Page d'histoire : Fondation de la Société de pharmacie de Paris devenue Académie nationale de pharmacie 15 thermidor an XI (3 août 1803)

Antoine-Auguste Parmentier par François Dumont, 1812

Une déclaration royale du 25 avril 1777, reconnaissant la valeur de la pharmacie « art précieux à l’humanité », donna sa totale indépendance à la corporation des apothicaires, qui prit le nom de « collège de pharmacie ». Ce collège de pharmacie donnait des cours publics et gratuits, tenait des réunions scientifiques rue de l’Arbalète, à la « maison de la charité chrétienne » créée deux cents ans auparavant (1578) par Nicolas Houel, maître apothicaire, pour en faire un hôpital pour enfants pauvres, mais aussi une apothicairerie pour la préparation de médicaments et le « jardin des apothicaires de Paris » destiné à la culture et à l’étude des « simples ».

La tourmente révolutionnaire supprime, en 1791, toutes les corporations y compris le collège de pharmacie, mais devant les risques pour la santé publique de prolifération de remèdes secrets, le collège est rétabli quelques semaines plus tard, à titre provisoire. Ce provisoire se prolongeant, les pharmaciens créent le 20 mars 1796 la « société libre des pharmaciens de Paris » constituée des 137 membres résidants du collège.

Le 21 germinal an XI (11 avril 1803), le Premier consul confie à l’État, le monopole de l’enseignement de la pharmacie en créant trois écoles à Montpellier, Paris et Strasbourg. Ainsi, les membres de la société libre des pharmaciens de Paris étaient dépossédés, pour la plupart, de leur droit d’enseigner et de leurs locaux de la rue de l’Arbalète. C’est pour conserver leur activité de société savante et pour maintenir les liens de confraternité en France et à l’étranger, qu’ils créèrent quatre mois plus tard, le 15 thermidor an XI (3 août 1803), la « société de pharmacie de Paris », dont le premier président fut Parmentier, alors pharmacien en chef des Invalides et le deuxième Vauquelin, alors directeur de la nouvelle école de pharmacie.

Dès novembre 1803, la société de pharmacie fut officiellement autorisée à siéger dans les locaux de l’école de pharmacie. Elle a continué de siéger et de tenir régulièrement séance, depuis cette date, dans la salle des actes, salle qui fut transférée en 1882, avenue de l’Observatoire, en même temps que l’école devenue depuis faculté. C’est encore actuellement dans la faculté que l’Académie siège et tient séance. Pour ses activités au service de la science et de la santé, la société de pharmacie de Paris fut reconnue d’utilité publique le 5 octobre 1877 et devint Académie de pharmacie par décret présidentiel, le 5 septembre 1946, puis Académie nationale de pharmacie le 9 octobre 1979.

En effet, de nombreux travaux scientifiques furent publiés par la société de pharmacie de Paris concernant la découverte de nouveaux éléments ou substances chimiques, de principes actifs médicamenteux, extraits de plantes ou obtenus par synthèse : chloroforme par Soubeiran, quinine par Pelletier et Caventou, caféine et codéine par Robiquet, digitaline par Nativelle, colchicine par Houdé, le fluor par Moissan, stovaïne par Fourneau, sulfamides... pour ne citer que les plus connus. Furent également publiés des travaux princeps sur la biologie animale et végétale, l’analyse chimique, la biochimie médicale, les toxiques de guerre et leurs antidotes, les désinfectants... travaux effectués le plus souvent par les membres de la société. C’est par ces illustres prédécesseurs que l’Académie, héritière directe de la société de pharmacie de Paris, plonge ses racines dans une longue tradition de « société savante au service de la santé ». Elle se fait un devoir d’honorer leurs mérites et leur mémoire.

Consciente de ce précieux héritage mais aussi de la nécessité de s’adapter à l’évolution des sciences et de la société, l’Académie nationale de pharmacie a récemment réformé ses statuts dans un souci d’efficacité et de meilleure représentativité, tout en restant fidèle à ses orientations d’origine. Composée de 90 membres titulaires répartis en cinq sections de 18 membres, de membres honoraires en nombre non limité, de 15 membres associés libres, de 120 correspondants nationaux et de 75 correspondants étrangers, elle étudie et suit les thèmes majeurs de la pharmacie : recherche sur le médicament, nouvelles techniques biologiques, relations de l’homme et de son environnement, questions éthiques et sociales touchant les thérapeutiques nouvelles... Forte de deux siècles d’expérience, riche de la diversité de ses membres, l’Académie nationale de pharmacie est, aujourd’hui, non seulement une société savante au service des pouvoirs publics mais aussi une institution totalement indépendante à l’écoute de la société, de ses besoins et soucieuse de la légitime sécurité sanitaire. Elle participe, ainsi, à la défense des intérêts majeurs de la santé publique.

François Bourillet
secrétaire général de l’Académie nationale de Pharmacie

Source: Commemorations Collection 2003

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