Inventaire d'archives : Marquisat de Saint-Rambert

Cote :

27 B 1-59

Publication :

Archives départementales de l'Ain
1993
Bourg-en-Bresse

Informations sur le producteur :

Ressort : Saint-Rambert (la ville seule), Arandas, Argis, Evosges, Tenay Titre : Marquisat puis baronnie Lieu d'exercice : Saint-Rambert Seigneurs : Voir le tableau page 199
"Les abbés de Saint-Rambert étaient primitivement les seuls seigneurs de cette ville et de ses dépendances, mais en 1196, l'abbé Régnier s'associa en pariage Thomas, comte de Maurienne et de Savoie, et lui remit le château-fort de Cornillon qui dominait la ville. Dès le commencement du XIIIe siècle, ce château devint le chef-lieu d'une châtellenie domaniale et le siège de la justice comtale en Bugey" (1). La terre de Saint-Rambert comprenait, avec le chef-lieu, Cleyzieu, Montgriffon, Torcieu, Tenay, Evosges, Arandas (qui passe dans la châtellenie de ossillon vers 1400). Cette châtellenie fut démembrée du domaine au profit de Claudine de Bretagne, veuve de Philippe, qui la reçut en douaire avec d'autres terres en Bugey (Rossillon, Châteauneuf, Lagnieu). Après son retour au domaine, elle fut ensuite engagée, avec Saint-Germain d'Ambérieu, à Prosper de Genève, par le duc Emmanuel-Philibert, qui la racheta pour l'inféoder à son fils naturel Amédée de Savoie, le 5 octobre 1576, en titre de marquisat (2).
Le marquisat de Saint-Rambert (1576-1716)
Le titre érigeant Saint-Rambert en marquisat comporte des indications assez précises quant aux droits de juridiction. Le duc concède :
la "moyenne haute et basse jurisdiction, authorité, faculté et puissance de glaive ou espée et dernier supplice, pour raison de quelle sorte d'offense que ce soit, avec pouvoir et authorité de tenir et faire tenir prisons, pilliers, colliers, fourches patibulaires à trois piliers et en icelui marquisat tenir et user de toutes autres choses nécessaires et appartenantes à toutes sortes de supplices, pour l'exécution de la justice, exercice d'icelle et du susdit mère, mixte impère, omnimode jurisdiction tant en la première que seconde conoissance ou soit premières appellations, donnans en outre à nostre dit fils bastard et ses enfants masles et descendants comme dessus, pleine faculté et pouvoir de constituer et révoquer ainsi que bon lui semblera, tant les premiers que seconds juges des dites premières et secondes connoissances respectivement, lesquels auront pouvoir de connoistre des dites secondes instances et rendre droit et justice à tous ceux qui la leur demanderont au dit marquisat et ses dépendances, sauf le dernier ressort et secondes appellations à nostre Sénat de Savoie pour la supériorité" (3).
En 1601 Amédée de Savoie vendit le marquisat à Henri de Savoie, duc de Nemours, marquis de Saint-Sorlin et seigneur de Poncin, Cerdon, Chazey. La réunion du Bugey à la France ne changea en rien la propriété du marquisat : en 1605 Henri de Savoie fit hommage à Henri IV qui, en 1606, incorpora les justices des marquisats de Saint-Rambert , de Saint-Sorlin, de Poncin et Cerdon et d'autres terres en Bugey appartenant au duc de Nemours, en une seule et même justice, avec juge mage et juge d'appel (Juge des appellations du marquisat de Saint-Rambert et des baronnyes de Pontcin et Cerdon, 1695, Titres de la famille Bonnet : arrêt du Parlement de Dijon) (4). De 1601 à 1640, la justice d'appel ressortit nûment au parlement de Dijon, aux deux chefs de l'édit, mais à cette dernière date, un arrêt du Conseil attribua le ressort au premier chef de l'édit au présidial de Bourg. On trouvera plusieurs descriptions du marquisat au XVIIe siècle ; nous citons celle du Mémoire pour l'instruction du Duc de Bourgogne de la fin du siècle :
"M. le duc de Savoie est seigneur de Saint-Rambert à titre de baronnie ; il possède encore en Bugey le marquisat de Saint-Sorlin et les baronnies de Pontcin et de Cerdon, qui sont des terres de la maison de Nemours. La justice mage et d'appel de touttes les dites terre s'exerce à SaintRambert, M. de Savoye donne des provisions à tous les officiers et nomme tel nombre de procureurs, de notaires et sergents qu'il luy plaist. Il n'a la seigneurie que de la seule ville de Saint-Rambert. Les habitans tiennent les assemblées dans la salle du Collège. La police qui étoit autrefois exercée par un capitaine châtelain, nommé par M. le Duc de Savoye, et deux syndics élus par la communauté, est à présent administrée par les nouveaux officiers, suivant les édits du Roy. Ils consistent en un maire, deux syndics, un procureur du roy et un secrétaire" (5).
On notera que seule la ville de Saint-Rambert faisait partie du marquisat ; le reste de la paroisse formait la justice de l'Abbaye (voir sous-série 25 B : Saint-Rambert, Abbaye). Sous Amédée de Savoie, les paroisses d'Arandas et de Tenay furent démembrées pendant quelque temps du marquisat au profit du célèbre Claude Guichard.
Le démembrement du marquisat de Saint-Rambert en 1716
Les guerres entre la France et la Savoie, à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle eurent pour conséquences la main mise du Roi sur les domaines de la famille de Savoie en Bugey (donc en France) et sans doute le désir de celle-ci de se défaire de domaines très vulnérables. Les traité d'Utrecht (1713-1715), qui mettaient fin à la guerre de Succession d'Espagne, furent favorables à la Savoie et lui permirent de vendre ses domaines dans de bonnes conditions. Un mémoire du XVIIIe siècle résume cette situation et cette vente :
"Le Roi qui avoit mis sous sa main ces seigneuries par le droit de la guerre qu'il avoit contre le duc de Savoye, les luy rendit par ce traitté (d'Utrecht) et consentit que le Duc les vendit comme et à qui il aviseroit bon être, promettant Sa Majesté toutte sureté aux acquéreurs sans qu'il fut besoin de lettres patentes […] En exécution du traité de paix d'Utrecht, le duc de Savoye a vendu à différents seigneurs le marquisat de Saint-Rambert, celuy de Saint-Sorlin, les baronnies de Poncin et Cerdon, la baronnie d'Arlod, et dèz ce moment, ces terres ont été désunies et démembrée par le fait. C'est ce qui est arrivé bien plus particulièrement pour le marquisat de Saint-Rambert. Il se forma une société pour l'aquérir. Les associés étoient au nombre de quatre : Guillaume Trocu de Termand, Albert Trocu de La Croze, François de Suduiraud et Philippe Buynand des Echelles. La vente fut faite à l'un de ces associés, le sieur de Termand, le 6 juillet 1716, pour luy et ses amis élus ou à élire. Il ne conserva pour luy que la seule ville de Saint-Rambert. Les paroisses d'Argy, Tenay, Arandas, furent le lot du sieur de La Croze. Le trente juillet suivant, les associés démembrèrent le mandement d'Ambérieu. Ils élurent en amy le sieur Cotin de La Barre pour un tiers dans ce mandement. Les deux autres tiers restèrent, l'un au sieur de Suduiraud, l'autre au sieur Buynand des Echelles. Il fut dit que le mandement d'Ambérieu, circonstances et dépendances demeuroit dès à présent séparé, désuni et démembré du marquisat de Saint-Rambert, que la dite seigneurie de la terre d'Ambérieu ne relèveroit à l'avenir en aucune façon de celle de Saint-Rambert, ny d'aucun autre seigneur que du Roy, tant pour la justice ordinaire que d'appel, sans aucune mouvance ny dépendance à l'avenir du seigneur de Saint-Rambert. Que la justice d'Ambérieu resteroit en commun entre les trois coseigneurs qui nommeroient conjointement leurs juges ou chacun à leur tour. Les sieurs Trocu de Termant et de La Croze, à qui Saint-Rambert et les paroisses d'Argy, Tenay, Arandas restèrent, souscrivoient à ces conditions consignées dans le traitté du 30 juillet 1716. Ce traitté fut homologué à la chambre des comptes par arrêt du 26 juillet 1717, arrêt irrévocable de sa nature et par l'exécution qu'il a eu. Une autre partie du marquisat de Saint Rambert, sçavoir la terre de Cleysieu avoit été aliénée en faveur du sieur Jujat, bourgeois à Lagnieu, de sorte qu'il n'est pas possible d'imaginer démembrement plus complet, plus autentique, et mieux cimenté, si on peut se servir de cette expression" […] (6).
le démembrement de la justice et la lutte pour la juridiction d'appel
L'éclatement du marquisat entraîna du même coup le démembrement de la justice, mais celui-ci se fit par paliers successifs et eut pour corollaire le problème du maintien ou non de la juridiction d'appel et le choix du ressort. Pour décrire cette situation jamais étudiée dans les ouvrages d'histoire locale, nous feront encore appel aux mémoires de l'époque :
"Quoiqu'il leur fût libre de nommer chacun leur juge immédiatement après ces acquisitions, ils [les acquéreurs du marquisat] se firent un devoir de bienséance envers le Roy de Sardaigne de ne pas déposséder les officiers qui étoient en place, mais ils exigèrent que l'on tint des registres séparés pour chaque juridiction le maintien des anciens officier faisait en réalité l'objet d'une clause de la vente. Au feur et à mesure des décez de ces officiers, ils en ont nommé d'autres séparément ; quoique leur choix soit tombé sur le même individu pour la justice ordinaire, ils ont donné des institutions [provisions] distinctes et séparées ; chaque juridiction a eu ses registres particuliers pour marquer que chacun étoit maître chez soy (7). "Mais le procureur du Roy au bailliage de Belley prétendant que le marquisat de SaintRambert ne subsistant plus à cause de la division faitte entre tous ces acquéreurs des terres en mandemens qui le composoient il n'y doit plus avoir de juge d'appel parce que ce privilège étoit attaché à l'érection du marquisat et auroit demandé que défenses fussent faites au juge d'appel de Saint-Rambert de connoitre des appellations des sentences des juges ordinaires du dit Saint-Rambert et autres terres, à peine de nullité des procédures et jugements et de mil libvres d'amende et aux justiciables des dittes justices de porter leurs appellations ailleurs qu'au bailliage de Belley sous les mêmes peines. Le lieutenant général au bailliage de Belley a fait une ordonnance le 26 septembre 1720, signifiée aux greffiers des justices d'appel et ordinaires de Saint-Rambert, mandement d'Ambérieu le 14 octobre suivant et affichée au pilier des halles portant déffences à tous justiciables de SaintRambert et dépendances de porter leur appel des justices ordinaires qu'au bailliage de Belley et aux juges faisant les fonctions de juges d'appel d'en connoitre à peine de 510 livres d'amende, nullité des procédures et jugemens, dépens, dommages et intérets" (8). En fait la justice d'appel fut maintenu comme on le constate d'après les archives conservées. Plus tard dans le XVIIIe siècle un nouveau problème se posa, celui du siège de la justice. Mais cela concernait moins la justice de l'ancien marquisat lui-même, qui resta toujours à SaintRambert, que celles qui avaient été démembrées et qui peu à peu obtinrent des auditoires plus proches des justiciables : "Malgré les cris de leurs justiciables, ils [les acquéreurs] auroient cependant toléré que le juge ordinaire rendit la justice à Saint-Rambert, mais enfin les plaintes des justiciables ont prévalu à commencer par ceux du marquisat de Saint-Sorlin (9).
Ceux-ci en effet obtinrent d'avoir un auditoire à Lagnieu en 1771. La justice de Saint-Germain fut rendue à Ambérieu à partir de 1775, et à la même date celle de Proulieu fut désormais rendue à Lagnieu (10).
Notes
(1) Philipon (Edouard), Dictionnaire topographique de l'Ain, p. 395
(2) Guichenon (Samuel), Histoire de Bresse et de Bugey, Lyon, 1650, Fiefs du Bugey, p. 99
(3) Ibid., Preuves, p. 237 : érection de la seigneurie de Saint-Rambert en marquisat en 1576.
(4) Philipon (Edouard), op. cit., p. 395
(5) Edit de 1692. Ligou (Daniel), L'intendance de Bourgogne à la fin du XVIIe siècle ; édition critique du mémoire "Pour l'instruction du Duc de Bourgogne", Paris, 1988, p. 565-566. Voir aussi Courtépée et Béguillet, Description générale et particulière du duché de Bourgogne, 3e édition, 1968, IV, 514.
(6)Arch. dép. Ain, H 333 ; Mémoire adressé au parlement de Dijon, s.d.
(7) Ibid
(8) Arch. dép. Ain, H 333, mémoire sans titre ni date
(9) Ibid., mémoire adressé au Parlement
(10) Voir les justices de Proulieu et de Saint-Sorlin

Description physique :

Description physique: Document d'archives
Nombre d'unités de niveau bas
Nombre d'unités de niveau bas: 59
Dimensions :

Organisme responsable de l'accès intellectuel :

Archives départementales de l'Ain

Identifiant de l'inventaire d'archives :

FRAD001_27B

Type de document :

Document d'archives

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