Page d'histoire : Louis II de Bourbon 4 août 1337 - Montluçon, 19 août 1410

Détail du gisant de Louis II de Bourbon,
dans l’église prieurale de Souvigny en Bourbonnais
© ville de Souvigny, cliché du musée
 

Devenu duc à la mort de son père, tué à la bataille de Poitiers où le roi Jean le Bon fut fait prisonnier des Anglais, Louis II de Bourbon incarna, dans la France de Charles V et Charles VI, un modèle de prince territorial, étroitement lié à la couronne.

Descendant de Saint Louis en ligne masculine directe, frère de la future reine (le dauphin Charles ayant épousé Jeanne de Bourbon en 1350), Louis de Bourbon fut élevé dans la compagnie des enfants royaux. Il en garda des liens si forts avec Charles V et ses frères, Louis, duc d’Anjou, Jean, duc de Berry, Philippe, duc de Bourgogne, qu’un chroniqueur du XVe siècle dira d’eux qu’ils étaient « cinq têtes royales en un chaperon et d’un seul vouloir ».

Otage à Londres après le traité de Brétigny, il ne regagne la France qu’à la fin de 1366. Il a sa place au Conseil du roi mais se distingue surtout dans l’armée de la reconquête. La mort de Charles V fait de lui un des oncles du jeune Charles VI qui gouvernent le royaume sans qu’il renonce à ses commandements militaires : campagnes de Flandre, expédition contre les Routiers (1385), en Espagne (1387). La courte période du règne personnel de Charles VI le met à l’honneur. Il prend la tête de la « Croisade de Barbarie » en 1390. Aux yeux des « Marmousets », cet officier de carrière sans ambition politique représente le type idéal de prince des fleurs de lis. La modestie de sa principauté, à l’origine duché de Bourbonnais et comté de Clermont-en-Beauvaisis, lui interdit toute visée d’indépendance.

Mais si Louis de Bourbon sert l’État, il s’en sert. Le roi rétribue ses services militaires : de 1 000 francs par mois de 1380 à 1389, ses gages montent à 3 000 francs vers 1400. Ses hauts commandements lui rapportent davantage : 40 000 francs pour l’expédition d’Espagne, sans compter la part qui lui revient des impôts royaux, ainsi que des dons exceptionnels.

L’appui royal, financier et politique, permet au duc de mener une politique d’agrandissement territorial. Le Forez et la seigneurie de Thiers, acquis par son mariage avec Anne Dauphine, la Combraille et la châtellenie de Château-Chinon, le Beaujolais s’ajoutent au duché de Bourbonnais pour former une vaste principauté d’un seul tenant. En 1400, le mariage de Jean de Bourbon avec Marie de Berry prépare le rattachement de l’Auvergne. Le prix à payer au roi est le changement de statut du duché qui doit devenir apanage royal, donc transmissible seulement en ligne masculine.

En même temps, Louis de Bourbon transforme cet ensemble sans unité historique ni linguistique ni même ecclésiastique (car partagé en quatre diocèses) en un véritable espace politique pourvu d’une administration efficace créée sur le modèle royal. Moulins prend rang de capitale avec son château reconstruit par Louis II et sa collégiale Notre-Dame érigée en 1378. Le prieuré clunisien de Souvigny, nécropole des ducs, la Sainte-Chapelle de Bourbon-l’Archambault, berceau de la famille, complètent ces lieux symboliques qui donnent une âme à la principauté.

Après l’assassinat de Louis d’Orléans, Louis de Bourbon se retire dans son duché où il meurt en 1410. Son temps était passé comme celui des princes des fleurs de lis, fleurons et soutiens de la couronne.

Françoise Autrand
professeur émérite des universités

Source: Commemorations Collection 2010

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