Inventaire d'archives : Archives de la famille Charmasson, dit Dalcy (1912-1978)

Contenu :

Les archives de la famille Charmasson, dit Dalcy permettent de voir la trajectoire de trois générations d'une famille de music-hall mais aussi de suivre l’évolution de ce genre de spectacle entre 1912 et 1965. Le fonds comprend à la fois des documents iconographiques (photographies, affiches et presse) et des documents administratifs (contrats, livres de comptes, livres d'or avec recommandations). Ces deux catégories de documents se complètent et offrent un aperçu de la création, de la diffusion et de l'économie du music-hall en France et en Europe.
Le fonds a été constitué par Louis Charmasson. Il couvre principalement l’activité artistique qu’il a déployée en tournées au sein d’un trio de "jongleurs comiques", avec son père, Fernand Charmasson dit Harris Dalcy, et son frère Émile entre 1925 et 1951. Après le décès d'Émile et la dissolution du trio, les documents conservés informent sur l’activité de Louis au sein d’un duo de "jonglerie musicale" avec son épouse Monique Girard de 1951 à 1962 puis avec sa fille Christiane de 1962 à 1965.
Ces archives permettent de lier la trajectoire familiale à l’histoire, plus vaste, du music-hall. En effet, jusqu'à la Seconde guerre mondiale, la scène du music-hall est internationale, les contrats hors de l'hexagone sont monnaie courante. Le trio s'insère dans cette dynamique et parcourt les scènes et les pistes les plus renommées d’Europe (il se produit dans les cirques Schumann à Copenhague, Strasburger à Amsterdam, Beketow à Budapest ou encore le Coloseo de Recreos de Lisbonne et l'Apollo theatre de Düsseldorf). La France compte également des scènes prestigieuses à Paris, où ils évoluent également, comme le Théâtre de l'Empire, de l'Alhambra et le Cirque Médrano mais aussi en province avec le Casino de Nice où la bourgeoisie européenne continue de venir en villégiature. Les tournées avec les cirques Pinder et Amar ou avec des impresarii complètent l'offre des spectacles.
Les archives concernant Fernand, dit Harris Dalcy et sa femme Félicie avant 1925 se cantonnent à quelques papiers d’état civil et des photographies concordant avec les descriptions de la la presse qui encensent un "merveilleux jongleur", un "jongleur gracieux et adroit" (même avec des blaireaux de coiffeur, sa formation initiale !). Une lettre du journaliste Paul Hendwood, dit Adrian adressée à Louis au moment du décès de son père traduit la place que Fernand puis le trio ont su se faire sur les scènes dédiées au music-hall.
Comme dans la plupart des familles de music-hall et de variétés, les archives mêlent étroitement vie privée et vie publique.
Les albums confectionnés par Louis de 1929 à 1938 révèlent cette imbrication. Louis dispose d'un appareil photographique qui lui permet de capter sur la pellicule la frénésie des rencontres et une part d'insouciance propre à l'entre-deux-guerre. Sur les clichés pris en Europe du nord à cette période, des groupes des deux sexes exercent leurs corps à la plage, loin du conservatisme réintroduit par le régime de Vichy en France dans les années qui suivent. Le trio est parfois immortalisé devant les façades des salles avec son nom en lettres de lumière, ou à l'intérieur, lors des répétitions et des représentations. Ces albums sont également des albums de famille qui montrent que la "Villa Dalcy" près de Marseille regroupe épisodiquement les membres de la famille élargie, oncles, tantes, cousines.
Les photographies isolées permettent quant à elles de comprendre l'occupation de l'espace scénique par le trio et sa capacité à jouer sur les pistes circulaires des cirques. Leur numéro, souvent salué comme dans cette rubrique du journal du 11 octobre 1944 à propos d'une représentation au Lido, fait "excellente figure avec ses jongleries ultras-rapides, ses chassés-croisés étourdissants et la bonne humeur de sa présentation. C'est un numéro personnel et fort sympathique". L’avènement du duo en 1951 réduit les représentations à un dispositif frontal.Le Soir
Dans l’histoire du music-hall la période de la guerre marque un coup d'arrêt. L’itinérance des artistes dans la France occupée et en Europe se restreint significativement. Les archives des "Dalcy" présentent cette rupture. Le cahier d'instruction militaire laisse penser que Louis a été mobilisé à Paris en 1939-1940 expliquant l'absence de spectacles consignés pour cette période dans son récapitulatif de carrière pour faire valoir ses droits à la retraite. Le trio subsiste grâce aux scènes de la zone libre (les arènes de Nîmes, le Casino municipal de Nice, les Variétés Théâtre de Marseille) ou au Théâtre des Célestins de Lyon. Il ne revient à Paris qu'à partir de mai 1943 pour jouer dans des salles comme L'Européen, l'A. B. C., l'Étoile ou encore Bobino. À Paris les artistes se croisent et jouent sur les mêmes scènes comme en témoignent les photographies dédicacées telle celle offerte par Maurice Chevalier en juin 1945 à l'A.B.C. Dans l'effervescence de la Libération, d'août à septembre 1945, le trio entame une tournée en zone libre pour les américains puis renoue avec l'itinérance grâce aux troupes militaires américaines qu'il accompagne de mars à septembre 1946 en Allemagne. Mais les décès de Félicie en 1949 puis surtout d'Émile en 1952 mettent définitivement fin au trio. C'est aussi la fin des déplacements en Europe et des grandes tournées en Afrique du nord.
La carrière artistique de Louis prend un nouveau tournant au moment de la constitution du duo formé avec son épouse Monique Girard, jusqu'alors accompagnatrice au piano de vedettes de la chanson. On notera qu'une partie du fonds concerne la formation musicale qu’elle a reçu au conservatoire de Marseille et ses débuts de musicienne. La musique devient un aspect important dans la complicité scénique du duo. Monique joue de l'accordéon alors que Louis jongle en rythme avec des balles, des massues et des chapeaux-claques. En 1947 lors d’une tournée à Stockholm au Djürgarden Circus, le clown Grock initie Monique au xylophone et lui offre une réplique en bois de palissandre de son instrument. Les archives témoignent du matériel acheté pour la mise en place du final du numéro avec le xylophone. Il a lieu en lumière noire. Le numéro ainsi constitué tourne avec les Chansonniers mais aussi sous l'égide de Roger Rigolet. Une importante correspondance avec l'impresario est ici conservée et dévoile des difficultés financières entre le directeur de tournée et les artistes qu'il produit. La confrontation entre les comptes tenus par Louis notamment pour les tournées "Boum ! Boum ! voilà Montmartre" et les échanges de lettres avec Roger Rigolet permettent de cerner la fragilité entrepreneuriale des artistes de music-hall soumis à des impresarii mauvais gestionnaires, voire malhonnêtes. Plusieurs reconnaissances de dettes signées par Roger Rigolet en témoignent. Les livres de comptes consignent les cachets touchés par le trio et les duos mais aussi les dépenses journalières de la famille. Les sommes vouées à l’éducation de Christiane et ses besoins courants en habits le montrent. L’achat d’une caravane a également dû faire baisser les coûts des nuitées d'hôtel lors des tournées. La correspondance avec Roger Rigolet est intéressante aussi parce qu'elle évoque l'actualité des spectacles à Paris comme dans la lettre du 9 avril 1953 où il est question des acrobates Ronco à Médrano.
Enfin, la réception des spectacles est visible dans la presse et la documentation conservée. Les livres d'or constitués par Louis qui mêlent coupures de presse et recommandations des directeurs de cinéma lors des spectacles donnés pendant les entr'actes font également état de cette réception. Une attention plus approfondie à la terminologie des recommandations permettrait peut-être de déceler un standard dans l’expression de la reconnaissance et de la satisfaction envers le grand professionnalisme de la famille.
Ce fonds d’archives intéressant par ses aspects artistiques et administratifs peut donc permettre de retracer une trajectoire familiale, servir de point de comparaison avec d’autres fonds d’artistes de music-hall conservés dans d’autres institutions et apporter de nouveaux jalons à l’histoire de ce genre.

Cote :

20180765/1-20180765/11

Publication :

Archives nationales de France
2019
59 rue Guynemer 93380 Pierrefitte-sur-Seine

Informations sur le producteur :

Charmasson, dit Dalcy (famille ; 1888-1979)
Charmasson, Christiane (1943-....)
Voir les notices des producteurs "Famille Charmasson, dit Dalcy" et "Christiane Charmasson".

Informations sur l'acquisition :

Don.
Historique de conservation :
L'ensemble des archives iconographiques (affiches, cartes postales, photographies) ont fait l'objet d'une campagne de restauration et de numérisation par les ateliers des Archives nationales en 2021 et 2022. Toutes les photographies librement diffusables, sous couvert du Code la propriété intellectuelle, ont été mises en ligne dans cet inventaire. Les autres devront attendre de tomber dans le domaine public.

Description :

Critères de sélection :
Élimination ou restitution des doubles.

Conditions d'accès :

Librement communicable.

Conditions d'utilisation :

Selon le règlement en salle de lecture.

Langues :

FrançaisAnglaisEspagnol

Description physique :

Importance matérielle :
10 articles.

Ressources complémentaires :

Archives nationales
  • Administration des Beaux-Arts puis ministère de la Culture :
Voir la sous-série F/21 et les versements continus de la direction du théâtre et des spectacles.
Plus particulièrement, les versements 19920486, 19930049, 19930215, 19930493 des dossiers des demandes et arrêtés de délivrance des licences d'entrepreneurs de spectacles. 1946-1992.
Ces dossiers comprennent notamment des demandes d'organisateurs de tournées, d'entrepreneurs de spectacles parfois de music hall qui peuvent contenir des brochures, des programmes, des tracts, des affiches et des photographies.
  • Ministère de l'Intérieur :
  • AJ/9. Haute Commission interalliée des territoires rhénans (HCITR) - Archives du Haut-commissariat français (1918-1930) :
  • 104AS. Fonds de l'association des maisons de la Culture (1930-1939) :
  • 11AR. Fonds Le petit parisien (1879-1962) :
Archives départementales et municipales
  • Archives départementales de l'Hérault
147J. Fonds Suzy Will ([1910]-1967).
  • Archives municipales de Cannes
29S. Fonds de la Société Fermière du Casino Municipal (1921-1977).
Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle
  • Archives et manuscrits
  • Catalogue général
La BnF conserve également de nombreux recueils de presse, des documents iconographiques et des affiches concernant le music-hall en France et à l'étranger mais aussi des recueils concernant des salles dédiées au music hall comme l'Alcazar, les Folies-Bergères, les Ambassadeurs, Bobino et la Cigale.
Ou encore des recueils concernant des artistes comme Louis Maurel, Kam-Hill, Lina Ruby, Emilienne Franville, Louise Fagette, Idette de Brémonval, Sulbac, Max Morel, Lucienne Meyan, Gabrielle de Vere, Louise Dyanthis, Mademoiselle de Landy, Georgette Delmarès, Gabin père, Mary Perret, Fabiani, Mademoiselle Davrigny, Nicoletta, Régiane, Terka, Paul Weil, Jane Allems, Gaby de Naval, Yvonne Reynolds, Mademoiselle de Lilo, Mary Max, Jane Merville, Lucy Murger, Anie Perrey, Marthe Lenclud, Marcel Bovis. (liste non exhaustive)
Archives de la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM)
Voir le dossier de Ursule Azema, dite Suzy Azema, dite Monique Girard.

Références bibliographiques :

Bibliographie sommaire
LESUEUR, Daniel, , Camion blanc, 2018.Les reines du 78 tours : d'Édith Piaf à Dalida
CHAOUCHE, Sabine et EDOUARD, Clara (dir.), , European Drama and Performance Studies, 5, 2015.Consuming Female Performers (1850s-1950s)
JACOB, Pascal, , Magellan & Cie, 2013.Music hall ! : du Mans à Macao
ESPOSITO, Francis, , 2012.Il était une fois le music-hall
CHEYRONNAUD, Jacques, HUREAU, Serge et READ, Victoria, , Paris, Centre national du patrimoine de la chanson, des variétés et des musiques actuelles, Marseille, Centre Norbert Elias, 2011Les mondes du music-hall
HODGES, James, , Paris, G. Proust, 2009.Les trucages du corps : magie, cinéma, théâtre, cocktails, music-hall, animations, congrès, mime, parcs d'attraction...
FOURNAUX, Francine, , coll. Le regard de l'éthnologue n° 20, Paris, éd. du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2009.Belles de Paris : ethnologie du music-hall
CLÉMENT, Martine, , Boulogne-Billancourt, Du May, 2008.Music-hall : demandez le programme !
JANTEL, , éditions du Ver luisant, 2005.Pleins feux sur l'âge d'or du music-hall
DUPUIS-SABRON, Geneviève, , Bordeaux, musée d'Aquitaine ; Paris, Somogy, 2004.Café-concert et music-hall : de Paris à Bordeaux
JANTEL, , Marseille, Club des humoristes phocéens, 1998.Cabot rétro ou 50 ans de music-hall marseillais
JANDO, Dominique, , J. P. Delarge, 1979.Histoire mondiale du music-hall
SEVRAN, Pascal, , O. Orban, 1978.Le Music hall français : de Mayol à Julien Clerc
ADRIAN, Paul, , Paris, 1977.À vous, les jongleurs : art, figures et personnalités
FESCHOTTE, Jacques, , Paris, Presses universitaires de France, 1965.Histoire du music-hall
JACQUES-CHARLES, , Genève/Paris, Jeheber cop., 1956.Cent ans de music-hall : histoire générale du music-hall, de ses origines à nos jours en Grande-Bretagne, en France et aux USA
Académie du cirque et du music-hall (Paris), , édition de Paris, 1954.Histoire du music-hall
AMIEL, Denis et ASTRE, Achille, , Paris, éd. Du Cygne, 1931.Les spectacles à travers les âges, théâtres, cirque, music-hall, cafés-concerts, cabarets artistiques
Annuaires de l'association parisienne de la presse et du music-hall.
Vidéographie sommaire
BARROT, Olivier, , en partenariat avec l'INA. Série de conférences-spectacles au Théâtre de la rive gauche, 2015-2016.La Grande histoire du music-hall français
PHILIPPE, Pierre, . : de à , CNCIA, 2013.Le roman du music-hall219301993
PHILIPPE, Pierre, , Caméras Continentales : Gaumont : la Sept/Arte (prod.) : Pickwick (distrib), 1993.Le roman du Music-hall. 1 : de 1895 à 1929

Localisation physique :

Pierrefitte-sur-Seine

Organisme responsable de l'accès intellectuel :

Archives nationales de France

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAN_IR_057801

Archives nationales

Liens