Inventaire d'archives : Inventaire des dossiers de réception des bulles et brefs relatifs aux cardinaux, archevêques et évêques

Contenu :

1. La législation relative à la réception, l'exécution et la publication des actes émanant du Saint-Siège.
Les « articles organiques » du 18 germinal an X qui accompagnaient la publication de la « convention du 26 messidor an IX » passée entre le Saint-Siège et le gouvernement français (mieux connue sous le nom de Concordat de 1801) stipulaient à son titre I :
« , . » (article 1 ). Aucune bulle, bref, rescrit, décret, mandat, provision, signature servant de provision, ni autres expéditions de la cour de Rome, même ne concernant que les particuliers
Un décret du 28 février 1810 (art. 1) exclura de cette mesure les brefs de la Pénitencerie . pour le for intérieur
ne pourront être reçus, publiés, imprimés ni autrement mis à exécution sans l'autorisation du gouvernementer
« » (Art. 2). Les décrets des synodes étrangers, même ceux des conciles généraux, ne pourront être publiés en France avant que le gouvernement en ait examiné la forme, leur conformité avec les lois, droits et franchises de la République française et tout ce qui, dans leur publication, pourrait altérer ou intéresser la tranquillité publique.
Ce faisant, les articles organiques de 1802 ne montraient aucune originalité par rapport à la pratique de l'Ancien régime où la réception, l'exécution et la publication des actes romains — sauf ceux concernant le for intérieur — dépendaient déjà, depuis 1475 , de la permission du roi et où, notamment, les bulles dogmatiques devaient être publiées par lettres patentes enregistrées par les Parlements . Ces procédures se faisaient au nom de la protection des libertés de l'Eglise gallicane, mais en réalité, elles visaient à sauvegarder le pouvoir royal.
Ordonnance du 8 janvier 1475.
Donnée directement ou, indirectement, par ses officiers ou juges.
C'est ainsi que les actes du Concile de Trente ne furent jamais officiellement reçus en France et que l'Eglise de France en accusa seule, et illégalement, réception dans son assemblée de 1615.
Au XIX siècle, l'autorisation gouvernementale prend la forme d'un décret (ou, selon les époques, d'une ordonnance) ou d'un simple arrêté qui permet la publication ou la mise en œuvre de l'acte pontifical en cause. Ce décret (ou cette ordonnance) ou cet arrêté est rendu sur avis du Conseil d'Etat (traitement du dossier par la section de l'Intérieur ; avis rendu par l'Assemblée générale du Conseil) : e
(Béquet, , 1891, t. 8, p. 156, art. 206). « C'est également en Conseil d'État que sont reçus et enregistrés toutes les bulles et autres écrits de la cour de Rome. Les actes sont transcrits en latin et en français sur les registres et mention est faite par le secrétaire général du Conseil, sur l'original de l'acte que cette formalité a été remplie »Répertoire du droit administratif
» (Béquet, , 1891, t. 8, p. 156, art. 207). « Si l'acte émane de la cour de Rome, le décret qui en ordonne la publication contient toujours la réserve suivante :sans approbation des clauses, formules ou expressions qui pourraient être contraires aux lois de la République, aux franchises, libertés et maximes de l'Église gallicaneop. cit.
2. Les actes romains relatifs aux cardinaux, archevêques et évêques.
Parmi les documents émanant de la cour de Rome, se trouvaient les bulles et brefs relatifs aux cardinaux, archevêques et évêques qui touchaient à leurs nominations, à leurs attributions et aux dignités ecclésiastiques qui pouvaient leur être accordées.
était strictement réglementée par la Conven-tion de messidor an IX et par les articles organiques de l'an X : La nomination des archevêques ou évêques
» (Convention, art. IV). « Le premier Consul de la République nommera, dans les trois mois qui suivront la publication de la bulle de sa Sainteté [relative à la démission de tous les archevêques et évêques français], aux archevêchés et évêchés de la circonscription nouvelle. Sa Sainteté conférera l'institution canonique, suivant les formes établies par rapport à la France avant le changement de gouvernement
C'est-à-dire le Concordat de 1516.
(Convention, art. V). « les nominations aux évêchés qui vaqueront dans la suite seront également faites par le premier Consul, et l'institution canonique sera donnée par le Saint-Siège, en conformité de l'article précédent »
« Le prêtre nommé par le premier Consul [comme archevêque ou évêque] fera les diligences pour rapporter l'institution du Pape.
(articles organiques, titre II, art. XVIII). Il ne pourra exercer aucune fonction avant que la bulle portant son institution ait reçue l'attache du Gouvernement... »
Le cas des archevêques ou évêques n'est abordé ni par la Convention de messidor an IX ni par les articles organiques de l'an X. Les modalités de leur nomination diffèrent de celles des autres archevêques ou évêques puisqu'il faut distinguer ici les archevêques ou évêques nommés directement par le Pape ( ) de ceux nommés à la demande du gouvernement français en tant que coadjuteurs d'un archevêque ou évêque déjà en place, avec ou non promesse de succession ( ) . Mais pour les uns et les autres des prélats , une bulle d'institution canonique est promulguée qui doit être entérinée par le gouvernement français, selon la procédure établie pour les autres archevêques ou évêques, c'est-à-dire par décret, ordonnance ou arrêté pris sur avis du Conseil d'Etat. in partibus Infideliumin partibusproprio motucum futura successione
Après la mort du prélat, le coadjuteur nommé avec future succession devient archevêque ou évêque sans promulgation de nouvelles bulles.
in partibus
D'autres bulles ou brefs, en sus de la bulle d'institution canonique, sont expédiés lors de la nomination des archevêques ou évêques. D'après ce que nous livrent les dossiers conservés dans la sous-série F (Cultes) du Centre historique des Archives nationales, on peut établir la liste suivante (dont l'exhaustivité n'est pas garantie) : 19
. bulle annonçant au chef de l'Etat français la nomination en cause ;
. bulle d'institution canonique ;
. bulle attribuant ses facultés au futur archevêque ou évêque ;
. bulle annonçant sa nomination au futur archevêque ou évêque ;
. bulle(s) annonçant cette nomination à l'archevêque métropolitain concerné ou, à l'inverse, aux évêques suffragants concernés ;
. bulle annonçant cette nomination au chapitre du diocèse concerné ;
. bulle annonçant cette nomination au clergé du diocèse concerné ;
. bulle annonçant cette nomination aux fidèles du diocèse concerné.
3. Réception, exécution et publication des actes romains relatifs aux cardinaux, archevêques et évêques.
seront l'objet d'une particulière vigilance de la part du gouvernement français tout au long de la période concordataire. Une importante querelle entre le gouvernement français et le Saint-Siège autour de leur rédaction marquera les débuts de la III République : la querelle du . La formule « » employée par le Pape pour exprimer le fait que le chef de l'Etat français nomme les nouveaux archevêques ou évêques était parfaitement traditionnelle, puisque reprise des termes du Concordat de 1516. Mais la III République commençante la trouvait trop ambiguë et voulait que le « » soit supprimé . En définitive, le gouvernement français n'obtiendra pas gain de cause et le « » sera maintenu par la chancellerie pontificale. Cette présence comme ce maintien était, en fait, de peu de conséquence pour la France dans la mesure où, comme il a été dit plus haut, « ». Les bulles d'institution canoniqueenobis nominavitnobis nominavitenobis
Cette querelle avait été précédée d'une autre concernant le terme « » utilisé par la chancellerie pontificale en doublon de « ». Sur ces questions , F 1952, et 1954-1957. praesentavitnominavitcf.19
nobisle décret qui en ordonne la publication [des actes émanant de la cour de Rome] contient toujours la réserve suivante :sans approbation des clauses, formules ou expressions qui pourraient être contraires aux lois de la République, aux franchises, libertés et maximes de l'Église gallicane
Malgré l'attention que le gouvernement français leur porte, les bulles d'institution canonique, sauf exception, ne seront pas publiées au , durant la plus grande partie de la période concordataire. Elles le seront en revanche sous la III République où elles apparaissent à la suite du décret (ou de l'ordonnance) qui prescrit leur publication. ( annexe 1). Bulletin des loiseCf.
qui accompagnent la nomination des archevêques ou évêques ne donnent, en général, pas lieu à réception ni à publication au . Les autres documentsBulletin des lois
La réception semble ,en revanche, appliquée pour nombre d'  : autres bulles ou brefs
. conférant le cardinalat,
. attribuant le pallium,
. conférant le titre de comte romain et d'évêque assistant au trône pontifical,
. autorisant le port d'une décoration aux chanoines,
. accordant des pouvoirs spirituels aux aumôniers de la flotte,
. autorisant les évêques à joindre à leur titre ceux d'évêchés supprimés,
. conférant le titre de protonotaire apostolique , ad instar participantium
. etc.
Il semble, en fait, que la pratique administrative se soit réduite pour la réception effective aux documents romains ayant une portée générale (encycliques, jubilés, etc.), touchant aux circonscriptions (érection, suppression ou modification de diocèses), nommant à des postes ecclésiastiques importants (légats, archevêques et évêques) ou attribuant de hautes dignités (cardinalat, ). Une note due à M. de Berty, , datée du 27 juillet 1852, explique ainsi : palliumXXX
« Tous les gouvernemens qui se sont succédés en France depuis 1802 jusqu'à nos jours ont fait exécuter très exactement cet important article
Art. 1, titre I des articles organiques du 18 germinal an X. . Cf. supra
en ce qui concerne les bulles d'institution canonique des évêques et les bulles d'intérêt général, comme celles par exemple, qui ont déterminé ou modifié la circonscription des diocèses, créé de nouveaux évêchés, ordonné des Jubilés etc....
» Mais malgré toutes les recherches faictes dans les archives et les bureaux de l'adminis-tration des Cultes, on n'a pu découvrir la preuve que l'autorisation du gouvernement ait été exigée pour les brefs, rescrits et autres actes de la cour de Rome qui n'intéressent que les particuliers ou qui n'ont pas un but évident d'intérêt public.
F 1952. 19
La valeur ou publication de tels actes, cependant, était nulle ou illégale s'ils n'avaient pas été reçus dans les formes prescrites par les articles organiques. Dans la même note, M. de Berty précise :
« » cet article n'a jamais cessé d'être en vigueur depuis 1802, le Conseil d'Etat et les tribunaux en ont fait l'application dans toutes les circonstances ; la cour de Cassation a décidé notamment par un arrêt du 16 8bre1809 qu'un bref du Pape relatif à un mariage et dont la réception n'avait pas été autorisée ne pouvait servir de base à une décision judiciaire ; qu'un tribunal qui se fonde sur un acte de cette nature viole la loi du 18 germinal an X et que son jugement doit être annulé.
Berty rappelle aussi que les ecclésiastiques publiant sans autorisation un acte émanant du Saint-Siège sans en avoir demandé l'autorisation s'exposent à ce que s'engage contre eux une procédure d'appel comme d'abus de la part du gouvernement, au titre de la protection des libertés de l'Eglise gallicane protégées par les articles organiques du 18 germinal an X (titre 1, art. 1). Les poursuites pour abus sous ce motif, limitées jusqu'au 2 Empire, deviendront fréquentes sous la III République. nde

Cote :

F/19/2597/A-F/19/2608/A

Publication :

Archives Nationales
2013

Localisation physique :

Pierrefitte

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAN_IR_027859

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