Page d'histoire : François Girardon Troyes, 10 mars 1628 - Paris, 1er septembre 1715

Apollon servi par les nymphes, Versailles, châteaux de Versailles et de Trianon
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Né d’un père fondeur issu d’une famille d’artisans troyens, il devient le protégé du chancelier Séguier qui l’envoie à Rome à ses frais en 1648. De retour à Paris deux ans plus tard, il poursuit sa formation dans l’atelier de François Anguier et se lie avec Le Brun dont il deviendra l’un des principaux collaborateurs sur tous les chantiers royaux. C’est à Vaux-le-Vicomte que se scelle son destin en intégrant le prestigieux triumvirat constitué par Le Nôtre, Le Vau et Charles Le Brun. Il se révèle un décorateur inventif avec ses stucs destinés aux plafonds du château avant de réaliser pour Versailles son premier chef-d’oeuvre, le célèbre groupe d’Apollon servi par les nymphes pour la grotte de Thétis (1666) qui inaugure sa prestigieuse carrière à Versailles et à Marly, où il dirige l’équipe des sculpteurs qui feront du parc et du château du Roi-Soleil le symbole du Grand Siècle. En 1668-1670 il exécute la fontaine de la Pyramide, en plomb, et le fameux Bain des nymphes de Diane, bas-relief avec lequel il rend hommage à Jean Goujon. En 1674 il livre deux autres sculptures emblématiques du classicisme français qu’il incarne, empreint de grandeur et de naturalisme : L’Enlèvement de Proserpine par Pluton et L’Hiver, en réponse au baroque du Bernin dont il reprend la statue équestre de Louis XIV en Marcus Curtius à la demande du roi, installée à l’extrémité du parc, et dont une copie en plomb est installée devant la pyramide du Louvre. Il reçoit plusieurs missions dont celle de surveiller la décoration sculptée des bateaux du roi à Toulon et fournit de nombreuses maquettes. Paré de tous les talents, il ne dédaigne pas de restaurer pour le roi des antiques de sa collection, collectionneur lui-même : la Vénus d’Arles (Louvre) autrefois dans la galerie des Glaces et la série des douze Césars en porphyre et marbre pour le même endroit.

Comblé d’honneurs et de commandes, il est reçu à l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1657 et épouse la même année Catherine Duchemin, peintre de fleurs et première femme à être admise à l’Académie, en 1663. Son morceau de réception, une Vierge de douleur, conservée au Louvre, réunit déjà les qualités qui caractérisent son style : simplicité de la composition, sensualité du modelé ajustée à une retenue émotionnelle, naturalisme des draperies non moins virtuoses aux plis serrés inspirés de l’antique comme on les retrouve dans La Vertu provenant du monument de la princesse de Conti (aujourd’hui au Metropolitan Museum de New York).

Il met son talent d’une inégalable subtilité au service de la sculpture funéraire avec le tombeau de Richelieu à la Sorbonne (1675-1694), celui de Louvois en 1693-1702 (hospice de Tonnerre), de la famille Castellan (1678, église Saint-Germain-des-Prés) et le sien visible dans l’église Sainte-Marguerite à Paris. Portraitiste raffiné, précis et attentif à exprimer la vie il exécute vers 1691 les bustes de Louis XIV et de Marie-Thérèse (Troyes, musée des Beaux- Arts), celui d’Antoine Arnauld (Versailles, musée du château).

C’est à Girardon que revient l’honneur de réaliser pour la place Vendôme la statue équestre de Louis XIV détruite en 1792, connue par des réductions.

Célèbre et admiré, celui qui fut l’un des plus grands sculpteurs français au XVIIe siècle, connaît une défaveur qui le met en marge de la vie artistique autour de 1700.

Lydia Harambourg
historienne critique d’art
membre correspondant de l’Académie des beaux-arts

Source: Commemorations Collection 2015

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