Page d'histoire : Martin Fréminet : décor de la chapelle de la Trinité Château de Fontainebleau, 1608-1619

Compartiment central de la voûte : le Christ du Jugement dernier
entouré des sept premières intelligences et de la Justice
Martin Fréminet
Fontainebleau, château, chapelle de la Trinité
© RMN/J. Derenne

Confié par Henri IV au peintre Martin Fréminet, le décor de la chapelle de la Trinité constitue la grande oeuvre de cet artiste et subsiste presque entièrement de nos jours. La chapelle médiévale primitive, abattue et reconstruite sous François I, avait été achevée sous Henri II. En 1605, Henri IV avait fait bâtir la voûte actuelle et, quelque temps après, avait chargé Fréminet  de sa décoration.

On situe traditionnellement en 1608 le début des travaux du peintre. Sur la voûte en berceau divisée en compartiments de formes et de dimensions variées et encadrés d’épaisses moulures de stuc, l’artiste a déroulé un décor ambitieux, peint à l’huile sur plâtre, où les grandes compositions développent l’histoire de la Rédemption de l’homme. En partant de la tribune de la chapelle, six grandes scènes se succèdent : l’apparition de Dieu à Noé au sortir de l’arche ; la chute des anges rebelles ; le Christ du Jugement dernier, entouré des sept premières intelligences et de la Justice ; l’envoi de l’ange Gabriel par Dieu en vue de l’Incarnation ; l’assemblée des Justes aux limbes en attendant la venue du Fils de Dieu ; enfin une Annonciation, cachée en grande partie par le retable. D’une lecture difficile, le programme iconographique de Fréminet s’inspirait d’un ouvrage du père jésuite Louis Richeôme, Le Pèlerin de Lorette, paru en 1604 et dédié à Henri IV. Disposées autour des scènes principales ou insérées entre elles, le décor comprend aussi des représentations des quatre éléments, de dix vertus, de huit rois d’Israël et de Judée, et des figures de patriarches et de prophètes. Pour les trumeaux entre les fenêtres, Fréminet avait encore composé quatorze scènes de la vie du Christ, remplacées sous Louis XVI par des tableaux en grande partie sur les mêmes sujets.

Né à Paris en 1567, Martin Fréminet était le fils d’un peintre « médiocre » dont il fut l’élève. Vers 1587, il partit en Italie et fréquenta les villes de Rome, Venise et Turin. Sa réputation ayant franchi les Alpes, Henri IV le fit revenir en France après la mort de Toussaint Dubreuil (1602), le nomma en 1603-1604 « peintre et valet de chambre du roi », et l’installa à Fontainebleau – vers 1606 – pour entreprendre le grand ouvrage de la chapelle.

Très marqué par les maîtres des périodes antérieures, tout particulièrement par Michel-Ange, l’art de Fréminet a été diversement apprécié suivant les époques. On a critiqué notamment dans ses oeuvres l’outrance des attitudes, la rudesse des coloris, une certaine extravagance, tout en louant les audacieux raccourcis, l’invention décorative et la virtuosité de ses compositions. Toujours est-il qu’avant sa mort, survenue assez prématurément en 1619, Fréminet avait reçu en 1615 le cordon de l’ordre de Saint-Michel, suprême récompense que pouvait obtenir un artiste, et que le père Dan, dans son Trésor des merveilles de la maison royale de Fontainebleau, publié en 1642, souligne « combien il excellait en son Art, et qu’il y estait aussi sçavant que judicieux ».

 

Danièle Véron-Denise
conservateur en chef du patrimoine
château de Fontainebleau
 

Source: Commemorations Collection 2008

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