Document d'archives : Entretien de Nathalie Balla, présidente directrice générale de la Redoute, et Éric Courteille, co-président.

Contenu :

  • Présentation des témoins.
    00:00:00 - 00:00:35. Nathalie BALLA est co-présidente de La Redoute. Elle est arrivée à La Redoute fin août 2009. Elle décrit son parcours "quasi sans faille" avec une excursion dans l'expertise comptable et le e-commerce et la vente à distance.
    00:00:36 - 00:01:11. Éric COURTEILLE est co-président de La Redoute. Il est né en 1967. Il a rencontré Nathalie BALLA dans le cadre de son recrutement en 2008, il était alors le numéro 2 du groupe Redcats, qui cherchait à recruter pour La Redoute. L'aventure a démarré par un flash professionnel.
  • Gouvernance de La Redoute.
    00:01:12 - 00:01:38. Éric COURTEILLE présente La Redoute : deux co-présidents, un comité de direction composé d'une douzaine de personnes représentant l'ensemble des fonctions de l'entreprise. Il y a aussi un actionnaire majoritaire qui est le Groupe Galeries Lafayette.
    00:01:39 - 00:01:40. Nathalie BALLA ajoute que l'actionnaire est un conseil de surveillance.
  • La Redoute en quelques mots.
    00:01:41 - 00:01:48. Éric COURTEILLE affirme qu'il faut plus que quelques mots pour définir La Redoute.
    00:01:49 - 00:02:26. Nathalie BALLA précise que La Redoute est une entreprise à la fois patrimoniale et emblématique qui a toujours accompagné les familles pour équiper à la fois la personne et l'intérieur. L'entreprise vient de la filature et a su se réinventé au fil des ans. Elle a traversé deux révolutions et des pandémies. Ce n'est donc pas la première pandémie qu'elle traverse. L'entreprise a su se réinventer et est un acteur majeur de l'omnicanal en France et à l'international.
  • Prise de conscience de la gravité de la situation.
    00:02:27 - 00:04:02. Éric COURTEILLE évoque différentes phases. De manière générale, les premières évocations de la pandémie eurent lieu fin 2019 avec les premières informations venant d'Asie et de Chine en particulier puis en Europe via l'Italie, où ils ont des fournisseurs, ainsi que de nombreux salons liés aux métiers concernés (Univers de la maison, prêt-à-porter). Ils ont senti que le mouvement s'accélérait rapidement. En janvier-février, ils n'étaient pas impactés mais ils suivaient régulièrement ce qu'il se passait ailleurs. Éric COURTEILLE précise bien qu'ils ont pris le sujet au sérieux dès décembre 2019 en pressentant qu'il pouvait se passer quelque chose et que ce n'était pas si loin que cela. Et notamment avec les informations reçues de l'Italie. Ils se sont donc tout de suite mis en veille active. Et ensuite, il y a eu l'annonce du président de la République, mi-mars, annonçant que le pays est bloqué, et confiné. Éric COURTEILLE explique qu'il a fallu réagir immédiatement, et pas seulement les entreprises, car ce fut un choc important aussi en tant que citoyen de se dire qu'il fallait rester chez soi. Il a fallu s'adapter, mais ils étaient déjà bien en veille active sur ce virus.
    00:04:03 - 00:04:34. Nathalie BALLA ajoute que dès début février ils avaient mis une cellule de crise en place vis-à-vis de l'évolution constatée en Italie, confinée dix jours avant la France. Son frère habitant là-bas, elle avait des nouvelles directes. L'annonce du Président fut un choc, mais du fait de la mise en place de la cellule de crise en amont, l'entreprise était préparée.
  • Réactions à chaud en tant que personnes et dirigeants.
    00:04:35 - 00:05:53. Éric COURTEILLE affirme que la première réaction, en tant que dirigeant, découle du peu de temps entre l'annonce du confinement par le Président et le confinement 24h plus tard. Le chiffre d'affaire a chuté de 70%. La dizaine de jours entre mi mars et fin mars a été marquée par une panique sur l'ensemble du territoire et la chute de la consommation. Cette phase a été très stressante en tant que commerçant. Sur la base de la cellule de crise, ils ont  tout de suite mis en place des premières mesures sanitaires et de sécurité nécessaires pour protéger les employés (2000 collaborateurs, dont 500 à l'international). Ils ont tout de suite décidé de se confiner et d'équiper les équipes pour pouvoir continuer à travailler à distance. Éric COURTEILLE ajoute que la réactivité des équipes a été impressionnante.
    00:05:54 - 00:07:43. Nathalie BALLA précise qu'à titre personnel ce fut un moment d'incrédulité car on avait jamais fait face à ce genre de situation. Cela est apparu complètement surréaliste. Et en tant qu'entreprise, elle précise qu'ils ont été tiré par quelque chose qui les dépassait car il faut assurer l'avenir de l'entreprise et des collaborateurs. Ils ont tout de suite pris leurs responsabilités, et ont pensé à la santé des collaborateurs notamment ceux devant venir élaborer les colis. Ce moment fut particulier car il n'y avait pas de masque, pas de gel, et les syndicats furent alertes. ce ne fut pas facile, et Jean-Philippe Sloves était aussi là pour répondre aux questions. Ils ont donc décidé de fermer temporairement le site pour se réorganiser et trouver un nouveau mode de fonctionnement. afin d'assurer la continuité de l'exploitation du site. Ils ont passé le week-end à appeler, à organiser l'approvisionnement en masques et en gel afin de pouvoir redémarrer le lundi sur la base du volontariat et des équipements prévus pur assurer la pérennité de l'entreprise. Nathalie BALLA précise que ce fut une période assez dense et difficile.
    00:07:44 - 00:09:06. Éric COURTEILLE évoque les sentiments qui lui reviennent en parlant de cette période avec une perte de 70% du chiffre d'affaire en 24h, qu'il y a un danger sanitaire que l'on ne maîtrise pas forcément car ils sont commerçants, ce fut effrayant sans outils pour y faire face avec une part d'inconnu énorme. Il a trouvé incroyable, individuellement et collectivement, le mode survie, surtout pendant la dizaine de jours où il a fallu s'équiper, avancer, sans savoir ce que serait le lendemain, comment allaient réagir les collaborateurs. Il précise que chaque cas est différent et qu'en tant que dirigeants ils ont dû gérer un ensemble. Il a eu le sentiment très fort de se sentir happé par la responsabilité de maintenir le cap, peu importe le reste.
    Éric COURTEILLE revient sur ce qu'a évoqué Nathalie BALLA, garder le cap c'est prendre des décisions très fortes et de garder le lien avec les collaborateurs via Teams, Zoom, google meet et les outils adaptés, car le maintien du lien a été considéré comme important. En interne, mais aussi en externe avec les clients, ils ont continué à préparer leurs commandes. Et très vite, heureusement, ils ont senti que le commerce à distance numérique allait prendre le dessus, et ils sont remontés dès début avril avec la reprise des ventes avec des produits ciblés sur la bureautique, l'informatique, les cocottes minutes, tout ce qui concerne l'intérieur travail et vie. Il y a eu une vraie demande, les gens ont continué à vivre, et ils devaient les accompagner.
    00:09:47 - 00:10:42. Nathalie BALLA ajoute que si ce qui l'a marqué c'est le débat sur les biens dits essentiels et non essentiels. Leurs partenaires sociaux leurs disaient qu'ils vendaient des biens non essentiels. Or, quand ils regardent le nombre de vêtements pour enfants vendus pendant la crise sanitaire ; le nombre de machines à coudre, de machines à pain, vendues, car les gens ont dû se reconstruire une nouvelle réalité, car il n'y avait plus de restaurants. Il y a eu une nécessité de se réinventer, aussi personnellement, pendant la crise, et Nathalie BALLA souhaiterait réouvrir ce débat des biens essentiels et non essentiels dans un moment apaisé. car on a vu que les biens non essentiels sont devenus essentiels pour assurer le confort psychologique et émotionnel des familles en France.
    00:10:43 - 00:12:01. Éric COURTEILLE ajoute que ce point est très important. Il y a en effet la sécurité sanitaire portée par le monde de la santé, mais il y a aussi l'importance du psychique et du mental dans une période de crise. Quand on est confiné chez soi, la livraison de sa commande est un bonheur, cela crée un lien, une émotion, un moment différent loin du sanitaire et de cette névrose qui fait peur. Il y a en effet pour Éric COURTEILLE un vrai débat à avoir sur ce qui est essentiel, ou non. Quand ils livraient une robe, un pantalon, un bureau, c'était un moment de plaisir pour les personnes qui vivaient dans l'inconnu. Ils devaient donc poursuivre leur mission car le lien avec le client demeurait. Le client est devenu leur allié. Ce fut leur mission au quotidien.
  • Gestion de la gouvernance.
    00:12:02 - 00:14:22. Nathalie BALLA
    revient sur la mise en place de la cellule de crise qui est en fait une transformation du Comité de direction. Il y avait des réunions journalières voire deux fois par jour pour faire le point sur la situation. La crise a apporté un niveau d'incertitude élevé qui perdure toujours. La situation et les réglementations évoluent au jour le jour. Certains de leurs partenaires ont dû fermer notamment le réseau de relais colis avec les commerçants fermés. Il ne restait donc que la poste pour les colis, qui elle même a rencontré des difficultés à rassurer ses collaborateurs. Il y avait trois jours par semaines uniquement de distribution par la Poste, donc il fallait prévenir les clients de délais rallongés. Il y a eu donc beaucoup de sujets très opérationnels à gérer, pour continuer à livrer les clients dans le respect des règles sanitaires et de promesses délivrées. C'est la cellule de crise journalière qui a permis d'appréhender chaque jour et de prendre des décisions opérationnelles et stratégiques notamment financières. Ils ont décidé de stopper tous les projets sauf 5, prioritaires pour l'entreprise, et d'assurer l'avenir financier et la trésorerie de l'entreprise avec des prévisions pas très optimistes pour la fin de l'année.
    00:14:23 - 00:16:12. Éric COURTEILLE rappelle la difficulté de savoir que l'on est dans la crise mais de ne pas savoir quand est-ce qu'elle va se terminer. Et il est difficile de planifier quoique ce soit. Ils ont appris à vivre au jour le jour, mais de manière différente que ce qui peut parfois se passer en entreprise. L'activité de la Redoute est essentiellement digitale, même s'il reste une douzaine de magasins et des corners par exemple aux Galeries Lafayette. Et les collaborateurs de ces magasins ne travaillaient plus, ils ont donc eu recours également au chômage partiel. Il y eu beaucoup d'échanges avec l'administration pour gérer ces problématiques et accompagner du mieux possible cette période, sans savoir quand est-ce que cela allait se finir.
    Éric COURTEILLE précise que lorsqu'ils se projetaient un peu ils pouvaient se faire très peur mais finalement les ventes sont reparties d'une manière incroyable. L'allié des gens confinés c'est le commerce à distance avec les envies des gens confinés de refaire leurs intérieurs (chambre, bureau) du fait d'une autre relation à notre intérieur. Et vu que La Redoute est très forte sur l'ameublement et l'aménagement intérieur, ils ont été une destination et ont eu une croissance incroyable de leurs activités à partir de mi-avril, ce qui continue encore aujourd'hui.
    00:16:13 - 00:17:00. Nathalie BALLA ajoute leur observation de ce qu'il se passait à l'international car La Redoute a 30% de son chiffre d'affaire à l'international. La situation était sous contrôle à l'international. Il n'y a pas eu de phase forte de décroissance là-bas, la distribution se poursuivait. Ils sont même repartis vite en croissance, ce qui leur a permis de ne pas être que négatif dans leur manière d'appréhender les sujets tout en regardant ce qu'il se passait en Chine et en Asie, pour comprendre et essayer d'anticiper même si le pilotage restait compliqué.
  • Changements qui vont perdurer.
    00:17:01 - 00:18:38. Éric COURTEILLE évoque le second confinement actuel et le fait d'avoir appris à travailler à distance. Il se sentait d'ailleurs intimement réticent, face à ce travail à distance, avec le besoin de se voir physiquement. Il aime toujours voir les équipes et se réunir ensemble, mais il n'a pu que constater que l'on peut travailler à distance, si le télétravail est bien géré. Le premier enseignement a été très tangible et empirique pendant plusieurs semaines pour faire tourner l'entreprise et servir les clients.
    Le deuxième enseignement est associé au fait d'être en mode survie dans l'urgence de la crise, et il n'y a pas la place pour les choses inutiles. Il y a des focus à très court terme, on apprend à travailler de manière beaucoup plus simple et à prendre des décisions beaucoup plus vite. C'est un enseignement très positif, à faire perdurer dans les organisations.
    00:18:39 - 00:21:14. Nathalie BALLA ajoute qu'ils ont été positivement et agréablement surpris du degré de responsabilité et d'autonomie des équipes, ce qui est un vrai apprentissage et une vraie leçon de pouvoir faire confiance et donner des responsabilités aux collaborateurs à qui ils ne pensait pas pouvoir le faire. Cela va être un vrai levier d'accélération pour l'avenir. Ensuite ils ont eu la capacité de remettre en question des croyances et des habitudes. Ils ont été forcés de prendre des décisions, qu'ils savaient devoir prendre mais sans avoir franchi le pas. Elle cite en exemple le catalogue du prêt-à-porter, que les équipes ont tenu à maintenir, et ça c'est une grande satisfaction... Car aujourd'hui il y a moins de références et de catalogues papier, et ils sont revenus en force sur le prêt-à-porter. D'autres croyances ont été impactées positivement, comme croire que l'on ne fait de la croissance que si l'on a plus de stock. La supply chain a été impactée avec des rotations de stock modifiées, mais ils ont quand même réussi à générer de la croissance. Ils ont cassé certaines croyances et appris un certain nombre de choses pour piloter leur entreprise, sans plus rien qui les bloquent au quotidien, pour l'avenir. Il faut savoir se défaire de ses croyances pour pouvoir construire quelque chose de nouveau et de différent dans un environnement nouveau. Ils ont été forcés à le faire mais c'est une vrai leçon. La question actuelle est de savoir s'ils sont capables de reproduire cela dans un autre environnement plus libre.
  • La plus belle victoire, réussite, fierté.
    00:21:15 - 00:23:24. Éric COURTEILLE affirme que c'est difficile de définir la plus grande mais il reste marqué par l'engagement des volontaires qui ont continué à servir sur leur site de production. Ils avaient fermé le site industriel de la préparation des commandes, puis est née l'idée collective de proposer de revenir sur une base de volontariat sans connaître tous les risques et conséquences du virus. Ce volontariat leur a permis d'assumer leurs commandes parce que des gens ont pris conscience du lien  qu'il fallait garder entre eux mais aussi avec les clients. Ce n'était donc pas uniquement une équipe de direction qui devait mener l'entreprise. Il y a eu des gens du site logistique qui ont eu envie d'y aller, volontairement, pour continuer à travailler. C'est un élément fort.
    Le deuxième sujet concerne les remontées de la part des clients (réseaux sociaux ou via le prestataire de transport). Les gens étaient très contents de se faire livrer, car c'était pour eux un vrai moment de bonheur.
    00:23:25 - 00:24:29. Nathalie BALLA est d'accord avec Éric COURTEILLE, elle évoque l'effet de solidarité collective qui s'est mise en place avec des initiatives de la part de leurs collaborateurs, notamment des modélistes et des gens du costume qui ont cousu des masques pour le personnel soignant. Cet élan de générosité lui a fait chaud au cœur, notamment dans une société de plus en plus individualiste.
    La plus grande fierté de Nathalie BALLA est d'avoir travaillé avec ses équipes sur leur raison d'être, qui est d'embellir et d'aider les familles, ce qui s'est produit durant cette période. Cette mission et cette raison d'être ont encore plus pris forme, plus qu'ils n'en auraient rêvé.
    00:24:30 - 00:26:02. Éric COURTEILLE ajoute que la crise a validé leur bonheur. Ce fut une grande joie et une grande fierté et un moment de partage. Ils ont d'ailleurs fait deux réunions avec l'ensemble des collaborateurs via Teams, un en Français avec 700 personnes et un autre en Anglais avec 500 personnes. Avec Nathalie BALLA, ils ONT expliqué pendant une heure la situation et la validation de leur modèle économique par rapport à la crise, et ce fut un évènement extrêmement fort pour les collaborateurs. C'était une validation d'étape du travail engagé 5 ans auparavant, de façon collective.
  • Actions mises en place au déconfinement.
    00:26:03 - 00:27:58. Nathalie BALLA évoque en premier lieu la réouverture des magasins comme moment clé avec le retour du réseau de distribution des colis et le retissage de lien avec les clients dans les magasins. Ainsi qu'avec le personnel car tout s'était fait à distance, et encore aujourd'hui. Les êtres humains ont besoin de la présence et du lien. Au siège, ils ont fait revenir les collaborateurs en sortant du volontariat pour la logistique. Mais le télétravail a été maintenu au siège pour les personnes qui avaient peur de revenir. Ils ont dû repenser la manière de fonctionner sur le siège, afin de correspondre aux règles d'hygiène sanitaire : flux de circulation, reconception de la manière de travailler. Ils sont revenus à une organisation normale car sur la période de crise beaucoup de collaborateurs étaient en chômage partiel. La configuration normale de l'entreprise a été retrouvée aujourd'hui.
    00:27:59 - 00:29:06. Éric COURTEILLE ajoute qu'ils étaient contents de se revoir car ils sont une organisation humaine. Repartager des choses et se dire qu'on allait repartir. Et c'était important aussi parce qu'ils sont présents dans 6 pays physiquement ainsi qu'à Paris. Cela a permis de redonner du liant à tout cela. Se dire qu'ils ont réussi à découvrir de nouveau territoires. Certains ont pu reprendre à voyager. La période de déconfinement est passée relativement vite. Cet été était un moment de joie, il faisait beau, les chiffres de la pandémie baissaient.
    00:29:07 - 00:30:18. Nathalie BALLA ajoute qu'ils ont travaillé sur l'hypothèse d'un deuxième confinement afin de l'anticiper et ce fut extrêmement difficile d'en parler aux gens alors qu'ils sortaient tout juste du premier. Ils n'arrivaient pas à se projeter sur un deuxième confinement et ce que cela voulait dire.. Mais c'était essentiel pour anticiper les capacités d'organiser les stocks de marchandise par exemple, mais surtout sécuriser le business face à la nouvelle fermeture de l'économie mondiale. Complexité dans une période de retrouvailles avec la liberté et l'anticipation d'une prochaine crise et un avenir incertain.
  • Impact sur la stratégie de l'entreprise.
    00:30:19 - 00:32:35. Éric COURTEILLE rappelle ses propos sur l'étape de validation avec toutes les mesures mises en œuvre. Sur la stratégie, cela leur a montré que le chemin engagé avec agilité, capacité à faire et défaire, de manière horizontale, la mise en œuvre du quotidien à distance, était un acquis. Ils vont faire en sorte que cela perdure. Il précise que la distribution est un enjeu fondamental quand un pays s'arrête. Ils ont aujourd'hui trouver des alternatives pour des modes de livraison différents qui auront un impact sur le futur et la qualité de leurs services. Ils ont aussi lancé Tik Tok et Éric COURTEILLE aborde la question essentielle du plaisir lié à la marque et à ses valeurs, en les mettant en avant. Ils ont pris le temps de l'expliquer aux clients. Un achat chez La Redoute n'est pas un achat ailleurs. C'est important pour l'acte commerçant et la relation avec le client. La marque a 180 ans, et a démontré sa capacité à être résiliente. Cela les a renforcés.
    00:32:36 - 00:35:39. Nathalie BALLA rajoute deux éléments : d'une part la quête de sens voulue chez les gens et notamment lorsqu'ils consomment. Avant La Redoute était très promophile, mais dans une crise sanitaire on ne peut pas parler de promotion. Ils ont du revenir aux choses essentielles et aux vrais besoins des familles. Ils ont tissé des liens sur des éléments plus fondamentaux. Le deuxième élément est celui qui a impacté leur stratégie, c'est la politique RSE engagée avant le confinement en lien avec la quête de sens. Ils ont accéléré leur engagement sur l'impact environnemental et sociétal. Ils ont même pendant le premier confinement lancé un projet qu'ils avaient en réserve, la mise en place d'un service "see to see", rajouté aux cinq projets prioritaires. En tant que client de La Redoute, un client peut revendre ses anciens vêtements ou meuble et en racheter de la même manière auprès des autres clients. Ce projet va prendre vie à la fin de cette année. Collection responsable, autre manière de consommer, relocalisation de la production, ... c'est-à-dire avoir plus d'agilité.
  • Enseignements tirés.
    00:35:40 - 00:38:41. Éric COURTEILLE affirme qu'il y en a beaucoup, mais que la responsabilité est déterminante, notamment quant à la santé des collaborateurs. Il s'agit d'accompagner le quotidien des gens et ce qu'il doivent assumer dans cette période-là. L'entreprise a un rôle à jouer pour ses employés. Il précise que le deuxième enseignement est celui de l'agilité car une entreprise ne doit pas être figée et incapable de se mettre en mouvement, mais de réagir dans un temps et une action imprévus. Le troisième enseignement serait la solidarité qui est fondamentale car on est plus fort ensemble que seul ce qui nous permet d'aller plus loin.
    Pour Éric COURTEILLE, la transparence des dirigeants est un élément très fort, car dans ces moments de crise on ne peut plus tricher, surtout devant 2000 personnes. Il faut dire la vérité : là où l'est, pourquoi, ce qu'on sait et ce que l'on ne sait pas, les incertitudes, etc. C'est un facteur d'humilité car en tant que dirigeants ils sont comme les collaborateurs, ils ne savent pas où ils vont. Il faut donc partager les informations à sa disposition sur la vie de l'entreprise afin que out le monde se sente concerné. Ce sont des valeurs basiques mais essentielles rappelle Éric COURTEILLE, elles ne sont d'ailleurs pas que de simples mots, il faut les vivre ensemble pour plus de force.
    Éric COURTEILLE prend l'exemple des jeunes de 25 ans sortant d'école, qui obtiennent leur premier travail, qui habitent à Lille dans un studio, et on leur dit de ne pas sortir. C'est compliqué et donc c'est pourquoi il faut être en quête de sens et apporter quelque chose pour que la personne s'y retrouve : solidarité, transparence, empathie, proximité ont vraiment du sens.
    00:38:42 - 00:40:22. Nathalie BALLA ajoute qu'elle pense que même si on s'est tous mis à distance, pour elle la prise de conscience réside dans une société imminemment humaine, et que les collaborateurs sont avant tout des êtres humains, et qu'en tant qu'entrepreneurs ils ont une responsabilité sociale. La santé et le bien-être des collaborateurs sont primordiaux, sinon l'entreprise ne fonctionnerait pas. Ce fait à remis le barycentre de leurs préoccupations vers plus de lien social, de prise en compte des hommes et des femmes. Ce fut un élément clé. Nathalie BALLA revient sur la notion de transparence qui donne de la perspective dans un environnement incertain, mais en admettant qu'elle peut évoluer en lui donnant du sens et en s'adaptant afin de répondre aux enjeux de demain. Ce sont les deux points essentiels.
  • Conclusion, sujets à aborder.
    00:40:23 - 00:40:37. Éric COURTEILLE affirme que sur la crise, vivement que cela se finisse.
    00:40:38 - 00:42:17. Nathalie BALLA précise le sujet peu abordé de leurs filiales à l'étranger auprès desquelles ils ont pu observer l'évolution de la crise. Elle rappelle la bonne gestion économique en France avec les différents systèmes exceptionnels entrepris par l'Etat pour les entreprises dont le chômage partiel, les prêts garantis, les étalages de paiement, etc. Mais néanmoins d'autre pays ont su montrer plus d'agilité et de réactivité dans leur manière d'appréhender les sujets. La crise nous a tous remis à pied d'égalité et que cela ne dépend que des dirigeants et des êtres humains pour faire la différence, cela rend humble et redonne confiance en la vie.
    00:42:18 - 00:44:12. Éric COURTEILLE ajoute que chacun peut faire la différence, mais que en étant accompagné d'un grand dessein et d'une vision permettant de se projeter sinon on manque de force pour affronter la crise. L'humain ne peut pas être en permanence en réaction et se battre, ils l'ont d'ailleurs vécu avec Nathalie BALLA pendant la transformation de l'entreprise. La dualité à gérer c'est la réaction sur le court terme et les perspective et vision collectives. Il faut savoir pourquoi on le fait. Et c'est aussi ça un des enseignements à tirer. Éric COURTEILLE rappelle que quelque soit le poste occupé dans une organisation, ou le niveau de responsabilité, il est légitime de demander quel est le dessein de l'entreprise. Se projeter donne plus de force au quotidien. Il faut être très prosaïque chaque heure. Pour Éric COURTEILLE aurait aimé que la gestion de 60 millions de personnes s'accompagne d'une grande histoire, comme ils ont essayé de le faire avec 2000 personnes. Recréer le collectif, il prend l'exemple personnel de la force qu'il acquiert le matin en sachant pourquoi il se lève.
  • Pourquoi avoir accepté de répondre à l'appel à témoignages ?
    00:44:13 - 00:45:25. Nathalie BALLA évoque le fait personnel d'apprécier de regarder des témoignages, des années 1960-1970, etc. Voir comment les gens voyaient la société à ce moment-là, et comprendre, et de contextualiser, de mieux se projeter. Ainsi, elle espère un tout petit peu avec cette contribution améliorer les perspectives des générations futures, tout en restant humble, sans vouloir donner de leçon. Elle ajoute qu'après que l'on a vécu, cette période exceptionnelle dans tous les sens du terme, cela fait du bien aussi de faire un arrêt sur image, de se poser des questions et de répondre à des questions afin de prendre un peu de hauteur et de mieux comprendre où l'on en est, de mieux dessiner le chemin et la trajectoire vers demain.
    00:45:26 - 00:46:09. Éric COURTEILLE ajoute tout simplement que La Redoute le mérite. La Redoute est une entreprise patrimoniale, c'est une marque iconique, notamment en France. Il évoque ce "big book" que l'on a tous écorné les pages en disant "maman je veux ce jean maman je veux ça etc.". La Redoute a 180 ans, et elle a encore plus de deux siècles devant-elle. Il précise que nous sommes de passage, il faut donc créer le lien, et on parle de lien en permanence, c'est aussi le lien de ce qui a été fait auparavant et ce qui sera fait demain. Ils sont un acteur de cela, et ce qui est important, c'est La Redoute, qui a encore un long chemin à faire. Il termine en disant qu'ils participent à cette histoire, à garder le patrimoine vivant d'une entreprise qui va traverser des siècles.

Cote :

2021 12 37

Informations sur le producteur :

Nathalie Balla et Éric Courteille deviennent co-directeurs de La Redoute en 2014. D’abord filature de laine en 1837, l’entreprise évolue vers le secteur de la vente à distance.

Description :

Mise en forme :
Classement définitif

Conditions d'accès :

article numérisé (numérisation en ligne ou à demander auprès des ANMT)

Conditions d'utilisation :

Toute exploitation d’extrait est soumise à l’autorisation préalable des ayants droit. Elle devra faire mention du projet « Mémoire des entreprises au temps de la covid-19 » et de ses partenaires, en les citant. L’exploitation commerciale de ces enregistrements entraînera une négociation entre les coauteurs et le diffuseur.

Description physique :

Entretien filmé conduit par Perles d'Histoire. Durée : 0:46:07.

Institutions :

La Redoute

Type de document :

document audiovisuel

Où consulter le document :

Archives nationales du monde du travail - ANMT

Archives nationales du monde du travail - ANMT

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