Page d'histoire : André Masséna Nice (Alpes-Maritimes), 6 mai 1758 – Paris, 4 avril 1817

Surnommé « l’enfant chéri de la victoire » par Bonaparte en Italie, et « le sauveur de la France » pour avoir en 1799 repoussé à Zurich une invasion russe, Masséna a eu une jeunesse difficile. Orphelin de père et abandonné par sa mère, analphabète ne parlant que le dialecte local, il se forme tout seul. La réglementation de l’Ancien Régime l’empêchant de passer officier dans le régiment où il s’est engagé, il démissionne, se marie et s’installe boutiquier à Antibes. Il se réengage en septembre 1791, deux ans plus tard il est général. Un caractère indépendant et énergique malgré une santé fragile, l’ambition et l’intelligence le conduisent à ne compter que sur lui-même avec opportunisme et fatalisme. Conscient d’être peu fait pour la politique et soucieux d’échapper à la pauvreté, il s’attache au chef qui peut favoriser sa carrière. Les relations des deux Méditerranéens ne seront pourtant pas cordiales et alterneront confiance et réserve, postes prestigieux et éloignement. Plusieurs fois on le voit commandant temporaire sur un théâtre secondaire. Mais en 1809 à la tête d’un corps de la Grande Armée, il est à la bataille d’Eckmühl et surtout à Essling et à Wagram où son intervention est décisive. L’échec des opérations au Portugal en 1810 et 1811 lui vaut de la part de l’Empereur le reproche de ne plus être Masséna, il répond : « Si la cause de nos revers n’était qu’en moi, le mal serait réparable. » Insolente lucidité. Sa résistance tenace à Gênes en 1800 « est un fait unique dans l’histoire et qui ressemble plus à une victoire qu’à une défaite » (le ministre Reinhard). Son génie tactique d’inspiration et d’impulsion, son « regard d’aigle » sur le champ de bataille ont fait écrire à Napoléon qu’il avait « des talents militaires devant lesquels il faut se prosterner », et il confiait à Sainte-Hélène qu’il aurait aimé être enterré auprès de lui. Pénétré de sa valeur, il accepte les titres sans s’en targuer, la générosité envers les humbles lui importe davantage. Il n’a pas la fibre monarchique et n’est pas courtisan. Un contemporain a dit : « Masséna n’était pas l’homme d’un homme, il était l’homme de la patrie. » La Restauration tardait à lui rendre son bâton. À sa mort, son gendre dut menacer de déposer sur le cercueil le bâton de maréchal de l’Empire pour que l’oubli soit réparé.Sans doute était-il resté républicain, celui que le chancelier Pasquier, corroborant le jugement de Wellington, estimait « le plus grand homme de guerre que la France ait eu après Napoléon ». Avant tout un esprit libre et un patriote.

Jacques Jourquin
vice-président de l’Institut Napoléon

Source: Commemorations Collection 2017

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