecclésiastique avec réduction du nombre des évêchés, obligation du serment pour les évêques et les prêtres...
En revanche, l'État consentait un traitement décent aux membres du clergé; il n'en exigeait plus de serment qui troublât sa conscience. Le nombre des évêques n'atteignait même plus ce qu'il était dans l'Église constitutionnelle, soit un par département. Non seulement les sièges de Castres et de Lavaur restaient supprimés, mais celui d'Albi lui-même disparaissait. Pendant vingt ans, l'Église catholique tarnaise fut administrée par un vicaire général de l'évêque de Montpellier, Simon Rollet (1802-1806), puis Nicolas Fournier (1806-1822).
Pendant ce temps, les structures locales se constituent et s'affermissent. Une succursale du séminaire de Montpellier, seul admis par le Concordat, est autorisée à Castres, dès 1812. Certaines congrégations obtiennent leur retour dès l'Empire (Frères des Écoles chrétiennes, Filles de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul), d'autres se reconstituent, d'abord tolérées pour leur activité enseignante, puis autorisées sous la Restauration.
Mais la loi du 14 juillet 1821, entérinant le résultat de négociations entre Louis XVIII et le pape Pie VII, rétablit trente évêchés dont celui d'Albi. Le nouveau siège a un ressort étendu au territoire du département et une prééminence métropolitaine, comme autrefois, sur les sièges de Cahors, Mende et Rodez, auxquels est ajouté celui de Perpignan.
Sous la crosse des nouveaux archevêques, le diocèse d'Albi (autrement dit du Tarn) va connaître pendant plus d'un demi-siècle une période de vitalité heureuse qu'a esquissée le chanoine L. de Lacger dans un des derniers chapitres de son Histoire religieuse de l'Albigeois, et qu'avait suggérée avant lui Ch. Portai dans les notes statistiques sur Les cultes qui forment le chapitre IV de son Tarn au XIXe s., ouvrages auxquels nous conseillons vivement qu'on se reporte pour plus de précision et de détail. A la base ou signe de cet essor : reconstitution rapide du corps ecclésiastique, stimulée par la création du grand Séminaire d'Albi en 1837, par le succès des petits séminaires (Massais, Castres, Lavaur créé en 1840) et des écoles chrétiennes qui se multiplient après la loi Falloux (1850), le renouveau de la vie religieuse par la rentrée en scène, dès l'Empire, de plusieurs congrégations traditionnelles, à commencer par les enseignantes (Frères des Écoles chrétiennes, Sœurs de la Sainte-Croix de Lavaur, Dames de la Présentation de Castres, etc.) ou les caritatives (Filles de la Charité), bientôt par l'installation ou la fondation d'ordres nouveaux. Avant même le Second Empire : Filles de Notre-Dame d'Albi, Sœurs de Saint-Joseph d'Oulias, Sœurs du Sacré-Cœur de Jésus à Valence, Dames du Bon-Sauveur de Caen (Albi, 1832), Sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition, Sœurs de l'Immaculée-Conception de Castres. Mais le mouvement ne s'arrête pas de sitôt : la célèbre École des Bénédictins de Sorèze, passée en des mains séculières par suite de la Révolution, trouve une nouvelle jeunesse en 1854 sous la direction du Père Lacordaire qui y introduit le tiers-ordre dominicain. Bientôt, c'est la famille franciscaine, en l'espèce le tiers-ordre régulier de Saint-François, restauré sous l'inspiration de l'abbé Clausade, enfant de Lavaur, qui s'installe à Ambialet en 1864, faisant renaître la vie religieuse dans l'antique prieuré victorin. Jusque vers le déclin du siècle se poursuit le développement en nombre et en force des congrégations : l'Orphelinat Saint-Jean d'Albi, œuvre du Père Colombier, remonte à 1885, et les fils de Saint-Benoît se fixent à Dourgne, en 1888, pour mener la vie contemplative.
La multiplication de ces maisons religieuses, dont plusieurs sont missionnaires, ne sont pas le seul signe de vie dans l'Église catholique albigeoise. L'abondance des vocations et la montée démographique des campagnes poussent à la multiplication des paroisses et succursales. L'aisance que procure le régime concordataire favorise l'entretien du patrimoine bâti et la construction - notamment sous Napoléon III - de nouveaux édifices cultuels.
Mais déjà évoluent les conditions longtemps favorables à l'essor de l'Église catholique. Trop liée au pouvoir politique sous les régimes monarchiques, l'Église rencontre l'hostilité du pouvoir dès l'avènement de la prépondérance républicaine et laïque en 1879.
L'histoire de l'Église du Tarn, qui avait été assez remarquable dans sa prospérité par son dynamisme missionnaire, garde du caractère par certains traits sur le versant de la contestation. La querelle des manuels scolaires, de Paul Bert et de Gabriel Compayré, illustre bien la revanche de l'esprit laïque dans l'effort général de l'éducation. On s'y passionne d'autant plus que Compayré était tarnais, et même député du Tarn.
C'est encore un tarnais d'origine, mieux, un ancien séminariste de Castres et d'Albi, Emile Combes, qui devenu chef du Gouvernement, impose la séparation des Églises et de l'État en 1905, tandis qu'à ce même moment, l'archevêque d'Albi, Eudoxe-Irénée
Mignot, joue un rôle important dans les efforts de l'Église en France pour s'adapter à son temps.
Ainsi, le Tarn offre-t-il dans son histoire religieuse moderne quelques aspects qui en relèvent l'intérêt au-delà de la localité sans que diminue la valeur qui s'attache à celle-ci.
L'Église réformée est une minorité (à peine 5 % de la population), mais importante par le poids de son influence surtout dans la région où elle est implantée (sud-est du département). Son statut est défini dans les articles organiques contemporains du Concordat (2 avril 1802) complétés notamment par l'arrêté des Consuls du 27 messidor an XI (16 juillet 1803) qui définit les quatre consistoires de Castres, Mazamet, Lacaune et Vabre. Cette Église offre aussi l'image d'un effort de structuration et d'expansion missionnaire, mené dans la stabilité démographique, facilité par un apaisement progressif, mais décisif, des querelles religieuses avec l'Église romaine, en dépit de quelques problèmes de détail.
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On ne saurait trouver dans la série V réponse à toutes les grandes questions qui peuvent se poser sur la vie des institutions ou sur l'histoire religieuse des tarnais depuis la fin de la Révolution ; la trace de ces faits n'y est inscrite que dans la mesure où la vie des Églises fut soumise à l'intervention ou à la surveillance administrative, c'est-à-dire d'une façon assez extérieure, bien qu'importante et suggestive.
Ce fonds d'origine préfectorale ne saurait remplacer tout à fait les fonds particuliers des institutions ecclésiastiques, qui forment au contraire le corps de nos séries ecclésiastiques d'Ancien Régime (G et H), lorsque leurs archives n'ont pas subi trop d'atteintes. Toute recherche sur la pratique religieuse, par exemple, ne trouvera ici que des moyens indirects. Il faut aussi tenir compte des lacunes propres à notre dépôt. Ainsi peut-on déplorer que les comptes de fabriques ne soient conservés, sauf exception, que pour les dix à quinze dernières années de la période concordataire.
Quelles sont alors les principales richesses de notre série V ? En suivant l'ordre du classement, signalons les dossiers relatifs à la police des cultes (1 V 4-13), où peuvent être relevées des indications significatives. Ceux relatifs à la circonscription des paroisses, aux érections de succursales, par les motifs exposés dans les correspondances avec les municipalités, les ingérences des pouvoirs publics dans ce domaine. Les registres des comptes de dépenses des cultes peuvent livrer d'utiles moyens de comparaison chronologiques ou géographiques.
La série V est précieuse pour l'étude du clergé, tant au point de vue statistique que pour les notes sur l'attitude politique de ses membres. Il est bon de signaler que l'art. 1 V 343 (Évêques) contient quelques pièces relatives à un projet d'érection de diocèse à Castres (1817). On ne s'étonnera pas de trouver plusieurs articles (1 V 212-217) sur l'affaire des manuels scolaires de Paul Bert et de Compayré (1882-1883). Soulignons l'utilité des dossiers personnels des curés et desservants (1 V 350-395) qui couvrent toute la période concordataire.
Il faut insister sur l'intérêt des liasses relatives aux édifices diocésains : cathédrale d'Albi, archevêché, séminaires (1 V 436 et suiv.). C'est ici et non dans la série T (Monuments Hist.) que l'on trouvera, en dehors des archives parisiennes de la Direction de l'Architecture et de la série F 19 des Archives nationales, les dossiers les plus utiles sur les restaurations et l'entretien de ces édifices au XIXe siècle. Malheureusement, il n'y a pas de plans dans les dossiers des travaux relatifs à la cathédrale d'Albi. Pour l'archevêché (La Berbie), on cherchera dans la série N ce qui concerne cet édifice pendant le temps où il fut affecté à la Préfecture et autres services départementaux.
Si les comptes des fabriques ont subi des éliminations excessives et ne sont en général pas antérieurs, comme nous l'avons dit, à la dernière décade du XIXe siècle, en revanche, les articles 1 V 732-809 qui concernent la gestion du patrimoine des Églises, sont homogènes et bien pourvus. Ils devront être consultés pour l'évaluation des ressources et le rôle des fabriques. Les renseignements qu'on y trouve sur les fondations de messes, donnent même des aperçus sur certaines manifestations de la vie religieuse. Toutefois, les titres qui fondent ces ressources, donations et legs, appartiennent à la sous-série 4 O. La série V ne retient que les pièces de gestion.
Les articles 1 V 822-829 et 832-834 (travaux relatifs aux églises paroissiales et aux presbytères) seront à compléter par les dossiers des communes dans la sous-série 2 O, et en principe par ceux conservés dans les mairies.
Comme pour l'Église catholique, les articles relatifs au culte réformé sont assez riches de renseignements sur les pasteurs. On peut noter des états nominatifs de fidèles pour quelques églises (1 V 845).
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L'application de la loi de séparation des Églises et de l'État (loi du 9 déc. 1905) a produit un fonds spécial qui n'est qu'en partie classé dans la sous-série 2 V. La plupart de ces pièces intéresse évidemment le culte catholique. Les opérations de l'inventaire ont donné lieu de ce côté à de nombreux incidents, surtout dans le sud-est du département, dont la sous-série conserve les rapports. Mais les inventaires eux-mêmes, les documents relatifs aux expulsions, au séquestre des biens sont placés dans la série Q (Domaines). Notons en passant qu'ils sont dressés bien sèchement. Pour les objets, en particulier, l'opération eût pu offrir un réel intérêt documentaire, si elle avait été menée dans la sérénité, avec le souci d'une identification suffisamment rigoureuse des objets. Tel ne fut pas le cas.
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L'existence des corporations religieuses, par les services rendus à la collectivité civile (enseignement, assistance...), par le dynamisme manifesté, par l'influence exercée, tant sur le peuple que sur l'élite, est un aspect fort important de la vie de l'Église. C'est faire saisir l'intérêt qui s'attache aux 114 articles de la sous-série 3 V. Mais le contenu n'est pas rigoureusement homogène.
L'essor des congrégations, qui se manifeste, soit par des retours, soit par des créations ou implantations nouvelles, a été le fait d'un élan religieux qui ne s'embarrassait pas nécessairement du souci de la reconnaissance légale. A la tolérance sinon la sympathie du pouvoir, jusqu'au Second Empire, pour la plupart des familles religieuses, succéda, sous la République laïque, la mise en œuvre d'un contrôle systématique et d'une discrimination officielles, frappant surtout d'abord les ordres enseignants, puis l'ensemble des congrégations.
Dans la première partie de la sous-série 3 V, on trouvera les renseignements recueillis et les documents généraux établis par l'administration en application des trois régimes successifs que connurent les congrégations depuis le Concordat : régime de l'autorisation préalable de principe et de la tolérance de fait (décret du 3 messidor an XIII), celui de l'autorisation rigoureuse (décret du 29 mars 1880), celui de l'application de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations et de la suppression de l'enseignement congréganiste (loi du 7 juillet 1904).
La partie la plus volumineuse de la même sous-série est composée des dossiers particuliers à chaque congrégation. Celles qui ont été fondées dans le Tarn, surtout féminines, sont bien représentées. Mais il n'y a pas seulement là des détails significatifs. C'est aussi dans ces dossiers qu'on rencontre les documents les plus récents. En effet, tout ce qui peut toucher la police des cultes ou les associations religieuses laïques après la loi de séparation appartient normalement à la série M (sous-série 4 M en particulier), mais la survie des maisons religieuses et le maintien d'une vigilance administrative ont nourri certains dossiers bien au-delà de la guerre 1914-18. On peut y découvrir, à l'occasion, des notes curieuses comme celles de l'article 3 V 38 où l'on apprend comment un conflit s'éleva, avant les municipales de 1925, au sujet de l'inscription des moines d'En Calcat sur les listes électorales.
Les dossiers particuliers des congrégations seraient en principe à compléter par certains dossiers de la sous-série 1 T (Écoles et institutions libres). C'est ainsi qu'on y cherchera les rares pièces en notre possession sur l'École de Sorèze depuis sa reprise en mains par le Père Lacordaire et les dominicains.
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Les Archives départementales pourraient offrir encore certains compléments dans les séries X (Hospices, orphelinats...), Y (aumôniers des prisons : cf. 22 Y 1,34 V 1) et encore dans la série J (entrées par voie extraordinaire) : notons plus spécialement les cotes provisoires J 53/1-4 (quelques papiers provenant de M. Gaurel, supérieur du séminaire de Castres, 1808-1834), J 54/28 (conférences ecclésiastiques du district de Salvagnac, 1835-1869), J 54-21 (église St-Pierre de Gaillac, 1835-1850), J 60/27-28 (Union catholique des Hommes du Tarn, 1927-1931), J 70/28-36 (paroisse de St-Sernin-les-Mailhoc, XIXe s.), J 71/15 (confrérie de Sainte-Thérèse, d'Albi, 1830-1893), etc. Mais il ne faut pas oublier la bibliothèque : publications ecclésiastiques officielles, impressions de circonstance, ou de polémique, ouvrages historiques, biographiques, statistiques, journaux paroissiaux, depuis la fin du XIX" siècle pour quelques-uns. L'abondance de la documentation imprimée sur les Églises nous a paru si importante et utile pour compléter les ressources des fonds, que, en l'absence d'une autre vue d'ensemble où renvoyer le lecteur, nous avons annexé au présent répertoire une bibliographie assez détaillée de l'histoire religieuse du Tarn pour la période 1800-1940. Elle est dressée plus spécialement en fonction des richesses de notre bibliothèque et comporte quelques lacunes volontaires de détail. Ainsi n'avons-nous pas signalé, par souci d'allégement, tous les mandements, lettres pastorales et autres actes des archevêques publiés à part, dont nous sommes assurés qu'on peut les retrouver, soit dans La Semaine religieuse à partir de 1885 (notre collection ne commence malheureusement qu'au tome XIII), soit dans la bibliothèque des Archives (trois liasses de mandements et lettres pastorales tirées à part, de 1803 à 1899), soit éventuellement aux archives de l'archevêché.
Parmi les sources documentaires extérieures aux Archives du Tarn, les premières en intérêt sont évidemment celles de l'archevêché. Elles ont subi bien des vicissitudes et sont loin d'avoir l'importance qu'on attendrait, comme on le voit d'après la notice de J. Gadille signalée à la bibliographie. Les archives des églises paroissiales devraient être consultées pour toute étude relative à ce cadre, mais leur situation est actuellement très précaire, surtout, mais pas exclusivement, celles des paroisses sans prêtre résidant. Le dépôt de ces archives à l'archevêché est souhaitable. Enfin, les maisons religieuses, les maisons-mères notamment, ont certainement des fonds utiles, sur lesquels nous avons peu de renseignements directs, mais qui ont souvent été exploités dans les monographies historiques ou biographiques, assez nombreuses, publiées sur ces congrégations.
Nous avons déjà fait allusion aux ressources de la série F19 (cultes) des Archives nationales. On consultera le tome III de l'état sommaire des versements faits aux Archives nationales... (1933), p. 71-172, passim, et le supplément (1982), p. 443-453. D'autres séries peuvent offrir quelque intérêt. Citons seulement, pour orienter, les cotes F4 584, F7 12387 et suiv., F20 738.
Nous ne terminerons pas sans faire allusion aux moyens que pourraient offrir les archives du Vatican, en renvoyant à l'article que leur a consacré M. Cholvy dans les Annales du Midi de 1969.(Qui signale p. 229 les rapports ad limina de Mgr de Jerphanion (1853), de Mgr Lyonnet (1872) et de Mgr Mignot (1901).
Nous espérons offrir à la Recherche, grâce au classement de cette série et au très clair répertoire de M. Jean Armingaud, grâce aux compléments bibliographiques qu'il nous a paru opportun d'y annexer, un moyen efficace pour approfondir cette histoire de l'Église concordataire et post-concordataire qui ne peut manquer d'être un objet d'études à mesure que se précise une phase nouvelle de la vie de l'Église.

Publication :

Archives départementales du Tarn
1974, 1992
Albi

Informations sur le producteur :

Producteur:
Tarn. Préfecture

Informations sur l'acquisition :

Modalités d'entrée aux Archives départementales du Tarn
Versements du XIXe siècle à 1992

Conditions d'accès :

Statut juridique Archives publiques

Description physique :

Description physique:
Nombre de fiches de description
Nombre de fiches de description: 1243

Organisme responsable de l'accès intellectuel :

Archives départementales du Tarn

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAD081_Serie_V

Institutions :

Tarn. Préfecture

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